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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 16:21

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse) 1981

 

Cours 4

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_4

Durée : 30,5 minutes - Face B - 151 02

 

…/…

Et qu’il ne pourra changer d’avis qu’une fois absolument convaincu.

Mais, s’il change d’avis, il change pour de bon.

Si nous sommes fils de Moïse, fils de Joseph, fils d’Abraham, d’Isaac et de Jacob c’est qu’il y a dans le fond de l’identité juive une permanence qui fait que quelque soit les milieux dans lesquels on se trouve, on arrive à se maintenir en nous-mêmes. Il y a d’ailleurs le miracle de l’existence du peuple juif et des communautés à travers les siècles car :

 2.10

וַתֹּאמֶר, כִּי מִן-הַמַּיִם מְשִׁיתִהוּ.

Ki Min Hamayim Meshitihou - Car il a été sauvé des eaux – comme on traduit habituellement mais le terme mashouï signifie « il est sorti des eaux ».

On émerge continuellement de l’eau dans laquelle on peut disparaitre.

 

Donc se maintenir dans l’existence de soi-même c’est faire en sorte de sortir continuellement de la définition de l’eau.

 

Or, voilà ce qui est arrivé à la génération du déluge : c’est la dixième génération, et le Péri tsadiq insiste énormément pour dire que ce n’est pas la onzième ni la neuvième mais la dixième. La 10ème, le chiffre 10 est le chiffre de la shlémout. Le Maharal explique dans un de ses textes. Shalem signifie complet, parfait. Les dix paroles, les dix épreuves d’Abraham, les dix jours de la Téshouvah, les dix générations entre Abraham et Noa’h et entre Noa’h et Mosheh. Il y a le chiffre extraordinaire du miniane, le qahal, la communauté qui est dix. Sur ce chiffre Maharal nous dit qu’il est l’unité du multiple : dix est un, l’unité des dizaines. Un dans lequel il y a dix, et dix, ensembles, qui constituent une unité. Si un seul d’entre eux manque, alors toute l’unité manque. Chacun en lui-même doit se considérer comme le complément de cette unité. L’unité ne signifie pas l’identité. Dans l’idée de l’identité, une sorte de mutilation de la fécondité de l’homme. L’identité à un modèle et le projet de ressembler à ce modèle est une limitation. Par contre, l’unité est extrêmement enrichissante lorsque constituée de dix personnalités complètement différentes qui, ensembles, constituent une unité. Avec la maintenance de la différence de l’identité personnelle et de la vocation propre de chaque individu, sans tomber dans l’individualisme puisque chacun se sait constitutif d’une unité avec le chiffre dix. Donc le dix représente véritablement le qahal et c’est une idée importante du judaïsme. Il ne s’agit pas de se fondre et de disparaitre à l’intérieur de la communauté ni de s’exprimer dans l’individualisme du salut de la voie personnelle et individuelle ; il y a une sorte de conciliation entre le caractère individualiste et quelque soit exacerbée dans le judaïsme et le caractère tout aussi exacerbée de la communauté. Et c’est le qahal de la communauté dans laquelle s’intègre le caractère individuel et communautaire où l’un ne peut exister sans l’autre et ou l’un s’enrichit par l’autre. Voilà le chiffre dix.

Lorsque j’ai le sentiment que je me développe personnellement sur le plan personnel tout en étant intégré à l’intérieur de la communauté en ayant conscience du chemin suivi c’est cela qu’on appelle la shlémout. Se savoir en chemin et que ce chemin qu’on se construit mène vers quelque chose, bien que le chemin soit infini, cette conscience est une conscience de shlémout.

 

Maharal va beaucoup plus loin : la conscience que j’ai de cette shelémout est un caractère ontologique, puisque la shelémout est un fait de personne, un fait de la conscience de l’unité. Mais cette conscience d’unité que j’ai de moi-même, qui est une perception ontologique, a un effet et une traduction psychologique qui s’appelle la sim’hah, la joie. Et le Maharal explique c’est qu’est la sim’hah : la conscience que j’ai de ma shlémout. Et ce qu’est la atsvout, l’amertume la plus grande, c’est la conscience que j’ai que je ne peux pas atteindre la shlémout.

 

Dans  notre problème, c’est la dixième génération et donc c’est celle de la shlemout, celle de la conscience de la perfection, avec l’évacuation complète de la faute du premier homme, définie aujourd’hui comme étant le passage du travail matériel à la libération économique qui me fait rencontrer le temps sans que cette rencontre soit tragique mais féconde.

 

Le texte de la Torah dit :

7.11

יא בִּשְׁנַת שֵׁשׁ-מֵאוֹת שָׁנָה, לְחַיֵּי-נֹחַ, בַּחֹדֶשׁ הַשֵּׁנִי, בְּשִׁבְעָה-עָשָׂר יוֹם לַחֹדֶשׁ--בַּיּוֹם הַזֶּה, נִבְקְעוּ כָּל-מַעְיְנֹת תְּהוֹם רַבָּה, וַאֲרֻבֹּת הַשָּׁמַיִם, נִפְתָּחוּ.

… jaillirent toutes les sources du grand Téhom et les fenêtres du ciel se sont ouvertes.

C’est une terminologie absolument ambigüe et c’est une ambigüité entretenue. Dans la mesure où les portes du ciel quand elles s’ouvrent cela signifie les temps de grâce. Ce n’est pas le signe de temps difficiles pour l’humanité. Au moment de la néilah, le moment le plus important de l’année au moment de Yom Kipour lorsque les portes du ciel se ferment. Lorsque les portes sont ouvertes c’est un temps de grâce et de rencontre entre le peuple juif et la Shékhinah.

 

Zohar sur Téhom Rabah - les abîmes en-bas : la rencontre de l’intelligence du ciel avec l’intelligence d’en-bas. D’après le Zohar, c’est donc une génération de connaissance, une génération de Daat. C’est la troisième dimension après ‘Hokhmah et Binah. La génération est donc parvenue au niveau du Daat. Mais en perturbant ce niveau du Daat.

 

La génération de la connaissance et de l’intelligence, génération de l’extrême. L’alternative de ce temps-là c’est l’arrivée du Mashia’h ou de la catastrophe. Ce n’est pas un temps médiocre, mais un temps de prédilection comme le jour du Matan Torah.

La génération du déluge a eu un niveau de ‘Hokhmah tel qu’ils sont parvenus au niveau économique à la situation de Adam HaRishone avant la faute. C'est-à-dire que le monde tout entier est redevenu un jardin d’Eden sur le plan de la production et de la technique. Selon le texte du Zohar, un homme ensemençait un champ d’un sel grain et obtenait de quoi manger pendant 40 ans… L’homme était complètement libéré sur le plan économique, et avait de quoi vivre sans avoir besoin de travailler grâce aux techniques extraordinaires qui libéraient du travail économique. Il y avait donc une utilisation de la ‘Hokhmah et de la Binah  permettant une investigation du monde et une connaissance scientifique et une maitrise technique du monde qui les a libéré complètement de toutes les contraintes économiques. C’est là l’idée de la Shlémout, et c’est ainsi qu’ils purent évacuer la faute du premier homme puisque c’est à ce niveau-là qu’elle se situait.

Mais à partir du moment où ils étaient libérés, ils n’ont pas réussi à vivre le temps du Shabat.

Le problème du travail se dégrade alors que Adam Harishone lui avait le moyen de le récupérer en s’investissant dans le travail, la dixième génération libérée du travail et disposant du temps, ils ont rencontrés le temps et l’idée de la mort.  Idée de la mort qui est absolument angoissante parce que c’est le néant et à partir du moment où l’homme rencontre le temps et le néant, de deux choses l’une, soit il devient fou, soit il est obligé de trouver un palliatif dans lequel il va s’engager pour oublier l’idée de la mort.

 

Et le texte est peu clair dans le Péri Tsadik mais je crois que c’est ainsi qu’il faut l’expliquer : l’idée de la mort les a envahi et les a conduit à une sorte de refuge dans un monde qui va leur faire oublier la mort. Problème d’ailleurs que nous rencontrons plus tard avec la rencontre de Jacob et Esaü. Tout le problème d’Ésaü est le problème de la rencontre avec la mort à laquelle il faut échapper, et il s’adonne au meurtre, à l’idolâtrie et à la débauche.

 

Le texte nous dit ici :

יא וַתִּשָּׁחֵת הָאָרֶץ, לִפְנֵי הָאֱלֹהִים; וַתִּמָּלֵא הָאָרֶץ, חָמָס.  

« … Vatimaleh haArets ‘Hamas - le monde s’est rempli d’injustice. »

Le texte va plus loin au début du verset :

« Vatisha’het HaAretz Lifnei HaElohim - la terre et tout ce qu’elle contient a pourri. ». 

 

C'est-à-dire qu’il y avait une sorte de moisissure qui a détruit le monde de l’intérieur. A partir du moment où c’est le problème de la rencontre avec la mort et l’angoisse de la mort il fallait trouver un refuge, et ce refuge consiste pour l’homme à rentrer en lui-même, mais il perd ainsi sa propre forme. Il n’avait plus conscience de la vocation de la forme de l’homme, il n’avait plus conscience de la finalité de sa propre forme, et c’est maintenant la matière qui domine l’homme plus que la forme puisque cette dernière lui pose problème : Le problème qu’elle lui pose est de savoir en quoi consiste ce souffle divin en nous, et qui représente en nous l’éternité : comment passer du temps éphémère à l’éternité. Ils auraient ainsi du faire le saut jusqu’au Shabat, mais la génération du déluge n’y est pas arrivé, et elle s’est investi beaucoup plus dans la matière que dans la forme. A partir de ce moment-là nous lisons : « Vatisha’het HaAretz »

Tant que le souffle de Dieu est en nous, il y a la forme qui permet la vie, et lorsque le souffle disparait alors la matière se retrouve seule et il y a pourrissement de la matière.

Ce pourrissement de la matière conduit à la disparition de la forme qui va s’effacer.

C'est-à-dire que la matière de l’homme va continuer à exister mais sa forme va disparaitre en étant engloutie à l’intérieur des eaux. A l’image du morceau de sucre qui se dissout dans l’eau sans disparaitre complètement. La matière continue à exister mais sa forme a disparu. Lorsque survient le déluge cela veut dire que l’homme a disparu dans sa forme et a continué à exister dans la matière. Ce n’est pas la providence divine qui a fait disparaitre l’homme, mais c’est l’homme lui-même qui n’ayant plus conscience de la vocation de sa propre forme a fondu à l’intérieur des eaux, et les eaux ne pouvaient rien faire d’autre que l’envahir et le faire disparaitre.  

 

Tout le temps de l’histoire, avec celle d’Abraham avinou en particulier, consiste à retrouver le temps de Shabat. L’homme qui nous donnera le temps du Shabat c’est Mosheh rabénou.

 

Parallèle entre Noa’h et Moïse pour voir en quoi Mosheh a réussi là où Noa’h a échoué.

La construction de la téva a duré 120 ans. Cela aurait pu être un quart d’heure, ou une demi-heure, mais cela a duré 120 ans. 120 ans parce que c’est le temps de la vie d’un homme.

 

6.14

יד עֲשֵׂה לְךָ תֵּבַת עֲצֵי-גֹפֶר   Asseh lekha Tevat Etsei Gofer.

Le mot Téva est toujours ambigu. Noa’h n’a pas compris l’ordre donné.

Téva une arche, une boite, à l’intérieur de laquelle on se trouve bien protégé.

Noa’h comprend l’ordre comme étant de construire un milieu dans lequel il va se protéger. Et il va se protéger pendant que le monde entier sera noyé dans le déluge !

En réalité, la sollicitation de Dieu était ambigüe. Dans la mesure où pendant 120 ans il devait construire parce qu’Il n’avait pas envie de détruire le monde, Il a sollicité Noa’h, Il a provoqué Noa’h pour qu’il refuse le décret de destruction. Faire une Téva c’est l’appeler à intervenir auprès de autres pour qu’ils dépassent le problème dans lequel ils se trouvent…

 

Téva signifie la foi, un mot et une arche. La Torah est essentiellement formée par des mots. L’ambigüité du terme consiste à ce que Noa’h aurait du comprendre dans « Asseh Lekha Téva » : « fais-toi un mot, fabrique-toi un discours » : l’intervention auprès des autres pour que le monde ne s’enlise pas complètement dans le déluge.

Nous retrouvons exactement cette histoire 20 générations plus tard avec Abraham où Dieu va chez Abraham et lui annonce la destruction de Sodome et Gomorrhe : on n’a jamais vu un discours de la part d’un homme confronté à Dieu aussi violent. D’une violence incroyable. Si bien que les commentaires disent que l’intervention d’Abraham est une déclaration de guerre faite à Dieu lui-même. Avec un discours presque blasphématoire :

18.25

הֲשֹׁפֵט כָּל-הָאָרֶץ, לֹא יַעֲשֶׂה מִשְׁפָּט  

Hashofet kol ha'aretz lo ya'aseh mishpat?

Le Juge de toute la terre ne ferait-il pas justice ?

Et Avraham invoque la justice pour empêcher Dieu de détruire Sodome et Gomorrhe.

De même avec l’intervention de Moïse :

« L’Egypte va dire que tu es un Dieu injuste, tu n’as pas le droit de faire une telle décision !»

 

On attendait de la part de Noa’h une intervention de ce genre. L’injonction de construire une arche n’était pas seulement la construction d’un mot dans lequel il devait se conserver et se garder lui-même mais le moyen de communication envers sa génération. Noa’h est par définition celui qui est en état d’inertie et de léthargie, il s’enferme à l’intérieur d’un mot et laisse les autres mourir. Il a fait une tévah, s’enfermant dans sa tévah à l’intérieur des eaux sans pouvoir transformer ces eaux par sa présence.

 

La Torah évoque une autre tévah sur les eaux dans laquelle se trouvait une personne : Moïse.

Moïse est sorti de cette tévah. Lorsqu’il devient adulte :

Shémot 2.11

וַיִּגְדַּל מֹשֶׁה וַיֵּצֵא אֶל-אֶחָיו

Vayigdal Mosheh Vayetse el é’hav - Et Mosheh grandit, il sortit vers ses frères.   

Il a considéré comme son propre devoir de ne pas rester enfermé à l’intérieur de son propre discours, de ses propres mots, mais il fallait que son discours sorte : Vayétsé el é’hav… il sortit vers ses frères et il vit leurs souffrances… 

Le problème de Moïse toute sa vie est de trouver le discours véritable qui permet de créer la véritable communication avec les autres.

Il était kévad peh, la bouche lourde, il avait refusé la communication parce qu’il ne se sentait pas à même de parler, et toute sa vie durant jusqu’aux derniers jours, il devait trouver cette tévah, le mot juste qui puisse lui permettre la communication avec le peuple juif.

 

2ème événements remarquable : au temps de Noa’h les eaux supérieures et inférieures se sont de nouveau rencontrées, plongeant le monde dans l’état de chaos originel, le rôle de Moïse est de faire sortir le peuple juif d’Egypte. Pas seulement la sortie des Hébreux de l’Egypte mais aussi la sortie de l’Egypte des Hébreux. Faire en sorte qu’il y ait Yetsiat Mitzrayim et non pas Yetsiat Yisrael MiMitzrayim. C’est la sortie d’Egypte de l’Egypte. Comment ? Dans la mesure où 7 jours après (le temps de l’accomplissement) normalement, le peuple d’Egypte aurait dû sortir d’Egypte et aller rencontrer les Hébreux. Cela aurait été l’événement messianique de la fin des temps : les Égyptiens et les Hébreux auraient traversé ensembles la mer rouge.

On aurait vécu une récupération et une évacuation compète du temps du déluge, dans la mesure où les eaux vont se fendre en deux comme au temps de la création et le peuple juif serait passé entre ces eaux avec les Egyptiens. 

Malheureusement, au lieu de reconnaitre Israël et de sortir avec eux, les Egyptiens les ont poursuivis pour les ramener en Egypte.

Israël a passé la mer rouge en grande vitesse par manque de mérite, les Egyptiens ont été engloutis par les eaux, sauf un seul qui a été sauvé, le Pharaon lui-même qui devait témoigner qu’une fois dans l’histoire les eaux se sont coupées et que le peuple Israël est passé.

Toute l’histoire consiste à recouper de nouveau les eaux pour que l’humanité toute entière, l’Egypte, puisse y passer.

 

Autre remarque :

Moïse porte en lui les deux noms. Et le refus de la génération du déluge était le refus des noms El et Shadaï.  Le refus de El c’est le refus de la justice divine et de l’intervention de la providence dans le monde. Et Shadaï, qui est Yesod, c’est la possibilité qu’a l’homme de se récupérer par lui-même.

Là c’est Malkhout et Yesod.

Cela veut dire qu’il y a une loi qui dépasse l’homme mais que l’homme doit assimiler, et que d’autre part, l’homme est capable par lui-même de se gouverner et de réussir dans une vocation particulière. C’est cela que la génération du déluge a refusé. Et nous savons que la guématria de Mosheh est équivalente à El Shadaï (345).

Moïse doit faire que l’humanité toute entière sorte du déluge pour retrouver le nom El Shadaï.

 

Q : inaudible

R : je crois qu’il y a des temps qui sont de prédilection. Nous vivons un temps spécial pour Israël, pour ne pas dire pour l’humanité, avec l’existence de l’état d’Israël, j’espère que nous aurons la possibilité de l’assumer. Il y a des temps qui ont plus de valeur que d’autres. Le temps juif n’est pas linéaire. Le Zohar parle beaucoup de Olam, Shanah, Nefesh. Dans la même année, des temps plus importants que d’autres. Ce temps-là était le temps de l’évacuation de la première faute et le temps messianique par excellence. Ils avaient la responsabilité d’évacuer le problème du travail. Toutes les difficultés de l’homme consistent à se libérer du travail pour devenir disponible. Cette disponibilité permet de résoudre les problèmes ou d’accroitre les problèmes selon les intelligences. Et toute forme d’intelligence est une épreuve. Le manque d’intelligence fait que les problèmes ne sont pas posés de la même manière.

Qohelet 1.18

יח כִּי בְּרֹב חָכְמָה, רָב-כָּעַס; וְיוֹסִיף דַּעַת, יוֹסִיף מַכְאוֹב

Car avec une grande sagesse un grand chagrin, et accroitre la science accroitra la douleur.

C'est-à-dire que les problèmes se situent à un niveau plus important.

 

Une anecdote :

On raconte du Gaon de Vilna qu’il étudiait 19 heures par jour. Et son yetser harâ l’incitait à se reposer et dormir un peu plus…

On raconte de Rabi Akiva Eiger un des grands maitres de dimension moindre que le Gaon, qu’il étudiait 16 heures par jour. Et son yetser hatov l’incitait à étudier une heure de plus.

Rabi Akiva Eiger a écrit au Gaon de Vilna : puisqu’il en est ainsi je veux échanger mon yetser hatov contre ton yetser harâ !

On raconte que le  Gaon de Vilna lui aurait répondu : Que Dieu te préserve de mon yetser harâ !

 

Plus l’homme est grand, plus les problèmes qu’il a sont grands, d’une nature et dimension totalement différentes.

Cette génération est parvenue au sommet de la connaissance et a donc eu en même temps les problèmes du sommet de la connaissance. Il s’agit ici en même temps d’un paroxysme de la connaissance et d’un paroxysme du problème. L’alternative est donc soit la grande réussite soit la grande culbute. Cela a été malheureusement la grande culbute, la dégradation depuis le sommet de la connaissance vers le plus bas dans le domaine des sens et des sollicitations matérielles et charnelles les plus basses.

Effectivement, c’est une génération de la connaissance, qui a dominé le monde, la technique et la connaissance, mais c’est aussi une épreuve que l’intelligence…

 

Q : inaudible

R : (Manitou): Il y a effectivement une promesse au moment de l’alliance de Noa’h qu’il n’y aura plus de déluge d’eau.  Maboul traduit par déluge signifie destruction. Maboul mayim signifie déluge d’eau. En français le mot déluge a pris le sens de déluge d’eau. Mais il peut y avoir un déluge de feu. C’est un autre symbolisme.

…/…  

 

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 16:19

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse) 1981

 

COURS 4

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_4

Durée : 30,4 minutes - Face A - 151-01

 

Rav David Messas : sur l’enseignement du Péri Tsadiq du Rav Tsadoq HaKohen MiLoublin, sur le texte de la Genèse concernant le déluge. 

 

Le déluge est longuement analysé dans le texte. Je parlerai de différents thèmes :

La notion de qets et sa signification comme limite, fin et début.

La notion de avodah, travail.

La notion de dixième génération

La notion de l’eau.

La notion du shabat.

Autour de ces cinq axes s’organisera notre réflexion sur ce texte.

 

6.13

וַיֹּאמֶר אֱלֹהִים לְנֹחַ

Et Elohim s’adresse à Noa’h:

קֵץ כָּל-בָּשָׂר בָּא לְפָנַי--כִּי-מָלְאָה הָאָרֶץ חָמָס, מִפְּנֵיהֶם; וְהִנְנִי מַשְׁחִיתָם, אֶת-הָאָרֶץ

La fin de toute chair est venue devant Moi, car la terre entière est remplie de violence à cause d'eux et Je vais les détruire avec la terre.

 

L’utilisation par la Torah de ce terme de qets car il renvoie toujours à l’événement messianique de fin des temps. Le qets c’est la fin des temps.

Il s’agit donc d’un temps de prédilection, d’un temps de révélation messianique, un temps de confrontation entre les événements, un temps charnière de l’histoire entre une fin et un début. Les temps messianiques sont considérés comme des qitsim, des moments importants. Ce n’est pas n’importe quelle génération que celle du déluge.

On les présente comme une génération de dépravés. Mais le midrash nous indique que cette génération est extraordinaire sur tous les plans, et c’est dans cette génération de fin des temps que le Mashia’h devait arriver, et où la faute originelle de Adam Harishone aurait été complètement évacuée. Le problème posé à cette génération dépasse le problème du ‘hamas, le vol, ou du conflit avec les problèmes de la tentation ou de la violence, il s’agit d’un problème de civilisation capitale, qui encore de nos jours en 1980 n’est pas encore complètement évacué. Cette génération a donc touché du doigt le messie et a échoué à tel point qu’il fallait tout raser pour tout recommencer.

Cela correspond d’ailleurs à ce que dit la guémara à propos de la venue du messie :

« Eïn Ben David Bah Ela Bedor Shekoulo ‘Hayav O Bedor Shekoulo Zakaï : le fils de David ne viendra que dans une génération complètement coupable ou complètement méritante. »
Ce qui veut dire que le messie n’arrive que dans une situation extrême, une situation limite, une situation de qets, ce qui est le propre de cette génération.

 

Deuxième remarque : lorsque HQBH a créé le premier homme Adam Harishone, il le plaça dans le jardin d’Eden léovdah oulshomrah :

 

 2.15

וַיִּקַּח יְהוָה אֱלֹהִים, אֶת-הָאָדָם; וַיַּנִּחֵהוּ בְגַן-עֵדֶן, לְעָבְדָהּ וּלְשָׁמְרָהּ

Et l’Éternel Dieu prit l’homme et le plaça dans le Gan Eden pour le travailler et le garder.

 

Au niveau littéral, c’est un rôle économique extrêmement important pour l’homme : il devait y avoir une relation d’investigation avec le monde en le transformant en le rendant habitable.

Au niveau du midrash :

Leovdah shemitzvot asseh, leshomrah mitzvot lo taasseh, les mitzvot positives et négatives.

Il devait donc habiter au jardin d’Eden pour cette avodah qui comporte cette ambiguïté : le travail de la terre Avodat Haaretz, ou le travail du service pour Hashem, Avodat Hashem. Mais en cas de dégradation on passe de Avodat Hashem à Avodat Haaretz, en cas de réussite l’homme reste dans le domaine de la Avodat Hashem.

D’après le texte biblique, le premier homme était installé dans une terre où il n’avait pas besoin de travailler : on pouvait planter et obtenir le pain directement. Le temps libre de l’homme était consacré à autre chose que l’investissement économique.

Le problème est que cette libération du travail économique rend le premier homme disponible pour la plénitude de son propre temps.

 

Talmud : « goy shéshavat ‘hayav mita : un non-juif qui pratique le shabat est passible de mort ».

Cela signifie que la pratique du shabat donne un jour disponible sur le plan matériel et que pratiquer le shabat à la manière d’un goy sans s’investir dans le travail spirituel rend l’homme disponible de son temps et le rend dangereux. Il dispose alors d’un temps libre dans lequel il n’est pas investi et sa disponibilité sans plénitude pour lui remplir son propre temps risque de le rendre dangereux. Le temps vide, non plein, est un temps considéré comme dangereux pour celui qui est vide, sans plénitude. Les statistiques le prouvent : les jours chômés sont les plus remplis de violences et de meurtres…

 

Au départ Adam harishone fut placé dans le jardin d’Eden pour pratiquer la loi morale et remplir son temps d’activités spirituelles. Après la faute, l’homme n’est plus capable de remplir ce temps par lui-même, il y a dégradation de la Avodat Hashem en Avodat Haarets, et de la Shemirat Hamitzvot en Shémirat Haaretz.

En lisant la suite du texte on s’aperçoit que la malédiction a consisté à dire à l’homme :

  

3.17

וּלְאָדָם אָמַר, כִּי-שָׁמַעְתָּ לְקוֹל אִשְׁתֶּךָ, וַתֹּאכַל מִן-הָעֵץ, אֲשֶׁר צִוִּיתִיךָ לֵאמֹר לֹא תֹאכַל מִמֶּנּוּ--אֲרוּרָה הָאֲדָמָה, בַּעֲבוּרֶךָ, בְּעִצָּבוֹן תֹּאכְלֶנָּה, כֹּל יְמֵי חַיֶּיךָ

Et à Adam Il a dit: "Parce que tu as écouté la voix de ton épouse, et que tu as mangé de l'arbre dont je t'avais enjoint de ne pas manger, maudite est la terre à cause de toi: c'est avec effort que tu en tireras ta nourriture, tous les jours de ta vie

3.18

וְקוֹץ וְדַרְדַּר, תַּצְמִיחַ לָךְ; וְאָכַלְתָּ, אֶת-עֵשֶׂב הַשָּׂדֶה

Elle produira pour toi des ronces et de l'ivraie, et tu mangeras de l'herbe des champs

3.19

בְּזֵעַת אַפֶּיךָ, תֹּאכַל לֶחֶם, עַד שׁוּבְךָ אֶל-הָאֲדָמָה, כִּי מִמֶּנָּה לֻקָּחְתָּ: כִּי-עָפָר אַתָּה, וְאֶל-עָפָר תָּשׁוּב

C'est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, - jusqu'à ce que tu retournes à la terre d'où tu as été tiré: car poussière tu es, et poussière tu redeviendras!"

 

Ce n’est pas la malédiction du travail comme on le croit, mais après la situation de faute, le seul moyen de libérer l’homme est qu’il puisse manger son pain à la sueur de son front, puisque s’investir dans le travail est une forme de libération. Mais c’est une forme de libération qui ne peut exister que parce que l’homme est en état de disgrâce, c'est-à-dire en état de faute. Maintenant, tout le travail consiste à se libérer du travail économique pour pouvoir être capable de conquérir son propre temps et de le remplir à la manière du shabat. C’est le chemin que l’homme doit faire après la faute du veau d’or : s’investir dans le travail pour se libérer du travail, rencontrer son propre temps et être capable d’assumer le temps à la manière du shabat et non pas à la manière du vide du temps. La rencontre de l’homme avec son propre temps est une rencontre angoissante, une rencontre tragique. Or, le chemin que l’homme doit parcourir pour retrouver la porte de l’Eden qui lui a été fermée c’est justement ce chemin qui consiste à le libérer du travail économique, libération qui va lui permettre de devenir plus disponible par rapport à son propre temps, et que la rencontre avec le temps ne soit plus tragique et destructrice mais féconde et enrichissante, shabatique.

Tout le travail consiste à retrouver le temps du shabat, à ce que l’homme renvoyé du jardin d’Eden puisse y entrer pour retrouver le temps du shabat. Le beau chant le soir du shabat : « Me-ein Olam Haba Yom Shabat Menou’hah » Il y a une sorte de résurgence du monde futur, lorsqu’on pénètre dans le shabat on pénètre dans cette disponibilité économique qui veut faire que on doit rencontrer le temps.

Un enseignement de mon père :

”Veshaverou Benei Israël Et Hashabat – et les Bnei Israël garderont le Shabat”

Il y a le jour du Shabat et l’homme qui s’appelle Shabat qui est le Talmid ‘Hakham, celui qui étudie tout le temps sans travailler. Il est ainsi le Shabat des autres parce tout son temps est un shabat. Le talmid ‘hakham à partir du moment qu’ile st disponible et consacre son temps à l’étude a besoin d’ë gardé par les Bnei Israël.

 

Le qets est un temps messianique,

Le problème du travail, la avoda, tout le travail de l’homme est de revenir au jardin d’Eden : faire ce chemin qui consiste à se libérer du travail économique pour se rendre disponible. Cette disponibilité qui était dangereuse va devenir féconde par cette rencontre positive du temps qui est le Shabat. Ce temps étant le temps du qets, la dixième génération de la création étant un temps messianique, c’est la seule génération qui était capable de réussir ce chemin et de faire ce retour pour réussir ce chemin. 

Un texte du Zohar explique qu’une neshamah était présente dans cette génération mais qui aurait dû se manifester pour faire le tiqoun pour tout réparer : la personne de Moïse.

Il aurait été le vrai mashia’h pour l’humanité toute entière, capable d’évacuer la première faute. L’âme de Mosheh rabénou était présente puisque toutes les conditions étaient présentes pour son apparition, mais au lieu de Moïse c’est Noé qui est apparu. Nous verrons la grande différence entre Noé et Moïse. D’habitude on compare Noé à Abraham.

 

Il y a un texte tragique dans la fin de Beréshit 6.5:

ה וַיַּרְא יְהוָה, כִּי רַבָּה רָעַת הָאָדָם בָּאָרֶץ, וְכָל-יֵצֶר מַחְשְׁבֹת לִבּוֹ, רַק רַע כָּל-הַיּוֹם. ו וַיִּנָּחֶם יְהוָה, כִּי-עָשָׂה אֶת-הָאָדָם בָּאָרֶץ; וַיִּתְעַצֵּב, אֶל-לִבּוֹ. ז וַיֹּאמֶר יְהוָה, אֶמְחֶה אֶת-הָאָדָם אֲשֶׁר-בָּרָאתִי מֵעַל פְּנֵי הָאֲדָמָה, מֵאָדָם עַד-בְּהֵמָה, עַד-רֶמֶשׂ וְעַד-עוֹף הַשָּׁמָיִם: כִּי נִחַמְתִּי, כִּי עֲשִׂיתִם. ח וְנֹחַ, מָצָא חֵן בְּעֵינֵי יְהוָה. {פ} ט אֵלֶּה, תּוֹלְדֹת נֹחַ

  5 L'Éternel vit que les méfaits de l'homme se multipliaient sur la terre, et que le produit des pensées de son cœur était uniquement, constamment mauvais; 6 et l'Éternel regretta d'avoir créé l'homme sur la terre, et il s'affligea en lui-même. 7 Et l'Éternel dit: "J'effacerai l'homme que j'ai créé de dessus la face de la terre; depuis l'homme jusqu'à la brute, jusqu'à l'insecte, jusqu'à l'oiseau du ciel, car je regrette de les avoir faits. 8 Mais Noé trouva grâce aux yeux de l'Éternel. 9 Ceci est l'histoire de Noé.

 

Noé semble préservé en raison des engendrements qu’il porte en lui. Il ne représente rien d’extraordinaire par lui-même.

Je m’arrête sur un mot de ce passage : la destruction du monde s’est faite par un des quatre éléments esh-roua’h-mayim-efer, ce n’est pas le feu mais l’eau qui a détruit le monde. Ce n’est pas un hasard, et nous expliquerons la symbolique de l’eau.

Lorsque Hashem parle il dit : « Ém’heh et HaAdam – J’effacerai l’homme », et non pas le brûler ou le détruire mais effacer. D’après le Peri Tsadik cela a une signification particulière. Effacer quelque chose ne signifie pas la détruire. Effacer sur une écriture sur un tableau ne fait pas disparaitre la matière de la craie toujours présente mais juste le dessin. Ce qui a disparu ici enseigne le Péri tsadik c’est la forme de l’homme mais non sa matière.

Une explication du Maharal de Prague que le Péri tsadik ne cite pas mais qui est soujacente à toute son explication : l’histoire juive toute entière est traversée par l’histoire de l’eau. On voit à travers l’histoire de Shémot que l’histoire juive est entièrement centrée sur l’histoire de l’eau. Lorsque le monde est créé, après le premier acte créateur survient la séparation des eaux d’en-haut et des eaux d’en-bas.

1.7

וַיַּבְדֵּל בֵּין הַמַּיִם אֲשֶׁר מִתַּחַת לָרָקִיעַ, וּבֵין הַמַּיִם אֲשֶׁר מֵעַל לָרָקִיעַ

Il sépara entre les eaux qui sont sous le firmament et entre les eaux qui sont sur le firmament.

 

Ce sont les eaux d’en-haut qui sont restés suspendues et les eaux d’en-bas qui sont restées dans le Téhom l’abîme. Et voilà que le monde est apparu parce qu’il y a eu cette séparation des eaux.

Le maboul c’est la rencontre de ces eaux. Mais l’existence du monde c’est la séparation des eaux. 

Mais l’eau est symboliquement ce qui est contraire à l’identité de l’homme.

Parlant de Moïse :

13.19

יט וַיִּקַּח מֹשֶׁה אֶת-עַצְמוֹת יוֹסֵף

Et Mosheh prit avec lui les ossements de Joseph.

 

Le nom de Moïse est en rapport avec l’eau :

2.10

וַתֹּאמֶר, כִּי מִן-הַמַּיִם מְשִׁיתִהוּ.

Ki Min Hamayim Meshitihou - Car il a été sauvé des eaux – mashouï il est sorti des eaux.

 

Mais Mosheh est celui qui se sauve des eaux. La traduction est différente : Moïse est celui qui émerge continuellement de l’eau. C’est l’homme qui par un effort personnel sort de la matière pour pouvoir exister. Une forme qui se maintient dans son existence par un effort perpétuel. 

 

Maharal : parmi tous les éléments, l’eau est le seul qui est matière sans forme puisqu’il prend la forme de tous les réceptacles. Il cite beaucoup Maïmonide qui utilise la terminologie d’Aristote de la matière et de la forme (‘homer vetsourah), et il trouve effectivement que l’important dans l’homme c’est la forme plus que la matière. « Dieu a insufflée dans la poussière de la terre pour en faire un homme nefesh ‘hayah… »

 

La poussière de la terre c’est la matière, et la forme de l’homme c’est le souffle de Dieu qui est en lui. Nous avons la forme, la conscience de notre propre identité, de notre propre être, de notre engagement et de notre avenir et de notre situation dans le monde, et cette conscience c’est le souffle de Dieu qui est en nous et qui s’appelle la forme tsourah.

De même que toute tsourah est esprit, une chaise est forme et matière, et la forme a existé dans l’esprit de celui qui l’a créée avant d’exister dans la matière. Si bien que la chaise elle-même est intelligente dans la mesure où il y a l’esprit de l’homme incarnée dans la chaise. De même en l’homme pour la tsourah et la matière. La matière de l’homme est symbolisée par l’eau et la forme que nous avons c’est ce qui est esprit en nous et qui représente l’acte créateur de Dieu puisque la matière qui est en nous fait partie de la terre, et la nouvelle création vient du souffle en nous qui a créé la forme. Et nous avons conscience continuellement de cette forme.

 

Lorsque Mosheh a pris l’identité - les ossement - de Joseph avec lui en sortant d’Egypte « atsmot Yosef », il devait se renforcer en sortant d’Egypte pour pouvoir affronter le peuple et les événements à venir. Il devait prendre l’identité de Joseph avec lui. Car Yossef est celui qui a eu toutes sortes de sollicitations. Il n’a pas eu une vie simple. En lutte contre ses frères jusqu’à 17 ans, puis chez les Ishmaélim qui l’ont emmenés en Egypte dans la maison de Poutifar et sa femme, la prison, le poste de vice-roi d’Egypte… une confrontation continuelle avec des milieux différents.

Le reproche possible de ses frères c’est qu’ils ne le reconnaissaient plus comme un frère mais comme le vice-roi d’Egypte. Joseph va s’évertuer continuellement à leur démontrer que derrière les apparences il est leur frère. « Ani Yossef A’hi’hem… »

Malgré les sollicitations des divers milieux et leurs tentations, Yossef est resté identique à lui-même. Alors que l’eau, par définition, subit toute les transformations et toutes les déformations des contenants dans lesquels elle se trouve, Yossef est par définition le même quelque soit la situation dans laquelle il se trouve. Et Jacob lorsqu’il le rencontre reconnait de suite qu’il est son fils malgré toutes les difficultés rencontrées...

Moïse sortant d’Egypte devait se consolider par cette identité avant de se confronter avec tous les milieux ambiants :

13.19

יט וַיִּקַּח מֹשֶׁה אֶת-עַצְמוֹת יוֹסֵף

Et Mosheh prit avec lui les ossements de Joseph.

 

Il a donc pris l’identité de Joseph avec lui qui consiste à se maintenir dans son existence et son identité quelque soit les sollicitations et les tentations d’identité auxquelles il est soumis.

 

Et Moïse est cette personnalité unique de l’histoire qui est considérée comme sortant continuellement de l’eau. Il se maintient dans son identité quelque soit les difficultés.

 

Un enseignement entendu sur le peuple juif comme Am Qeshe Oref, le peuple à la nuque raide : qui ne veut pas changer d’avis. Un texte du talmud dit que les Goyim sont beaucoup plus proches de la téshouvah qui leur est plus facile qu’à Israël. Cela signifie qu’il y a une sorte de fondement de l’identité Israël qui le rend entêté. 

…/…

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 16:17

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse) 1981

Cours 3

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_3

Durée : 45,0 minutes - Face B - 150 02

 

…/…

 

Les Hébreux ont eu peur parce qu’ils réagissent en monothéistes.

Tout se passe comme si le peuple s’est enfui de l’Egypte, Moïse est là et on va profiter du temps astrologique et de l’heure précise de la sortie du temps égyptien, et on va en profiter suite à la panique de la mort des premiers-nés qui les a paralysé pour sortir.

Trois jours après, Pharaon apprenant qu’ils se sont enfuis et qu’ils ne reviennent pas comme prévu après avoir rendu un culte à leur Dieu, prend conscience d’avoir laissé partir Israël qui lui appartenait encore. Parce que Pharaon avait rempli sa part du contrat des 10 plaies : laisser sortir le peuple Israël ou recevoir les dix plaies. Or, l’Egypte avait été frappée des dix plaies jusqu’à la dernière !  Par conséquent, Israël appartenait toujours à l’Egypte.

C'est-à-dire qu’Israël savait qu’il n’avait aucun droit à s’enfuir puisque l’Egypte avait payé le prix. C’est pourquoi Israël prend peur.  

 

De quel mérite de la foi s’agit-il ? Il s’agit précisément d’une foi au-delà du mérite, sachant qu’ils n’avaient aucun droit, de croire que c’est possible. Dieu leur répond qu’ils n’ont qu’une seule chose à faire, puisque même prier est hors de question puisqu’ils n’ont aucun droit contre l’Egypte: il faut prendre le pari d’entrer dans la mer pour créer ce décalage avec l’Egypte et alors Dieu peut intervenir. Tant qu’Israël ne fait rien, Dieu ne peut rien faire dans cette situation où même la prière ne pouvait être opératoire. 

Parce qu’il y a réclamation de l’Egypte d’en-haut qui interdit le favoritisme divin au nom de la justice. A cause précisément de la mort des premiers-nés : jusqu’à la dernière plaie, l’Egypte a payé le prix du contrat : laisser partir le premier-né de Hashem ou laisser le premier-né égyptien être frappé. Donc Israël lui appartient encore. Israël est conscient qu’il n’a aucun mérite supplémentaire sur l’Egypte à ce moment-là. Alors il prend peur et avec ses quatre réactions étudiées. Le suicide dans la mer, le retour en Egypte, la guerre, la prière. Mais Dieu refuse ces quatre réactions. La cinquième option de foi: « Parle aux Bnei-Israël et qu’ils avancent… » ! Elle implique les quatre autres stratégies, mais au niveau de la foi et non plus au niveau purement existentiel, y compris le quatrième qui serait un niveau religieux.  C’est une foi au-delà du mérite, la foi que même sans aucun mérite la promesse s’accomplira. C’est croire en une chose invraisemblable, non pas d’après des théologies des hérétiques, mais invraisemblable du point de vue de la loi de Dieu Lui-même. Rappelez vous la définition de la gdoulah de Dieu : que signifie être grand pour Dieu ? C’est être plus grand que soi-même ! Cette foi gratuite leur a donné force sur Dieu. C’est ce qu’Il attendait. 

La réalité est impitoyable, parce qu’au niveau de la vérité tout est clair. On s’attend à ce que tout Israël soit ce peuple de la foi - Maaminim Bnei Maaminim – et que tout Israël s’engage dans sa propre foi… Et c’est toujours en cela que l’on a cru depuis Abraham. On a cru en des choses invraisemblables, mais pas invraisemblable pour la raison mais pour la foi elle-même.

 

Le midrash va préciser qu’un seul homme a eu ce courage, et grâce à lui les autres ont suivi !  Mais il a fallu ce premier qui était Na’hshon Ben Aminadav. De la même manière après les 40 ans du désert un seul va avoir le courage d’entrer en Eretz Israël et il entraine tous les Bnei Israël : Kalev Ben Yéfouneh. Avec Yéhoshoua à la place de Mosheh.

 

Abraham se connait selon la vraie loi du monde comme Dieu l’a créé comme ne pouvant pas avoir d’enfant. Cela vient de Dieu lui-même. Et quand ce même Dieu lui dit qu’il aura quand même un enfant, il lui est difficile de le croire jusqu’à ce qu’il intègre cette foi-là. Et c’est la mutation religieuse dont j’ai parlé qui se produit.

Parce qu’Abraham est le fils de Téra’h le grand prêtre de la civilisation du temps. Cela se rattache à la fonction des Hébreux dans la civilisation du temps. Le midrash nous enseigne que Tera’h était fabriquant d’idoles. C'est-à-dire le grand-prêtre de la religion du temps qui fabriquait les symboles des idéaux auxquels les croyants de ce temps croyaient.   

Suivant la religiosité de ce temps-là, au niveau de la religion naturelle, mais nous sommes toujours dans le monothéisme hébreu, Abraham se connait comme la fin d’une civilisation. C’est une identité humaine qui connait les lois qui président à l’histoire du monde, et selon la vérité de la volonté du Créateur, elle prend connaissance d’elle-même comme étant à bout d’espérance, se connaissant comme stérile. C’est précisément à cet homme Abram que Dieu dit qu’il sera fécond, n’étant pas la fin d’une histoire antérieure mais le point de départ d’une fécondité pour l’avenir. C’est cette foi qui est difficile à intégrer au nom de la vérité et non pas parce qu’Abraham ne croit pas que Dieu soit incapable de le faire. Il entend deux voix contradictoires venant du même Dieu : la voix du Créateur du monde qui lui fait savoir qu’il ne peut pas avoir d’enfant, étant arrivé à la fin d’une histoire. Il ne s’agit pas ici d’avoir un petit d’homme, nous savons qu’Abraham en est capable comme le prouve sa descendance par Ishmaël avec Hagar princesse d’Egypte. Il s’agit d’être le point de départ d’une identité qui mènera à l’identité messianique. Or, Abraham se connait comme la fin d’un cycle antérieur, se connait comme le fils de ses pères… Mais Dieu lui dit qu’il est le père de ses fils. Et cette parole divine se heurte à ce qu’il sait de lui-même, jusqu’à ce qu’il arrive à croire en cela que Dieu puisse être plus fort que Lui-même, et qu’il y a donc un autre niveau de la providence divine, au-delà de celle qui travaille avec les lois de la nature. Puisque ces lois de la nature appliquées aux sociétés humaines font que c’est la fin d’un cycle et qu’Abraham n’a pas d’enfant. Mais il y a une instance de la providence qui est supérieure aux conditionnements naturels et qui s’appelle Hashem et non plus Elohim. « Véhémin Abraham bashem » dit le verset. Abraham, et c’est son mérite, a été capable de croire en la promesse de Hashem ce qui est contradictoire avec la décision de Elohim.        

 

Q : Comment relier avec le problème de la Aqédat Yits’haq, il lui donne et ensuite il doit le rendre ?

R : Oui, il faut aller jusque-là, il faut confirmer par le mérite de Aqédat Yits’haq ce don du fils. Ensuite le midrash étend cela à toute naissance. C’est caché et non visible, mais chaque fois qu’un enfant nait c’est le même miracle. Et il faut arriver à le déceler : selon la nature pure et simple on ne voit pas pourquoi un homme a un enfant ! Mais nous sommes tellement familiers à ce miracle qu’on ne voit plus que c’est un miracle. Chaque fois qu’un enfant nait c’est d’un néant qu’il est né, cela fait irruption dans la nature et on croit que c’est un phénomène naturel. Il y a dans la prodigalité de la bénédiction une familiarité dangereuse car elle rend aveugle.

Cf. dans « le Petit prince » de Saint-Exupéry la planète avec une seule rose, alors on sait ce qu’est une rose.

Lorsque c’est banalisé les fleurs perdent leurs parfums comme dans les sociétés contemporaines. Chose inouïe !

 

Retenez que nous sommes dans un monothéisme absolu. Par conséquent, la difficulté de comprendre que Dieu puisse me sauver de mon ennemi. Car c’est une relation à Dieu qui est réciproque : mon ennemi demande au même Dieu de le sauver de moi. Par conséquent, c’est le même Dieu qui est contre Lui-même ! Raison pour laquelle aucune des stratégies indiquées n’est opératoire et qu’il faille quelque chose d’autre.  

 

Devant la mer rouge, il fallait mettre à l’épreuve la capacité intellectuelle d’avoir foi. Il n’y a pas de contradiction.

L’option de foi est au niveau de la vie intellectuelle : croire que c’est possible. Et croire qu’il y a un mérite à cela parce que du point de vue de la vérité c’est impossible.

On peut objecter de la manière suivante : après tout, il avait la promesse, donc les Hébreux n’avaient pas à se préoccuper de la possibilité ou de l’impossibilité de son accomplissement ! Mais il y a une inquiétude. Cette promesse est faire pour un Israël en générale et s’accomplira pour un Israël en général, mais le particulier est-il concerné par cette promesse ? C’est là que réside l’inquiétude. Dit d’une autre manière : dans la conduite de la foi, il y a simultanément certitude absolue et incertitude absolue. Certitude absolue que la promesse venant de Dieu s’accomplira, mais incertitude absolue qu’elle s’accomplisse pour moi.

Et peut-être que le mérite qui fasse qu’elle s’accomplisse pour moi réside justement dans cette foi qu’elle s’accomplira précisément pour moi !

C’est à ce niveau-là qu’est la foi, et que cela me concerne. Et me connaissant cela est vraiment invraisemblable. D’où le mérite de la foi.

 

Il fallait qu’ils soient mis à l’épreuve au moment de la mer rouge pour mettre à l’épreuve leur intelligence : sont-ils capables de penser comme des Hébreux, c'est-à-dire savoir qu’une telle foi a un fondement ? Et il y a un mérite exceptionnel à croire cela. Parce qu’au fond c’est le devoir d’humilité qui risque de m’empêcher d’y croire. On admet que Dieu puisse envoyer le messie, mais pour soi-même ! C’est difficile à comprendre. Qui suis-je ? Pourquoi cette promesse me concerne ? C’est le courage de cette foi-là qui est recherché ici.

 

Je me rappelle très bien au moment de la guerre des six jours la question que nous avions posée au Rav Kook : pourquoi cela nous arrive-t-il à nous ? Pendant 2000 ans Israël a espéré parvenir au Kotel Hamaaravi en hommes libres et cela nous arrive à nous !? C’est le problème de la foi à l’échelle individuelle. Sa réponse fut très simple et très profonde à la foi : nous nous posons la question parce que nous ne savons pas qui nous sommes !

Si nous savions qui nous sommes, la question ne se poserait pas !

Au fond il s’agit de croire que Dieu a eu raison de nous créer. Sans savoir pourquoi, mais c’est cela la foi. Dieu sait pourquoi. C’est cela le courage de la foi et c’est la clef de tout le reste.

Il faut prendre conscience de cela pour arriver avec un dossier bien préparé à l’examen, car on ne sait pas ce qu’on doit réussir. Cette foi est d’un optimisme radical mais elle est très difficile. Il arrive un stade de la connaissance où on commence à entrevoir qui on est. Alors la foi devient plus facile parce qu’elle devient connaissance. Et si je sais qui je suis alors cela devient facile de savoir pourquoi Dieu m’a créé. Mais tant que je ne sais pas il y a un courage de la foi qui est une épreuve.

Cela veut dire au fond que tant que je n’ai pas confiance en moi, je mets en doute Dieu Lui-même, parce que c’est Lui qui m’a créé. Donc il faut commencer par avoir confiance en soi pour commencer d’avoir confiance en Dieu. 

 

La faiblesse de la foi risque de venir d’une trop grande vertu d’humilité. Beaucoup refuse d’être Israël parce qu’ils pensent qu’ils ne le méritent pas. Ils ne pensent pas être à la hauteur de cet appel divin et de cette promesse divine. C’est une sorte de reproche fait à Dieu de les avoir interpellés.

A l’échelle collective, on comprend le mérite d’Israël et donc il ya certitude absolue que la promesse s’accomplira. C’est à l’échelle individuelle que s’introduit l’incertitude. Ne pas se sentir concerné… etc.

 

…/… pause

 

Nous sommes arrivés en fin d’explication de l’enseignement de Rabi Eliezer selon lequel le passage par la mer rouge était la mise à l’épreuve au niveau de l’intelligence pour savoir si cette partie du peuple serait ou non capable de cette foi dont nous avons parlé.

 

Dans la formule du Maharal la difficulté est précisément dans le monothéisme lui-même.

 

« Tout ce que Dieu leur a fait parce qu’au moment de la sortie d’Egypte la Shekhinah était avec Israël »

 

Ce n’est pas seulement la sortie des Hébreux d’Egypte mais également la sortie de la Shékhinah d’Egypte. C’est donc plus important que ce qu’on pourrait croire. Sont en jeu le sort d’Israël mais aussi le sort de la Shékhinah. ébreux

 

Que signifie l’exil de la Shékhinah et son enjeu ?

Rappelez-vous du verset :

14.13

יג וַיֹּאמֶר מֹשֶׁה אֶל-הָעָם, אַל-תִּירָאוּ--הִתְיַצְּבוּ וּרְאוּ אֶת-יְשׁוּעַת יְהוָה, אֲשֶׁר-יַעֲשֶׂה לָכֶם הַיּוֹם: כִּי, אֲשֶׁר רְאִיתֶם אֶת-מִצְרַיִם הַיּוֹם--לֹא תֹסִפוּ לִרְאֹתָם עוֹד, עַד-עוֹלָם.

«… Rassemblez-vous et regardez le salut que Dieu fera pour vous... »

Mais entendu en hébreu cela dit : « יְשׁוּעַת יְהוָה   le salut de Hashem lui-même ».

C’est le salut de la Shékhinah, car un monde où la Shékhinah est en exil a besoin de la délivrance de la Shékhinah de l’exil.

On dit souvent que « lorsque les Bnei Israël est en exil, la Shékhinah est en exil avec eux », et on entend en général que c’est pour les protéger. Mais on oublie ce que cela signifie : pour les protéger parce qu’ils sont en exil, il faut que la Shékhinah soit elle-même en situation d’exil ! Et l’exil de Shékhinah transforme le monde en enfer ! Cela veut dire un monde sans Shékhinah parce que le monde est en exil de Shékhinah ! Cela veut dire que cette fin d’exil pour Israël recouvre quelque chose d’une importance considérable : la délivrance de la Shékhinah.

Nous avons par d’autres traditions que la Shékhinah est délivrée au prorata du nombre des Hébreux sortis d’Egypte. La quantité (qualité) de Shékhinah dans le monde dépend de cela. Tout se passe comme si les Goyim, consciemment ou inconsciemment, savent ce problème que si la Shékhinah est en exil c’est parce qu’Israël est en exil, et que si le monde est privé de Shékhinah c’est la faute des Juifs ! Et il arrive que les Goyim se vengent de cet état de fait car un monde sans Shékhinah c’est un monde impossible.   

 

Il y a beaucoup d’exemple de ce problème. Quand par exemple Jacob bénit ses enfants en fin de sa vie, et il veut leur prophétiser la fin des temps d’exil, mais qu’il ne voit pas la fin des temps d’exil. Alors il s’arrête dans les bénédictions pour dire un verset extraordinaire :

49.18

«לִישׁוּעָתְךָ, קִוִּיתִי יְהוָה   J’espère en ton salut Hashem »

Au niveau pshat : « je ne vois pas la fin de l’exil pour mes enfants mais j’espère en ton salut Hashem ». Ce pshat nous mène à une autre lecture : Israël ne mérite pas d’être sauvé de l’exil mais il faut que Hashem soit sauvé de l’exil, c’est donc l’assurance qu’Israël sera sauvé de l’exil…

C’est la foi que Dieu puisse être sauvé. La Shékhinah, la présence de Dieu au monde est prisonnière et il faut la délivrer. Et c’est toute l’histoire d’Israël. Si Israël sort de l’exil alors la Shékhinah sort de l’exil pour le monde entier. C’est pourquoi les Goyim sont toujours pris dans cette impasse : laisser partir les Juifs et donc la Shékhinah, garder les Juifs et donc maintenir la Shékhinah en exil chez eux… Ils préfèrent donc à tout de rôle l’une ou l’autre des solutions : une petite Shékhinah mais au moins qui soit chez eux… ou bien une grande Shékhinah pour le monde ? Et finalement, la décision dépend des Juifs…

Cela touche au problème de la cause profonde de l’antisémitisme.

Toutes les argumentations des antisémites sont fausses. Ils reprochent aux Juifs des choses fausses. Avec une permanence dans cette obsession incompréhensible à rejeter la faute sur les Juifs. Sans pourvoir formuler clairement cette vérité : c’est la faute des Juifs que le monde soit sans Shékhinah. 

Ils ne savent pas ce qu’ils disent mais c’est cela qu’ils disent… Et de nouveau nous sommes dans cette cohérence du monothéisme total…

 

Quand les Hébreux sont en Egypte la bénédiction est en Egypte. Pas question de les laisser partir. On devrait leur enseigner qu’ils ont intérêt à les laisser partir car si la Shékhinah est à Jérusalem la bénédiction sera en abondance pour le monde entier, plus encore que dans les pays d’exil lorsque les Juifs y sont en exil. Il y a une bénédiction à la hauteur de la Galout de la Shékhinah. Il y a des temps où la Shékhinah fonctionne dans l’exil et des temps où la Shékhinah ne fonctionne plus dans l’exil. Parce que le temps d’exil a cessé. Si la Shékhinah n’arrive pas à se libérer pour fonctionner à Jérusalem, alors c’est là que le monde se transforme en enfer. Dans la mesure où les Goyim le perçoivent inconsciemment, à leur manière, alors ils déclenchent une haine contre les Juifs qui est incompréhensible tant qu’on ne la comprend pas.

 

…/…

 

Dès qu’il y a un problème, les Goyim considèrent que c’est la faute des Juifs. Avec derrière le fait que la Shékhinah est prisonnière.

Pendant 2000 ans les Chrétiens ont dit que les Juifs étaient déicides, et subitement ils s’aperçoivent que peut-être ce n’est pas vrai. Ils réfléchissent, grâce à Jules Isaac entre autres. C’est énorme parce que pendant 2000 ans ils avaient de cela l’axe principal de leur foi. Comment faire, et c’est là le secret de la conscience chrétienne, après s’être trompé sur l’essentiel et rester infaillible ? Comment vivre avec de telles contradictions, c’est leur mystère !

Quand commencent-ils à douter cette accusation de déicide des Juifs ? Quand Israël revient sur sa terre ! C’est frappant. Ils expriment donc la même chose dans leur langage.

Nous disons que la Shékhinah est en exil, et eux ils disent que nous avons tué Dieu ! Et ils commencent à en douter quand ce n’est plus le cas dans la  réalité. Il est bien évident que cela ne justifie aucun antisémitisme, fut-il chrétien, car dans tous les cas ce sont des méchants. Mais c’est ce qu’il y a derrière. Derrière la dialectique galout-géoula il s’agit bien sûr de l’histoire d’Israël, mais plus profondément, il s’agit de l’histoire de la Shékhinah.

Le monde est tombé en syncope, est comme un somnambule, depuis 2000 ans après la destruction du temple. Vous n’avez qu’à suivre la littérature universelle depuis ce temps-là et vous voyez que le monde est entré dans l’âge de l’absurde. Un enfant qui grandit et prend conscience du monde dans lequel ses parents l’ont fait naitre constate que quelque chose ne tourne pas rond. Ce n’est pas un monde mais un enfer ! Un monde sans espérance… Depuis 2000 ans, depuis la destruction du temple. Depuis que la Shékhinah est en exil !

Cette philosophie de l’absurde, c’est la prise de conscience au niveau existentiel simple de ce que le midrash dit en disant que la Shékhinah est en exil. C'est-à-dire un monde qui ne porte pas l’évidence qu’il ait un sens. Un monde où on attend une présence et qui est une absence. Et n’importe quel enfant vous expliquera cela. Il est probable que ce soit cela qui nourrit la haine des enfants pour leurs parents. Cette mise au monde de l’enfant est en fait une mise en enfer.

Rabi Na’hman de Braslav sur les notions de Olam Haba et Olam Hazeh : Olam Haba un monde qui soit vraiment un monde, je peux le comprendre, mais Olam Hazeh où est-ce ? Parce qu’ici c’est l’enfer !  

 

Il faut relire toute l’histoire des grandes civilisations, impures et idolâtres mais qui avaient une foi et donnaient un sens à leur vie. Mais depuis 2000 ans on entre dans ce que les traditions extrême-orientales appellent « l’âge noir », le Kali Yuga. C’est exactement le temps de l’exil de la Shékhinah dans le vocabulaire hébraïque. Et pendant ce temps-là, les Chrétiens qui représentent la religion officielle de la civilisation du temps disent une absurdité colossale à laquelle ils croyaient sans savoir en quoi ils croyaient : « vous avez tué Dieu ! »

Les Hébreux leur répondent au niveau de la raison : « peut-on tuer Dieu ? »

Ils invoquent : « C’est un mystère, mais vous avez tué Dieu ! »

Mais le fait frappant c’est qu’ils commencent à douter de cela, tout en restant infaillibles, quand les Juifs reviennent à Jérusalem. Il y a alors un espoir que Dieu va être ressuscité…

 

Quelque soit la manière dont ils le disent ou ils le pensent, ils seront punis pour cela, mais le fait reste. C’est ce à quoi fait ici allusion le Maharal :

Au moment de la sortie d’Egypte, la Shékhinah est également impliquée. Et Dieu a voulu enlever l’indignité d’Israël comme véhicule de la Shékhinah : Il a voulu les rendre aptes à être ce véhicule de la Shékhinah. Ils sont sortis avec la Shékhinah avec eux, mais la Shékhinah était mal à l’aise à cause de ce véhicule trop grossier, alors il a fallu épurer ce véhicule…

 

Tous ces enseignements qui nous viennent des sources traditionnelles sont du domaine du nistar, des choses cachées. Dès qu’on commence à en parler on les viole. Peu importe le vocabulaire employé, l’essentiel est d’avoir l’intuition de ce dont il est parlé…

 

Histoire de Pourim :

Shabat 88a l’enseignement suivant :

Guemara shabat 88a

Shemot 19.17

« Et ils se rassemblèrent au pied de la montagne ».

"Israël s´installa sous la montagne"[1]. "Sous la montagne?" S´interroge Rav Yossef Bar Avdimi. Oui, explique‑t‑il, ce verset nous enseigne que Dieu plaça le Mont Sinaï au dessus des Hébreux comme un tonneau et leur dit: "Si vous acceptez la Torah, c´est bien, sinon là‑bas sera votre tombeau". Rav A´ha fils de Yaakov interpella: Si c´est ainsi, la violence a été utilisée pour la Thora! Rav a dit : malgré cela ils l’on de nouveau accepté au temps d’Assuérus.

Ainsi qu’il est écrit : « qimou veqiblou hayéhoudim ils ont accompli et accepté les Juifs les jours de Pourim » Esther 9.27

 

« Lorsqu’Israël est arrivé au pied du Sinaï Dieu a soulevé la montagne et déclara à Israël : « Si vous acceptez la Torah c’est bien, sinon là-bas sera votre tombeau ! »

Objection de la guémara : cela rend possible la contestation contre la Torah ! Puisqu’il a été imposée par la force.

Réponse : Au moment de Pourim il se dévoile qu’il l’avait réellement accepté de bonne grâce comme il est écrit dans la méguilah : « Qimou veqiblou HaYehoudim ».

En résumé : Les Juifs ont réalisés et accepté la Torah. Au Sinaï il y avait contrainte parce qu’il y avait révélation. Lorsque Dieu se révèle qui peut dire non ? C’est ce que dit ce midrash.

Arrivés au Sinaï, les Hébreux étaient contraints, donc ce n’est pas un mérite. Leur mérite est de se rendre au rendez-vous lorsque Dieu se révèle tout en sachant ce qui les attendrait. C'est-à-dire que Dieu a imposé la Torah mais a ceux qui étaient prêts à l’accepter d’eux-mêmes. Mais Il l’a imposé pour que ce soit définitif, sinon si cela dépendait de l’homme : un jour je dis oui, un jour je dis non. Mais l’alliance imposée par Dieu est définitive et irréversible, sans divorce possible. 

Et la preuve qu’ils étaient prêts à accepter est donné quand la révélation cesse. La révélation prophétique a duré depuis Avraham jusqu’à Pourim. A Pourim, la révélation a cessé et pourtant les Juifs sont restés fidèles à la Torah. Cela dévoile qu’ils étaient déjà consentants au Sinaï. 

 

Mais le verset de la méguila est écrit de la manière suivante :

 9.27

כז קִיְּמוּ וקבל (וְקִבְּלוּ) הַיְּהוּדִים עֲלֵיהֶם וְעַל-זַרְעָם וְעַל כָּל-הַנִּלְוִים עֲלֵיהֶם, וְלֹא יַעֲבוֹר--לִהְיוֹת עֹשִׂים אֵת שְׁנֵי הַיָּמִים הָאֵלֶּה, כִּכְתָבָם וְכִזְמַנָּם: בְּכָל-שָׁנָה, וְשָׁנָה.

Ils ont accompli et accepté les Juifs sur eux et sur leur postérité et jusqu’à tous ceux qui s’adjoignent à eux (les guérim) de faire sans exception ces deux jours de fêtes comme ils ont été écrits et en leurs temps.

 

קִיְּמוּ וקבל   Qimou veQibel

Au singulier et on lit comme s’il était écrit Qiblou.

Ils ont réalisé et il a accepté : un seul avait accepté. C’est Kalev Ben Yefouneh.

Le midrash enseigne que HQBH avait soulevé la montagne et dit : soit vous acceptez la Torah et c’est bien, soit là-bas sera votre tombeau !

 

Or, ils ont accepté la Torah et pourtant le désert fut leur tombeau ! Toute la génération a été enterrée dans le désert !

Comme le dit le verset :

Or, la raison pour laquelle ils ont été enterrés dans le désert c’est parce qu’ils n’ont pas voulu entrer en Eretz Israël.

On apprend deux choses : premièrement que rentrer en Eretz Israël et accepter la Torah c’est la même chose, (c’est écrit dans la guémara, je ne vous cite pas Ben Gourion !) et deuxièmement, qu’un seul de cette génération avait accepté de rentrer dans cette génération c’était Kalev Ben Yefouneh. Avec ce rémez dans ce verset de la méguila. 

 

Guémara Méguila pose la question suivante :

Chaque fois qu’un récit commence par Vayhi cela indique un malheur

Objection de la guémara avec le début de Méguilat Ester qui raconte un événement heureux. « Vayhi Bimei A’hashverosh… »

Réponse : ce fut un grand malheur, le prix à payer pour que la communauté juive soit sauvée fut la reine Esther et donc la royauté d’Israël donnée au Perse.

 

Midrach Rabah 58.3 : Rabbi Akiva était assis et enseignait et ses élèves somnolaient. Il a voulu les réveiller. Il a dit: «Pourquoi Esther a-t-elle régné sur 127 provinces? Parce qu’Esther descendait de Sarah qui a vécu 127 années, elle (Esther) a régné sur 127 pays.

 

Ce midrash compare le nombre des provinces de l’empire Perse au nombre d’année de Sarah 127.

Un des grands maitres des ‘hassidisme allemand, rabi Yehoudah Ha’hassid, a enseigné dans le Sefer Ha’Hassidim : la raison pour laquelle le nom divin n’apparait pas dans Méguilat Ester. (Nous avons vu une autre raison hier). Il dit que le nom Hashem apparait dans l’histoire des engendrements de l’homme, les toladot. Or, les engendrements d’Israël ont commencé avec Sarah et se sont arrêtés avec Esther. C’est pourquoi le nom de Hashem disparait. Elle a eu des enfants mais qui ne sont pas des toladot.

 

Nous avons un parallèle du rythme des événements extraordinaire entre les événements du temps de Mardochée et Esther à Pourim, et les événements contemporains que nous avons vécus : il y a eu la déclaration Qoresh-Cyrus, quelque temps après Hamane prend le pouvoir, mais en ce temps-là il y avait la reine Esther. De notre temps, nous avons eu la déclaration Balfour, quelques temps après Hitler prend le pouvoir, mais on n’a pas eu la reine Esther.   

 

On apprend de la Méguilat Esther que les Juifs sont restés en Perse malgré la déclaration de Cyrus : tout celui qui le veut peut monter. De la même manière de notre temps, les Juifs sont restés en Europe, malgré la déclaration Balfour.

 

Cela veut dire, dans le fond des choses, que quand c’est encore le temps de l’exil, la Shékhinah a la force de protéger Israël. Quand ce n’est plus le temps de l’exil, elle n’a plus cette fonction.

Effectivement, pendant ces deux mille ans, nous avons supporté les persécutions et ce programme des Goyim qu’ils appellent pogroms. Et arrive un temps où les persécutions ont changé de niveau et où il s’agissait vraiment d’annuler le peuple juif. Mais on a cru qu’il ne s’agissait encore que de persécutions, sans percevoir que le temps de l’exil s’était achevé, et on se retrouve devant le néant. Cela suscite la question : que fait la Shékhinah ? Elle est ligotée, prisonnière parce qu’il y a un contrat. C’est dit à propos de Jacob, quand il reçoit l’ordre de descendre en Egypte, il refuse car il a peur, et HQBH lui dit de ne pas avoir peur, qu’Il sera avec lui et le ramènera. Mais cela veut dire que HQBH est avec Jacob en exil pendant tout le temps où il doit y être ! Quand c’est le temps de revenir il faut revenir.

 

Voilà, dit comme ça ou autrement, on peut toucher du doigt un problème extrêmement grave : Il y a une loi des temps. Durant tout ce temps possible prévu pour l’exil il y avait des étapes où Israël aurait pu mériter que cela s’achève. Mais on n’a mérité à aucune des étapes. Arrive alors la fin de l’époque d’exil. Et si à cette date les conditions du retour sont en place et le peuple ne veut pas revenir alors il est sans protection. Dans le langage imagé, je vous ai dit que la reine Esther n’était pas là. Elle était là mais impuissante. A part pour les na’hshonim, une simple poignée d’abord en Russie, qui ont perçu le changement d’allure des persécutions qui montraient le risque d’annihilation du peuple juif et qui ont décidé de décrocher. Mais ils n’ont pas été suivis.

 

Cette histoire n’est pas finie. C’est la même guerre avec Amaleq qui travaille là-dedans.

Chaque fois qu’il y a intention d’annuler l’identité Israël c’est Amaleq qui est derrière. Ce n’est probablement pas un hasard que « Assué-russe » ! Mais il faut avoir des yeux « persans » pour le voir… (Rires)  .../...  

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 16:15

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse) 1981

 

COURS 3

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_3

Durée : 43,8 minutes - Face A – 150-01

 

…./…

 

… ceux qui définiraient l’entité Israël comme celle des membres d’une congrégation religieuse de la Torah du Sinaï. Et ceux qui définissent l’identité d’Israël comme une nation à partir d’Abraham. Nous avons beau avoir les mêmes textes, leur lecture est radicalement différente. Et cela ne peut être deux lectures simultanément authentiques, puisqu’elles sont exclusives l’une de l’autre. Pourquoi la lecture de ces mêmes textes est-elle différente ? Cela vient de l’identité profonde du lecteur. C’est pourquoi il y a de quoi être inquiet du risque d’une cassure analogue à celle du temps de la sortie d’Egypte.

Je m’étonne de cette incapacité de lire la Bible en hébreux de la nation hébraïque. On y projette une espèce de lecture confessionnelle, religieuse dans le sens occidental, qui la fausse complètement. Cela devient un hébreu de cuisine, celui de la cacherout, qui d’ailleurs nous cache la route…

 

« Vayhi Beshala’h Paro Et Haâm »

Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple

 

Non pas laisser partir mais renvoyer ce peuple qu’il ne voulait pas laisser sortir et qui est devenu une malédiction !

Dans la première phase, Pharaon est conscient que les Hébreux en Egypte sont porteurs de bénédiction. Il ne peut pas les laisser partir. Chaque fois que le temps de sortir d’une civilisation arrive, alors apparait ce paradoxe de la civilisation qui ne supporte pas cet embryon devenu parasite (parasite à une certaine hauteur, comme l’embryon est parasite dans le sein de sa mère) mais qui refuse l’accouchement et ne peut envisager sa sortie, et alors l’embryon devient vraiment parasite. L’embryon empoisonne sa mère qui empoisonne l’embryon… et il arrive toutes les catastrophes que nous connaissons. Quand les Juifs empoisonnent les Goyim qui empoisonnent leurs Juifs… Cela continue.

 

Pendant la première phase le Pharaon ne veut pas laisser sortir le peuple. C’est très analogue avec ce qui se passe chaque fois que le temps est venu de sortir d’Egypte. Je pense à la Russie qui ne veut pas laisser sortir ses Juifs. Quelque soit les arguments donnés cela revient à ceux du Pharaon qui ne veut pas perdre son âme ! L’avenir de l’Egypte dépend de l’identité hébraïque. Comme l’attitude de la marâtre qui ne veut pas accoucher du fils par peur de mourir en couche. C’est ce qui se passe à chaque péripétie dont le modèle se trouve dans ce récit.

Finalement, le Pharaon, affolé des plaies, est pris de panique et il expulse le peuple.

Puisque c’est arrivé ainsi dit la Torah que « Vayhi Beshala’h Paro Et HaAm » que c’est Pharaon qui a du expulsé le peuple, alors c’est le signe que le peuple n’était pas prêt à sortir de lui-même et qu’il doit passer par un stage d’apprentissage au Sinaï.

 

Le midrash nous a dévoilé la structure du texte. Pas tout le peuple mais une partie. A partir de cela on sait qu’il y a cinq parties de cinq niveaux différents. 

 

13.17

וַיְהִי, בְּשַׁלַּח פַּרְעֹה אֶת-הָעָם, וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא:  כִּי אָמַר אֱלֹהִים, פֶּן-יִנָּחֵם הָעָם בִּרְאֹתָם מִלְחָמָה--וְשָׁבוּ מִצְרָיְמָה

Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple, Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche car Elohim a dit : de peur que le peuple ne regrette en voyant la guerre et ne retourne en direction de l’Egypte.

 

Par conséquent il faut les mettre à l’abri pendant 40 ans.

 

13.18

וַיַּסֵּב אֱלֹהִים אֶת-הָעָם דֶּרֶךְ הַמִּדְבָּר, יַם-סוּף; וַחֲמֻשִׁים עָלוּ בְנֵי-יִשְׂרָאֵל, מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et Dieu fit contourner le peuple par le chemin du désert Yam Souf

Et c’est armés en guerre que les Bnei Israël sont montés d’Egypte

 

C’est ici que le midrash intervient.

Quelle fut la raison du passage par la mer rouge ?

Selon le principe général précédent : à priori ce passage n’était pas nécessaire. A postériori, il se dévoile que c’était très important. Que s’est-il passé entretemps ? Entretemps il s’est dévoilé que l’immense majorité du peuple n’est pas prête au voyage. La première partie du voyage lui a été imposée et le peuple risque de renoncer devant les difficultés de la deuxième partie du voyage.

Cette structure des quatre qui sont cinq apparait toujours.

La motivation de la sortie d’Egypte est donnée de façon très claire dans le chapitre 6 de Vaéra. Pour accomplir la promesse faite aux ancêtres de quitter l’exil et de revenir au pays de la promesse. On voit là la structure des quatre termes de la délivrance plus le cinquième qui correspondent dans la Hagada de Pessa’h aux quatre verres de vin plus le cinquième qui a été institué il y a quelques années en Israël, et dont je vous parlerais pas la suite.

 

13.17

וַיְהִי, בְּשַׁלַּח פַּרְעֹה אֶת-הָעָם, וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא:  כִּי אָמַר אֱלֹהִים, פֶּן-יִנָּחֵם הָעָם בִּרְאֹתָם מִלְחָמָה--וְשָׁבוּ מִצְרָיְמָה

Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple, Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche car Elohim a dit : de peur que le peuple ne regrette en voyant la guerre et ne retourne en direction de l’Egypte.

13.18

וַיַּסֵּב אֱלֹהִים אֶת-הָעָם דֶּרֶךְ הַמִּדְבָּר, יַם-סוּף; וַחֲמֻשִׁים עָלוּ בְנֵי-יִשְׂרָאֵל, מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et Dieu fit contourner le peuple par le chemin du désert Yam Souf

Et c’est armés en guerre que les Bnei Israël sont montés d’Egypte

 

Et ce sont ces trois termes derekh - hamidbar - yam souf que le midrash va étudier.

Derekh le chemin. Hamidbar le désert. Yam Souf la mer rouge (la mer des joncs).

 

Première opinion de la Mekhilta :

Rabi Eliezer dit :

Derekh le chemin pour les fatiguer.

Psaumes 102.24 :

 כד עִנָּה בַדֶּרֶךְ כחו (כֹּחִי)  

Ina badérekh ko’hi : il a amoindri ma force par le chemin » (les voyages fatiguent).

Hamidbar pour les affiner-épurer (letsaref).  Comme il est dit :

 טו הַמּוֹלִיכְךָ בַּמִּדְבָּר הַגָּדֹל וְהַנּוֹרָא

« (Dieu) Qui t’a dirigé dans ce désert grand et redoutable (afin de t’éprouver). »

Yam Souf - la mer rouge, pour les purifier. Comme il est dit (Psaumes 106.7):

וַיַּמְרוּ עַל-יָם בְּיַם-סוּף

« Et ils se révoltèrent sur la mer à Yam Souf ».

(Dans les quatre manières de révoltes que nous avons vues).

Le système de Rabi Eliezer comporte trois niveaux, en correspondance aux trois mots derekh – hamidbar - yam souf..

 

Rabi Yehoshoua dit :

Derekh pour leur donner la Torah. Comme il est dit (Devarim 5.29):

כט בְּכָל-הַדֶּרֶךְ, אֲשֶׁר צִוָּה יְהוָה

« Dans toute la voie que Hashem vous a ordonné… »

 

Derekh est ici synonyme de Torah comme la voie à suivre. C’est un système d’explication totalement différent.

 

Hamidbar pour leur donner la manne. Comme il est dit :

Devarim 8.16

הַמַּאֲכִלְךָ מָן בַּמִּדְבָּר

« (Dieu) qui t’a nourri de la manne dans le désert ».

Yam Souf pour leur faire des miracles : Comme il est dit (Psaumes 106.9):

ט וַיִּגְעַר בְּיַם-סוּף, וַיֶּחֱרָב

« Il décréta contre la mer des joncs et elle se dessécha ».

 

Deux systèmes parallèles très différents apparemment.

 

Celui de Rabi Eliezer qui est un système péjoratif pour Israël : le chemin pour les fatiguer, le désert pour les épurer, et la mer pour les éprouver.

 

L’explication de Rabi Yéhoshoua est laudative : le chemin pour recevoir la Torah, le désert pour être dans cette situation exceptionnelle de l’abri du problème économique, le niveau de l’homme vraiment homme qui peut se consacrer aux taches humaines et non plus aux taches de survies biologiques. La manne est reliée au Shabat : le problème économique est supprimé de telle sorte que nous puissions être homme, alors que le reste de la semaine nous descendons au niveau de l’animal qui doit se nourrir. Pendant Shabat nous sortons de ce problème et la capacité spirituelle de l’homme est délivrée…

La mer rouge pour leur faire des miracles et non pour les éprouver. Les hébraïsants remarquent que c’est le même mot en hébreu. Lénasot. Mettre à l’épreuve et faire des miracles (nissim).

 

Nous sommes aidés par l’analyse précédente : l’un donne l’explication à priori et l’autre donne l’explication à postériori de rabbi Eliezer qui est à un tout autre niveau de valeurs, qui représente un apprentissage dur, mais dont l’objectif est de restituer à Israël ce niveau d’identité qu’il n’a pas encore.

 

Deuxième manière d’expliquer : l’explication de Rabi Eliezer va pour la partie du peuple qui en avait besoin, et l’explication de Rabi Yehoshoua va pour la partie du peuple qui n’en n’avait pas besoin.

 

Enseignement du Maharal :

 

« L’explication de cela est que l’homme a d’abord des tendances corporelles (des instincts au niveau du nefesh) et des tendances psychiques (au niveau du roua’h) et des tendances intellectuelles (au niveau de la capacité de connaitre). Et Hashem Itbarakh a décidé de les fatiguer dans le désert pour les améliorer dans leurs corps. (Une sorte d’ascèse physique du corps pour qu’ils soient plus aptes à être Israël.)

 

Maharal reviendra là-dessus dans plusieurs enseignements : pour pouvoir donner la possibilité à la capacité spirituelle de l’homme de se développer il faut fatiguer, restreindre les tendances corporelles. Cette partie du peuple est encore trop centrée au niveau matériel. Pour les rendre aptes à la vie spirituelle, il faut les faire passer par le chemin du désert. Ils y apprendront que l’essentiel est la vie de l’esprit et non la vie du corps… On le voit chez les bédouins du désert qui ont une vie matérielle très frugale et une capacité spirituelle plus grande… Le contact avec la civilisation occidentale, dont Israël d’ailleurs, est en train de les dénaturer. J’espère qu’il y aura une réaction de retour aux sources chez eux, parce qu’un monde sans les bédouins, ce serait dommage. Ils ne sont pas d’origine arabe. Ce sont des européens, en particulier de Roumanie, il y a trois siècles à peu près, qui sont venus par foi chrétienne s’installer dans les déserts du Sinaï et qui ont été islamisés par la suite.

C’est cette nécessité de passer par cette expérience de la vie de voyage et d’amoindrir les exigences du corps pour devenir plus disponibles aux valeurs qui sont grosso-modo difficilement accessibles pour les sédentaires.

 

Maharal le dit en clair :

 

Et Hashem Itbarakh coulait les fatiguer en chemin pour amoindrir la force agressive de leurs exigences corporelles (à laquelle ils s’étaient habituer en Egypte). Parce que ce qui fatigue le corps c’est le mouvement, et Hashem itbarakh a voulu affaiblir le corps en chemin pour le soumettre. Et lorsque le corps est soumis les tendances à la jouissance se vident du corps. (Le voyage dans le but d’une ascèse corporelle) Ce voyage se fait dans le désert pour épurer les forces psychiques qui elles sont sensibles à la peu et à la crainte (le voyage pour améliorer le corps et la vie dans le désert pour épurer le nefesh par l’inquiétude et le rendre capable de résister à l‘angoisse). Et c’est ainsi que la force psychique est épurée. Les tendances psychiques s’adoucissent.    

 

Ce sont des yissourim, avec le caractère pénible de l’épreuve, mais qui sont nécessaires à trois niveaux selon le midrash dans l’explication du Maharal, parce que l’homme est un faisceau de tendances corporelles matérielles et biologiques, psychiques et émotives et spirituelles, intellectuelles et de l’ordre de la connaissance. A ces trois niveaux il y avait la nécessité de passer par ce creuset.

 

Et sur la mer rouge pour mettre à l‘épreuve leur force intellectuelle (la capacité de connaissance, la conception du monde) pour savoir s’ils avaient la capacité de foi en Hashem itbarakh capable de sauver l’homme de ses ennemis.

 

Cela se rattache au problème de la louange de Dieu. Il y a beaucoup de sources dans la guémara. Comment l’homme peut-il dire la louange de Dieu ? Est-ce une entreprise possible pour l’homme ?

Maïmonide a beaucoup étudié ce problème dans le chapitre du Moreh Nevoukhin sur le chapitre des « attributs négatifs ». Dire que Dieu est grand, est-ce que cela veut dire qu’il soit possible qu’il ne le soit pas ? On voit bien l’impossibilité de cette entreprise de dire la louange de Dieu ! Avoir foi, cela signifie avoir confiance qu’une promesse de Dieu peut s’accomplir. Dieu en particulier fait la promesse qu’Israël serait sauvé de ses ennemis. Mais où est le mérite d’une telle foi après la promesse divine ?

 

Par exemple la foi d’Abraham fut la confiance que la promesse qu’il aurait une enfant s’accomplirait. Toute la foi d’Israël est basée sur cet épisode de la foi d’Abraham ! Où est le mérite d’une telle foi ?

Il y a un verset qui est mal lu lorsque l’ange se révèle à Abraham. Dieu demande à Abraham pourquoi elle a ri. Et il dit :

18.14

יד הֲיִפָּלֵא מֵיְהוָה, דָּבָר; לַמּוֹעֵד אָשׁוּב אֵלֶיךָ, כָּעֵת חַיָּה--וּלְשָׂרָה בֵן.

14 Est-il une chose trop merveilleuse pour Hashem ? Au temps fixé, à pareille époque, je te visiterai et Sara sera mère".

Le midrash nous fait lire le verset tout à fait autrement dans une mentalité hébraïque :

Il n’y a rien d’impossible pour Dieu cela va de soi ! Sinon de quel Dieu parle-t-on !

En vérité il faut lire : est-ce que Dieu a besoin de te faire un miracle pour te donner un enfant ?

Attends-tu un miracle alors que je t’ai promis !

Crois-tu que j’ai besoin d’un miracle pour accomplir ma promesse ?

Alors où est le mérite de la foi d’Avraham ?

Nus revenons à la mutation religieuse au temps d’Avraham. Nous sommes dans un monothéisme total, absolu et cohérent. Le Dieu d’Israël est le même que le Dieu des ennemis d’Israël. Il n’y en a pas deux. C’est pour cela que c’est difficile. Dieu qui agit pour Israël doit agir contre Lui-même lorsqu’il est le Dieu des ennemis d’Israël. On n’est pas dans la situation simpliste du pluralisme de divinités, chacune s’occupant de son peuple. Ce serait le plus fort qui l’emporterait. Mais dans le monothéisme c’est le même Dieu qui est providence de tous les peuples, et c’est là que réside la difficulté.

Pour en revenir à la louange divine :

Dire de Dieu qu’il est grand ou fort cela veut dire qu’Il est le seul capable d’être plus grand ou fort que Lui-même. C’est une véritable louange.

 

Le mérite d’Israël de cette foi en Dieu capable de les sauver de leurs ennemis les Egyptiens au moment du passage de la mer rouge acculés entre la mer et l’armée égyptienne : c’est la même difficulté du même Dieu qui dirige l’histoire d’Egypte et l’histoire d’Israël. Pour avoir une telle option de foi il faut avoir fait le pari de la foi absolue. La foi en ce Dieu capable de sauver ses enfants hébreux contre ses enfants égyptiens. Et cela dépasse toutes les stratégies envisageables. Et Dieu leur dit qu’ils n’ont qu’à avancer…

 

On étudie ce problème en particulier dans la lutte entre Jacob et l’ange. Jacob en conflit avec Esaü est en conflit avec Dieu pour Esaü.

 

A Pessa’h on ne dit pas le Hallel complet pendant les six derniers jours à cause de la mort des égyptiens. Comme si on prenait le deuil pour la mort des premiers-nés égyptiens. C’est une liturgie typiquement juive. On ne trouverait pas une telle mentalité dans une liturgie des goyim !

 

Après le passage de la mer rouge, après avoir été sauvé miraculeusement, avec le prix à payer de la mort des égyptiens (cela aurait pu se passer autrement, mais leur mort est pour une affaire qui les concerne personnellement), le problème pour Israël est d’être sauvé de l’Egypte et non pas que l’Egypte soit perdue. Mais l’Egypte étant perdue on prend le deuil de ses ennemis… cela fait partie de l’esprit juif.

 

Le midrash raconte que lorsque les Hébreux ont été sauvés au passage de la mer rouge, ils ont chanté. La fameuse Shirat HaYam : « Az yashir Mosheh… »: le chant de gloire du salut de ce temps-là de la menace de disparition.

La civilisation égyptienne a disparu et Israël en a été sauvé. L’accouchement a eu lieu et la marâtre est morte en couche, c’est son problème. Mais le midrash précise que les anges à ce moment-là ont également voulu chanter, et Dieu leur a interdit : « Mes créatures sont englouties dans la mer et vous voudriez chanter !? Taisez-vous ! »

Rav Kook interroge le midrash: et pourquoi ne pas faire taire les Hébreux en bas ?

Réponse : à la racine de l’identité égyptienne en tant que créature du Dieu unique en haut c’est qadosh, mais descendue en bas dans la réalité cette identité est devenue mauvaise. Les anges n’ont donc pas le droit de chanter quand l’Egypte en bas est détruite.

 

Ce qui est demandé ici ce n’est pas la destruction de l’Egypte mais le salut d’Israël.

La destruction de l’Egypte survient en raison des problèmes des Égyptiens avec le Dieu unique. C’est l’enjeu de la foi : croire que Dieu puisse s’engager contre Lui-même. C’est cela la gdoulah. Etre plus grand que soi-même.

 

Dans le shoresh de l’identité égyptienne c’est une des créatures du Dieu unique. En haut on ne peut pas y toucher, c’est l’Egypte comme elle aurait du être. Mais en bas on l’annule. En haut on ne peut pas y porter atteinte.  

Rav Kook a ajouté à propos du verset énigmatique concernant Amaleq :

« Tu effaceras le souvenir d’Amaleq, mita’hat hashamayim, de dessous les cieux ».

Cette expression indique peut-être ce même enseignement à propos d’Amaleq : sous le ciel on peut effacer, mais pas dans le ciel, même pour Amaleq?

 

Ce qu’il faut mettre en évidence – ce qui est admirable de la part de l’âme juive qui se traduit dans ce midrash – c’est cette relation avec autrui lorsqu’il est l’ennemi irréductible. Dans une espèce de générosité vraie qu’on ne trouve pas ailleurs. Ces midrashim sont uniques et exceptionnels en ce sens.

 

Il faut faire attention que c’est au niveau de la vie spirituelle, mais au niveau de la vie réelle c’est dangereux. Ce qu’on appelle le ‘hassid shoteh. Celui qui conclurait de ces prémisses à partir de cette donnée spirituelle pour le niveau de la vie politique se mettrait en danger par générosité excessive. L’ami en haut est l’ennemi en bas. C’est là qu’est le piège qui mène au suicide.

 

Cf. le dialogue d’Avraham avec Hashem pour sauver les pires méchants de l’histoire.

Il reçoit une leçon de la part de Dieu : c’est bien ainsi qu’il faut croire mais ce n’est pas ainsi qu’il faut faire.

La ‘hassidout d’Abraham sans la vertu de justice pour la compléter est dévastatrice car Abraham protège les criminels. C’est la définition de la ‘hassidout, la charité, qui consiste à protéger les criminels. Mais cette vertu est dangereuse si on la laisse seule et qu’on lui donne le pouvoir politique. C’est une vertu authentique au niveau spirituel. Mais il ne faut pas leur donner le pouvoir.

 

L’amour d’autrui doit pouvoir s’étendre aux ennemis, mais en cas de conflit et de guerre, ce sont d’autres vertus et d’autres forces d’Israël qui doivent être employées, et non pas celles de la ‘hassidout. Ce serait un suicide… .../... 

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 16:07

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse) 1981

Cours 2

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_2

Durée : 42,2 minutes - Face B - 149-02

 

Je vous résume très brièvement ce que nous avons vu hier :

Le texte de l’Exode, en particulier au chapitre 13, la parashah de Beshala’h, impute au Pharaon le fait que le peuple d’Israël soit sorti d’Egypte :

Vayehi Béshala’h Paro Et Ha-âm

 

A partir de cette question nous avons vu la réponde donnée par le midrash : en vérité, il s’agit d’une partie du peuple qui, n’ayant pas l’initiative de sortir d’Egypte par elle-même, a été contrainte de le faire par le Pharaon.

Vous comprenez pare vous-même du point de vue de l’identification des événements à quelle tendance dans l’histoire de la société d’Israël cela correspond chaque fois que ces mêmes péripéties se retrouvent dans l’histoire.

 

A partir de ces premières remarques nous avons vu que le midrash élargit beaucoup plus ce problème d’une catégorisation des différentes parties du peuple d’Israël selon un schéma de l’enseignement de la kabalah : dans l’âme individuelle de chaque personne en général, il y a différentes fonctions, et cela se retrouve dans une identité collective à l’échelle d’un peuple.

Et par conséquent, ce n’est pas simplement une division en deux parties, ceux qui auraient pris l’initiative de sortir d’Egypte et ceux qui auraient été contraints de sortir d’Egypte, mais en réalité quatre groupes différents qui sont en réalité cinq.

Chaque fois qu’une péripétie importante des événements constitutifs de l’identité d’Israël apparait, tout se passe comme si ce schéma joue et apparait cette dispersion en différentes réactions.

Là-dessus se sont greffés des questions que nous retrouverons à propos des différentes analyses.

 

A partir de ce premier schéma introductif apparait le problème du vocabulaire : les niveaux inférieurs de cette identité sont dénommés par le terme « âm » qui signifie « peuple », et les niveaux supérieurs sont dénommés par le terme « Bnei Israël ». le terme de « Bnei Israël » désigne à proprement parler les Hébreux descendants des patriarches se trouvant dans l’exil d’Egypte, et le terme de « âm » renvoie de façon plus générale à ce que le texte appelle d’autre part le Erev Rav à propos du veau d’or, ou de Assafsouf (un ramassis, une multitude, une foule) à propos de la réclamation de viande dans le désert.  

 

On a vu la nécessité au moment de la sortie d’Egypte, d’inclure et d’introduire dans l’identité d’Israël tous ces hommes provenant d’autres peuples asservis au même esclavage, et qui ont vécu cette expérience à l’échelle individuelle de cette dialectique galout-géoula, asservissement-délivrance. C’est une expérience existentielle qui constitue la foi d’Israël ce qui explique pourquoi Moïse prend l’initiative de les intégrer.

 

Il y a quelque chose de fondamental et de nécessaire : Israël ne pouvait sortir d’Egypte qu’avec le Erev Rav.

 

L’histoire d’Israël est mystérieuse à travers tous les temps, y compris contemporains. Les historiens, sociologues et anthropologues préoccupés de ce problème rencontrent les manifestations historiques, humaines et sociales et politiques du peuple d’Israël en général comme un véritable mystère qui ne rentre dans aucune catégorie cohérente des lois qui régissent les sociétés. Nous allons partir de cette remarque, vous avez tous plus ou moins expérimenté cela.

 

Ceci dit, nous avons l’enseignement de la Torah à ce propos.

 

Le principe que nous choisissons dans ces études c’est le principe du midrash mis en forme par Rabi Yehoudah HaLévi dans le Kouzari, et surtout développé par le Maharal qui nous sert de référence.  

Je voudrais vous l’expliquer très simplement : On ne peut pas comprendre ce que le texte nous dit des événements du commencement de cette même identité si on n’est pas capable de l’identifier dans l’existence. Mais inversement, on ne peut pas l’identifier dans l’existence, et cela veut dire dans le temps contemporain à chaque fois, si on ne comprend pas ce que le texte a dit. L’un éclaire l’autre. Le texte éclaire la situation historique que nous vivons, mais c’est l’expérience de cette situation historique qui fait comprendre le texte, et réciproquement. Vous comprenez très bien qu’il y a un cercle vicieux qui ne peut être brisé que par l’enseignement de la tradition qui nous aide à identifier de quoi il s’agit.

 

Un exemple :

Une des questions fondamentales à propos de la faute du veau d’or : 40 jours après l’événement de la révélation du Sinaï où le peuple entier assiste à la révélation du Dieu dont parle la Bible qui donne la Torah, se produit une scène d’idolâtrie !? C’est incompréhensible.

Ou pour notre sujet : Comment se fait-il, 7 jours après la sortie d’Egypte où ce peuple a expérience de la Providence divine pour lui et qu’il se retrouve bloqué entre la mer rouge et l’armée égyptienne, qu’il soit sujet à la panique ?

C’est mystérieux et étrange à première vue.

Ce n’est que l’identification patiente et persévérante du sens des événements qui nous fait comprendre et le texte et la réalité.

 

Il est bien évident que cela ne peut pas être reconstitué par l’imagination ou la raison.

Des événements historiques dans leur signification ne peuvent pas être réinventés pour être compris. Nous avons besoin d’une mémoire, et c’est l’objet de l’enseignement traditionnel de communiquer cette mémoire qui permet l’identification et donc la lecture du texte et réciproquement, à l’aide de la lecture et l’identification des événements.

 

**

 

Nous avons en hébreu la racine ayin-reish-beit qui a plusieurs significations. Pour ceux d’entre vous qui connaissent l’arabe, vous savez qu’il y a trois ayin différents dans les langues sémitiques.

Les significations en hébreu sont récapitulées sur la racine ayin-reish-beit comme s’il s’agissait toujours du même ayin, mais en réalité la différence de sens vient de ce qu’il y avait primitivement dans la langue fondamentale des racines différentes en fonction de la prononciation différente du ayin. Vous voyez qu’on a besoin d’une mémoire pour éclairer ces problèmes. Le sens fondamental c’est l’idée de mélange ârov. Idée que l’on retrouve ici dans l’expression êrev rav.

Et puis le mot êrev qui signifie le crépuscule du soir.

Le crépuscule du matin se dit boqer. De la racine Lébaqer : distinguer. Le matin c’est le temps où l’on commence à distinguer les formes à la fin de la nuit. Le soir c’est le temps où les formes commencent à se mélanger. A ce mot de soir se rattache le ôrev qui est le corbeau, l’oiseau du soir. Et c’est vraiment un autre âyin.

Un autre sens qui est le doux. Par exemple, qol ârev – une voix douce. Mais c’est un doux particulier, ce n’est pas sucré. C’est la douceur qui vient du mélange des choses contrastées. Cela se rattache toujours à la même idée. Par exemple,  un autre mot pour dire le doux : naïm qui est à une toute autre consonance que ârev.

Un autre sens qui est celui d’un gage. Etre gage de quelqu'un d’autre. Êravon un gage.

Mais là je ne sais pas quel est le lien. Il faut que je cherche.

 

Mais enfin le sens fondamental du êrev rav, ce n’est pas le grand soir comme diraient les marxistes, mais c’est le grand mélange.

L’hébreu est de la racine ayin-beit-reish.  

C’est donc une approximation brouillée de l’identité hébraïque.

Si on a le temps en fin de séminaire je vous rappellerais les différents sens de cette racine là de l’identité de l’être hébreu. Avec l’idée de passage et de l’embryon, et puis ce que nous allons voir avec le passage de la mer.

 

***

 

Je relis le premier verset de notre parashah.

Sur la base de trois mots du verset, le midrash intervient explique le détour que le peuple va faire sous la conduite de Moïse alors qu’il pouvait entrer directement par le chemin de la côte, dénommé « derekh eretz pelishtim ».

Il va y avoir un détour avec comme première étape le passage par la mer rouge, et puis deuxième étape l’événement de la promulgation de la Torah au Sinaï.

 

La question qui se pose à nous dès la lecture du verset : pourquoi était-il nécessaire de faire ce détour ?

Quelle est la motivation donnée par la Torah pour faire ce détour.

Je vous rappelle brièvement la conclusion à laquelle on est arrivé hier : alors qu’on s’attendait à ce que la Torah nous enseigne explicitement la nécessité de passer par le Sinaï pour recevoir la Torah on ne trouve aucune raison à cela et c’est une toute autre raison qui nous est donnée.

 

La raison nous est apparue comme une sorte d’impréparation, de vulnérabilité du peuple au moment de la sortie d’Egypte qui a fait que dans sa plus grande partie le peuple aurait renoncé à continuer l’aventure de la sortie du monde ancien de l’exil pour le monde nouveau d’Eretz Israël et retourner dans la situation antérieure.  

 

C’est précisément parce qu’il y a eu cette impréparation que le don de la Torah dans le désert est devenu nécessaire. Sinon la Torah aurait été donnée à Tsion et non pas au Sinaï. Puisque le verset nous dit clairement : « KiMiTsion Tetsé Torah ».

 

Je vous donne une opinion de Judah Halévi concernant le Sinaï. Et c’est un problème contemporain, on voit que l’histoire hésite. Elle a hésité plusieurs fois. Il y a eu plusieurs campagnes du Sinaï et chaque fois il y a un phénomène d’aller-retour pour avoir à qui cela appartiendra d’Israël ou de l’Egypte. L’histoire hésite encore, le problème n’est pas fini. C’est comme si l’histoire commente la Torah !

La majorité des poskim, les décisionnaires, indiquent que le Sinaï ne fait pas partie d’Eretz Israël. Il y a des discussions pour savoir où est la frontière exacte. C’est un autre problème. Mais certains décisionnaires, dont Judah Halévi, font du Sinaï une partie d’Eretz Israël, à cause de ce verset : KiMitsion Tetsé Torah. Et puisque la Torah a été donnée au Sinaï, c’est que le Sinaï fait partie de Tsion ! Ce n’est pas l’opinion retenue par la majorité des poskim, mais nous attendons toujours la décision de l’histoire… Finalement, on verra dans les années qui viennent quel sera le psak de l’histoire. C’est un autre problème, et je referme la parenthèse.

 

Le principe que nous allons retenir pour mieux comprendre la dialectique qui apparait dans ces midrashim : la différence entre apriori et a posteriori. A priori, il n’était pas nécessaire de passer par le Sinaï. Mais puisqu’il y a  des raisons qui ont rendu nécessaire ce détour alors à postériori nous sont enseignées les raisons importantes pour recevoir la Torah au Sinaï. C’est toute la structure du livre de Shemot qui est en question dans ce problème. A partir de cette question simple : quel était l’objectif de la sortie d’Egypte ?

Aller au Sinaï recevoir la Torah pour aller ensuite n’importe où la pratiquer même en Eretz Israël accompagné par le messie… C’est une thèse que je ne partage pas qui est très répandue, en particulier en France. C’est la thèse officielle du judaïsme religieux de la diaspora. Sortis d’Egypte pour recevoir la Torah et ensuite être juif à Chicago ou à Brooklin ou Johannesburg… Et pourquoi pas, à Jérusalem ?

 

La thèse qui me parait plus évidente et normale suit le récit de la Torah. Il faut relire la Bible. L’objectif de la sortie d’Egypte était d’aller en Eretz Israël. Incapables d’y parvenir directement, nous avons du faire un stage d’apprentissage dans le désert pour y recevoir la Torah. Avant d’être sage il faut être apprentissage…

 

Je ne sais pas si la schématisation de ces deux thèses vous étonne mais il y a entre les deux une incompatibilité totale. D’un point de vue théorique en tout cas. D’un point de vue existentiel, chacun est toujours partagé entre les deux thèses. Mais c’est le cas des générations de transition. Un tri se fera à la longue, et il risque d’apparaitre un schisme radical entre les tenants de ces deux thèses différentes. Or, c’est précisément cette hésitation d’identité que la Torah nous raconte dans notre texte.

 

Le début de la parashah de Vaéra  au chapitre 6, verset 2 : il y a un texte très clair qui explique clairement l’objectif de la sortie d’Egypte. Quitter le monde ancien de l’exil, traverser le désert entre l’être ancien et l’être nouveau, pour arriver à l’être nouveau d’Eretz Israël, sans aucune allusion à la nécessité de passer au Sinaï pour y recevoir la Torah !

C’est donc à postériori que cela est devenu nécessaire. Parce que toute une partie du peuple, dans ses trois premiers niveaux dénommés « âm », n’est pas assez forte pour cette sortie qui lui est imposée absolument, pour ce qui concerne la première partie du peuple : « Vayhi Beshala’h Paro Et Haâm ». C’est Paro qui les a forcés, dans une expulsion. Shilou’him signifie le divorce, l’expulsion. La deuxième partie est sortie d’elle-même mais veut revenir à la première difficulté rencontrée. La troisième partie pense qu’il s’agit d’une guerre perdue d’avance mais décide de mourir dans l’honneur… Jusque-là il y a encore une incapacité.

La quatrième partie envisage la prière. Mais c’est un manque de foi de croire qu’il faut prier pour obtenir ce que Dieu a promis. Cela parait paradoxal mais on étudiera cela plus en détail.

Et la cinquième partie décide après la sortie de continuer d’avancer…

 

Il y a là-dessus beaucoup de midrashim qui comparent tous ces problèmes à une naissance. Un enfant dans le sein de sa mère. La question se pose de savoir s’il naitra ou pas. Avec ce courage nécessaire pour naitre. A partir du moment où déjà la tête est sortie et il a commencé à naitre faut-il revenir dans le sein maternel ou avoir le courage de sortir…

On peut imaginer cette panique de l’enfant s’il avait conscience au moment de la naissance, et cet affolement de savoir dans quel monde il va entrer… il pourrait avoir ces différentes réactions, dont celle du souhait du retour dans le sein maternel égyptien…

 

Et Moïse va se heurter à tous ces problèmes à la fois.   

 

Q : tous les enfants de Jacob étaient descendus en Egypte, personne n’était en Israël…

R : oui c’était la galout totale.

Q : et il n’y avait donc aucun foyer permanent en Eretz Israël ?

R : sinon d’une promesse qu’on avait gardé dans la mémoire d’Israël. Et cela a été la situation de nos deux mille ans à nous à partir de la destruction du deuxième temple où la métropole a été détruite, et nous n’avions de référence à la métropole que sous la forme d’une promesse venue de la mémoire et qui impliquait une espérance pour l’avenir. C’est très analogue.

Q : …

R : il n’y avait pas d’hébreu en Eretz Israël pendant que la famille de Jacob était en Egypte, Mais si c’était le cas, ils auraient été beaucoup plus Israël que ceux qui ont été obligés de passer le stage du Sinaï, parce qu’ils n’en auraient pas eu besoin. A priori on n’en avait pas besoin. Mais à postériori ce passage était nécessaire. Un camp de vacances de 40 ans dans le désert avec Mosheh rabénou pour apprendre la Torah. 

Mais à priori l’histoire avait un tout autre sens. Mettre fin à la phase embryonnaire de l’Egypte pour naitre au monde de la promesse. Mais il a fallu cet apprentissage à postériori.

 

Q : Il y a ce rapport à la terre qui n’est pas le lieu où l’on est né. L’Egypte est la terre où l’on est né en tant qu’esclaves.

R : Il faut recommencer à Abraham. Vous voyez à quel point nous avons besoin de la mémoire. On oublie qu’Abraham était en exil en Mésopotamie et qu’il avait dans sa mémoire la terre d’Israël qui était l’héritage de Shem. Voilà à quel principe cela se rattache. C’est pourquoi quand Dieu lui donne rendez-vous sur la terre qu’Il lui montera, sans lui indiquer, Abraham sait où il faut aller. Sinon le texte serait mystérieux. Abraham sait où aller, car il se rappelle où est la terre des Hébreux, comme le dira Joseph par la suite aux princes égyptiens. Et la terre des Hébreux est celle d’où la famille d’Abraham a été exilée en Mésopotamie.

Il faut retrouver cette donnée : Que fait Abraham l’hébreu en Mésopotamie ?

Il est en mission hébraïque d’exil dans la civilisation du temps. C’est le principe que je vous rappelle : chaque fois qu’il y a une civilisation en élaboration, Israël est en diaspora dans cette civilisation. D’où cette dialectique : le temps de gestation au sein de la civilisation du temps – et c’est le sens ôbar de îvri – nous sommes en gestation embryonnaire dans la civilisation du temps à chaque fois. Arrive le moment de l’accouchement, et c’est là que notre texte intervient pour nous expliquer les difficultés.

 

Le schéma général – que nous avions étudié, Michel Prince et moi, lorsque nous avons fait un séminaire sur ‘Hanoukah – c’est que l’histoire du monde va traverser quatre grandes civilisations, quatre empires, auxquels correspondent quatre exils d’Israël. Trois à l’extérieur, et un à l’intérieur du pays. Il y a d’abord eu la civilisation de Babel dont Abraham sort tout seul. Ensuite, l’exil d’Egypte qui est comme une civilisation annexe de la civilisation de Babel, et dont sort Israël sous la direction de Moïse. Ensuite, la grande civilisation Perse de laquelle sort Israël, Shivat Tsion avec Ezra et Néhémie pour fonder le deuxième royaume de Juda. Ensuite, la grande civilisation grecque avec le cas particulier de l’exil d’Israël sur sa propre terre au temps de la civilisation grecque, exil dont nous sortons avec les Makabi et Matatyahou. Ensuite, la civilisation romaine dont nous sortons actuellement. Et c’est la dernière sortie d’exil dans le schéma des prophètes d’Israël. Je n’ai pas dis que nous étions sortis de la civilisation romaine avec Herzl mais j’aurais pu le dire…

 

A l’origine, Abraham est effectivement un homme de la terre d’Israël en mission d’exil en Mésopotamie.

 

Notre histoire commémorée ne commence pas à la sortie d’Abraham d’Our-Kasdim mais à la sortie d’Egypte pour au moins deux raisons fondamentales. D’abord parce que la sortie d’Abraham d’Our-Kasdim est irréversible. Elle a réussie et n’a plus à être commémorée. Il n’y a pas de place pour la commémoration d’un événement qui est complètement intégré au niveau de l’identité. Nous ne trouvons pas dans le calendrier une référence à la sortie d’Abraham d’Our-Kasdim, ce qui aurait pu être l’événement de référence par excellence puisque tout commence avec Abraham ! Dans une religion mythique, l’histoire d’Abraham aurait été le mythe fondateur. Mais nous ne sommes pas une religion mythique, nous sommes une histoire.

Cela nous mène à la deuxième raison : Abraham était un homme unique ! Alors que sort d’Egypte une nation entière. C’est l’identité collective d’Israël qui commence à la sortie d’Egypte, et c’est pourquoi c’est notre commencement absolu. Et cela se relie à la première raison comme vous le comprenez parce que c’est pour évacuer ce qu’on pourrait appeler de façon plate « le culte de la personnalité ».

La sortie d’Egypte est un point de départ irréversible mais inachevé. Et nous avons à le commémorer, c'est-à-dire à le réaliser de plus en plus. Mais en tant qu’événement collectif, il est irréversible mais inachevé. C’est pourquoi il nous est raconté et donné à commémorer. La commémoration ne consiste pas simplement à se rappeler d’un événement passé, mais de commémorer un événement passé comme promesse d’un futur. C’est tout le problème du zekher…

 

Q : En quoi l’exil de Babel d’Abraham est-il terminé ?

R : La mutation de l’identité humaine opérée à travers Abraham est radicalement irréversible. On quitte le temps de la religion naturelle pour accéder à la religion monothéiste. Je vous dis des mots très formels, simplement pour indiquer la mutation radicale. Jusqu’à Abraham, la religiosité humaine est une religiosité naturelle de reconnaissance des déterminismes naturels comme forces divines. C’est la religion païenne qui possède sa propre ferveur, mais c’est une religion sans espérance. On ne trouve pas ce qui fait l’essentiel de la foi qui commence avec Abraham : l’espérance du salut. La piété consistait à s’asservir aux conditionnements naturels. Et toutes ces religions qui ont eu leur grandeur de ferveur, et qui restent incompréhensibles par les modernes, ont toutes un mythe astrologique à la base. C’est cette prise de conscience que le monde est soumis à un processus de fonctionnement cosmique qui serait la traduction de la divinité. La divinité c’est les lois de la nature. Les modernes ont tellement laïcisé ce principe qu’ils ont totalement évacué la ferveur spirituelle qui existait chez les païens. Au fond, le matérialisme contemporain c’est la même chose que la mentalité païenne mais avec en moins l’épaisseur énorme de ferveur spirituelle et de poésie que les païens possédaient, et que les philosophes matérialistes ont perdu. Mais c’est la même idée. Je vous donne l’exemple de certaines catégories : la vie humaine est soumise à des déterminismes matérialistes. On pourrait l’illustrer par énormément de textes.

Par exemple, lorsque le Pharaon commence à rêver, et qu’il ressemble presqu’à un hébreu en rêvant, il rêve le dérèglement des lois qui président à l’économie égyptienne. Aucun des sages de l’Egypte ne peut lui expliquer son rêve parce que l’idée du dérèglement des déterminismes, fussent-ils économiques, est étranger à la mentalité païenne. Pharaon apparait presqu’hébreu, et Joseph conclut au mariage possible avec cette civilisation pour l’hébraïser. Il se trompe, mais il y avait de quoi se tromper. Joseph en bon hébreu parvient à expliquer ce rêve parce que pour l’hébreu cela va de soi qu’il y a une volonté libre qui peut faire éclater les conditionnements déterminés. C’est le choc de deux mentalités : l’une qui est celle d’une religion matérialiste dialectique pour laquelle l’idée d’un détraquement de l’économie est impensable. Les faits se trompent contre l’idéologie qui ne peut pas se tromper. Et on cherche immédiatement les coupables (les Juifs). C’est une mentalité orthodoxe dans le sens étymologique du terme. Alors qu’un enfant hébreu peut expliquer ce rêve très facilement. Le midrash indique les explications données par les sages égyptiens qui sont des explications de type matérialiste historique. Alors que cette idée d’un facteur d’indifférenciation d’une volonté libre puisse intervenir dans le fonctionnement du monde cela commence avec Abraham. Et c’est la foi des Hébreux. Avec Abraham s’opère une mutation religieuse radicale. Jusque là c’est la religion naturelle, et à partir d’Abraham c’est la religion dont parle la Bible : au-delà du fonctionnement des lois de la nature il y a la volonté libre du Créateur de ce monde fonctionnant selon les lois de la nature. Et seul l’hébreu est relié à ce Dieu-là. Tous les autres sont reliés aux divinités naturelles. Ce qui n’est pas rien. Ce sont les modernes qui sont incapables de diagnostiquer de ce dont parlaient les païens lorsqu’ils parlaient de leurs Dieux au pluriel…   

 

Je vous donne un exemple qui m’avait beaucoup frappé lorsque j’étudiais au lycée en classe de 6ème. On étudiait les peuples de l’antiquité. On étudiait les Égyptiens les Aztèques, les Grecs… et les Hébreux. J’allais au Talmud Torah en même temps, donc les Hébreux je connaissais… On a eu une composition sur les Hébreux.

J’ai vu que si les historiens étaient capables de dire de telles erreurs sur les Hébreux, cela devait être le cas pour les autres peuples contemporains des Hébreux.

En particulier les Grecs. On nous les présentait comme des géants dans tous les domaines sauf celui de la vie spirituelle !? Je suis donc arrivé à la conclusion que les modernes étaient incapables de comprendre la spiritualité des anciens. Ils comprennent seulement ce qu’il en reste comme traces de civilisation matérielle. Mais l’âme grecque leur était complètement hermétique. Jusqu’au jour où Freud s’est levé et a donné une analyse d’un des mythes grecs. Et subitement le monde étonné s’aperçoit que ces mythes soi-disant infantiles contiennent de la sagesse.

 

Les modernes ont perdu cette expérience de ce que pouvait être cette religiosité d’avant Abraham et qui a continué longtemps encore jusqu’à la disparition. Mais cette relation à la divinité naturelle cela continue à être vivant en Afrique, en Asie et en Amérique du sud. Mais un moderne rationalisé par le latin c’est complètement aberrant et n’entre dans aucune cohérence intellectuelle.

L’idée qu’il puisse y avoir une relation entre les phénomènes du monde extérieur et ce qui se passe dans la conscience intérieure de l’homme est une idée aberrante pour l’occidental alors que c’est un des fondements de la sagesse pour l’oriental.

 

La sortie d’Abraham d’Our-Kasdim est un commencement absolu irréversible et réussi achevé qui n’a plus à être commémoré. Nous sommes les Hébreux depuis Abraham ! Cette identité hébraïque existait avant, mais était clandestine. Elle sort et émerge avec Abraham. C’est irréversible.

Nous avons eu des précurseurs d’Abraham, les héros de la foi en leurs temps. Mais la mutation avec Abraham les renvoie à la préhistoire. C’est au niveau d’Abraham que la mutation radicale se produit.

 

La sortie d’Egypte est une mutation très importante mais qui est en cours de travail. Avec Abraham sort un homme et sa famille tandis que de l’Egypte sort un peuple entier. L’interpellation au niveau d’un peuple est considérablement plus difficile que l’interpellation au niveau d’une personne. Et toutes ces raisons jouent à la fois. Nous attendons la dernière Pâques comme diraient les chrétiens qui ont cru qu’elle était arrivée il y a deux milles ans. Nous attendons la dernière commémoration de la sortie d’Egypte qui sera la mutation messianique. C'est-à-dire que le processus commencé avec la sortie d’Egypte aura été intégré et achevé, et cette libération aura définitivement réussi, elle n’aura plus à être commémoré, on s’en rappellera mais on ne devra plus la commémorer. On sera passé à un stade ultérieur.

 

Pour une partie du peuple d’Israël c’est le cas aujourd’hui : cette histoire commencée avec la sortie d’Egypte et qui s’appelle la galout, s’achève de nos jours.   

 

Faire la preuve de l’identité d’Israël selon la volonté du Créateur à l’échelle d’un peuple est une tache surhumaine, considérablement plus difficile que toute autre stratégie possible à l’échelle d’individus ou d’églises qui seraient les saints, ou les justes de l’humanité. Mais à l’échelle d’un peuple ou d’une nation, avec ces fendeurs de bois et ces porteurs d’eau comme le dit la Torah pour faire la preuve que tous participent de cette identité d’Israël, c’est le défi ultime que la Torah nous donne et qui est difficile.

C’est là la preuve à l’échelle de l’universel. Alors que dans une église ou une confrérie sainte – fut-ce celle d’une confrérie de ‘hassidim – c’est à l’échelle des élites. Mais le Créateur cherche la sainteté à l’échelle d’un peuple et non pas celle d’une communauté. C’est la formule chrétienne. Et quand la synagogue commence à imiter l’église c’est l’échec. D’ailleurs on n’y arrive pas, parce que nous n’avons pas la même histoire ni le même projet d’identité ni la même interpellation.

 

…/…

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 15:56

Moral et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse)

1981

 

COURS 2

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_2

Durée : 44,5 minutes - Face A - 149-01

 

La Neshamah est constitué des 5 niveaux :

Nefesh – Roua’h – Neshamah – Hayah – Ye’hidah.

 

La première difficulté c’est qu’un des niveaux de la neshamah s’appelle neshamah. Mais c’est tout l’ensemble qui constitue les cinq niveaux d’identité de la neshamah.

La neshamah, que l’on traduit par âme en français, c’est le sujet que chaque personne est tel que Dieu l’a créé et qui se trouve insérée dans la vie du monde à travers le corps.

Nous avons là deux réalités radicalement différentes : l’âme et le corps. L’âme c’est le quelqu'un de chacun, qui est incarné dans le monde à travers le corps.

Deux mots apparaissent : gouf - le corps, et neshamah - l’âme.

Gouf - le corps, c’est déjà un être animé, d’où le mot étymologiquement parlant, de « animal », au sens non de bête mais de « être animé, être vivant ». Le gouf dont nous parlons n’est pas un cadavre mais un être vivant qui va devenir le véhicule d’une neshamah. Et le résultat de cette synthèse, si j’ose dire, entre la neshamah et le gouf, s’appelle premièrement un nefesh.

 

Le mot de nefesh va ainsi désigner la personne de chacun (chaque un), mais au niveau le plus inférieur, au niveau des tendances des instincts des conduites de la vie purement corporelle. C’est la neshamah qui se trouve dans le nefesh mais au niveau le plus inférieur.

Plus haut, le niveau supérieur de la neshamah qui s’appelle roua’h et qui n’est déjà plus la vie instinctive, mais c’est déjà la vie spirituelle. Et dans la catégorie hébraïque, cette vie spirituelle commence par la vie affective. La conscience d’être quelqu'un apparait déjà au niveau du nefesh mais à une échelle très collective : tous les hommes sont des individus de l’espèce humaine. Et chaque personne est donc premièrement un individu de l’espèce humaine. Et cela fonctionne de manière analogue via la psychologie ou l’anthropologie et d’autres sciences (cf. la neurophysiologie) qui nous aident à comprendre comment la neshamah devient nefesh au niveau de la vie corporelle. C’est le monde des tendances des instincts. Roua’h c’est déjà supérieur, le monde de la vie spirituelle. Neshamah c’est un niveau encore supérieur, le monde de la vie intellectuelle. Et puis ‘Hayah, c’est le monde où la conscience est la conscience des valeurs, au-delà des idées. C’est si vous voulez le niveau de la sagesse plus haut que l’intelligence de la vie intellectuelle à proprement parler. C’est déjà la vie morale. 

   

Il y a apparemment un paradoxe de la vie intellectuelle (neshamah) qui est supérieure à la vie spirituelle (roua’h), mais c’est parce que la vie spirituelle du roua’h c’est encore le monde des émotions. Et même les émotions les plus subtiles et les plus sublimes sont entre la vie instinctive et la vie intellectuelle.

 

Et plus haut, ‘Hayah c’est ce qui fait la vie de la vie,‘Hayah, la « vivante », c’est ce qui fait la vie de la vie. C’est la conscience des valeurs, c’est à ce niveau là qu’est la sagesse.

Et Yé’hidah c’est le mystère de l’individuation de chacun, l’infini que chaque personne est et qu’elle est la seule à être. Ye’hidah signifie « l’unique », le niveau où chaque personne est unique, c'est-à-dire « uniquement elle-même ».

 

Pour comprendre l’ensemble : C’est ce qui fait que les valeurs sont des valeurs, que l’on peut comprendre au niveau des idées, que l’on peut vivre au niveau de la vie spirituelle, et que l’on peut agir au niveau de la vie corporelle.

 

L’effort que nous devons faire est d’identifier ces manières de la conduite humaine au niveau d’une société, avec ces forces de la yéhid’ah, de la ‘hayah et de la neshamah, du roua’h, du nefesh… avec une espèce de spécialisation par vocation des fonctions de chaque personne à l’échelle collective de la société. Et lorsque l’occurrence historique de la confrontation à l’expérience de la foi survient, la réaction des différentes couches de la société se trouve être différente.

 

Q : Et le situation du langage ?

R : Il apparait avec le nefesh. Il y a deux niveaux de nefesh. Le nefesh bahamit le nefesh animal, ce qui ne signifie par une bête mais ce qui est animé. Les instincts de l’espèce en chaque individu. Et le deuxième niveau qu’on appelle le nefesh shemit. Ce même nefesh tel qu’il est spécifié pour chaque individu. Premièrement nous sommes tous humains, et la nature humaine fonctionne de la même manière au niveau du nefesh bahamit. Et deuxièmement au niveau de la vie instinctive elle-même, chacun d’entre nous a son équation personnelle qu’on appelle le nefesh shémit.      

 

Au fur et à mesure que l’on monte dans ces niveaux de la neshamah, la spécification l’individuation de chacun s’affine, ou se dévoile, de façon de plus en plus grande.

 

Le deuxième principe c’est que chacun de ces niveaux contient les cinq autres. C'est-à-dire que vous avez ces niveaux à chaque étage :

Le nefesh du nefesh, le roua’h du nefesh, la neshamah du nefesh, la ‘hayah du nefesh, la yéhidah du nefesh…

On voit que la vie morale peut déjà apparaitre au niveau du nefesh avec le niveau de ‘hayah du nefesh. Mais elle est pleinement elle-même au niveau de ‘hayah à proprement parler. 

Il en résulte que chaque néshamah a 25 niveaux.

Et le sens général de la destinée de chacun est d’acquérir en tant que créature le mérite d’être à chacun des niveaux. C’est une ascension du mérite d’être de niveau en niveau.

C’est l’allusion que l’on retrouve chaque fois qu’une promesse est donnée à l’homme, elle commence par le mot « Koh – ainsi » de guématria 25.

« Koh Tevarekhou LeBnei Israel - Ainsi vous bénirez les enfants d’Israël ».

« Koh Tomar LeBeit Yaaqov – Ainsi tu parles à la maison de Jacob ».

C’est chaque nous l’allusion à ces 5x5 niveaux.

 

Troisième principe :

Au fur et à mesure de l’ascension dans le mérite d’être, le gouf qui est le véhicule de la personne de chacun incarne plus de neshamah.

Il n’y a pas équivalence entre les individus et leurs situations en tant que personne.

Il y a inégalité totale entre les individus par rapport à l’acquis de leur personne. C’est suivant la capacité de mérite d’être de chacun que le gouf, véhicule terrestre corporel de l’insertion dans le monde de chaque neshamah peut inclure plus de niveau de la neshamah.

 

Il en résulte que chacun se trouve dans une situation particulière de sa propre histoire personnelle. Et pour certains c’est le niveau nefesh, pour d’autres le niveau roua’h ou neshamah…

 

C’est un schéma formel mais en réalité il y a infinité de niveaux. Pour chaque conduite, il y a confrontation avec l’épreuve du mérite d’être si ce niveau est incarné. Et le niveau ultime est au-delà. Après 25, il y a 26, valeur du nom divin.

 

Ce schéma éclaire notre midrash de la Mekhilta puisque ce schéma est valable pour la destinée individuelle de chacun comme pour toute entité collective, peuple ou nation.

Par conséquent, lorsqu’un événement historique total de confrontation de la manière d’être homme que représente chaque peuple arrive, alors les différents niveaux de l’être de cette entité collective réagissent à chacun des niveaux.

 

Je reprends la question posée précédemment : il y aurait un mécanisme aveugle et impersonnel et fatal dans le cas d’une abdication de la volonté. Cela fonctionnerait ainsi, et inévitablement lorsque l’événement arrive dans l’histoire l’unité du peuple éclate dans ces quatre niveaux qui sont cinq. Mais s’il y a assomption de la liberté, ceci est maitrisé et dépassé. C’est une dialectique entre liberté et conditionnement que nous retrouverons dans une autre analyse ultérieure.

 

Voilà donc la signification de ces correspondances.

Dans les trois niveaux premiers, l’ensemble Israël s’appelle âm le peuple.

L’étymologie du mot âm se rattache au mot îm qui veut dire « ceux qui sont ensembles ». Îm, avec, le fait d’être l’un avec l’autre. 

Ce n’est qu’au 4èmeet 5èmeniveau que l’identité de la personnalité de la personne du groupe dont on parle apparait dans sa personne même, et non plus dans un agrégat, une somme d’individus qui s’appelle Âm, c’est pourquoi le nom de Bnei Israël apparait dans le texte.

D’un point de vue formel, ces thèmes du midrash se retrouvent dans la structure même récit biblique. Ce n’est pas par hasard que le récit utilise ces appellations de Âm au trois premiers niveaux et de Bnei Israël au 4èmeet 5èmeniveaux. On voit les différents niveaux de libération des conditionnements psychiques, instinctifs, sociopolitiques, la libération d’esclaves pour arriver au 5èmeniveau du verset 14.8 :

וּבְנֵי יִשְׂרָאֵל, יֹצְאִים בְּיָד רָמָה

ouvnei Israël Yotsim BeYad Ramah 

« et les enfants d’Israël Bnei Israël sortaient avec une main élevée »

Complètement libérés au-delà de tout conditionnement.

Principe corollaire : Il est bien évident que tant que l’unité et la synthèse de ces différentes forces nécessaires à la présence de chaque neshamah dans le monde de la nature et des conditionnements naturels, et que ces forces ne sont pas rendues compatibles, organisées, unifiées à la limite, elles luttent entre elles.

Le nefesh ne voit pas plus loin que le nefesh, le roua’h ne voit pas plus loin que le roua’h…

Et donc il y a une lutte du nefesh contre le roua’h et une lutte du roua’h contre la neshamah qui est en lutte contre la ‘hayah… etc. tant que l’unité n’est pas réalisée. C’est vrai à l’échelle de la synthèse personnelle comme à l’échelle de la synthèse sociale.

 

Vous voyez ainsi à travers quelle structure le récit formule ce qu’il a à nous dire. Devant le même événement de la sortie d’Egypte et de l’impasse devant la mer rouge se produisent quatre réactions différentes qui sont cinq au niveau ultime avec les nominations qui changent.   

 

Pour comprendre la logique de la signification de l’histoire d’Israël comme entité humaine, il faut la comprendre à travers la signification d’une destinée individuelle. Dans cette comparaison entre un individu une personne unique et d’autre part un peuple dans on ensemble, et les différents étages de l’expression de cette identité à chaque péripétie.

Ce n’est que lorsque l’unité de l’ensemble apparait qu’il y a cohérence.

Tant que cette unité n’est pas construite, alors il y a conflit des différentes tendances.

 

Q : Au niveau de la famille le dialogue parfois difficile car chacun appartient à un niveau différent ?

R : Nous sommes dans un temps de la destinée humaine où il y a un état de chaos. Tout est simultané et mélangé. Au temps de la prophétie, de la révélation, on pouvait s’identifier. Chacun savait qui il était. Cf. la formule de Socrate : « connais-toi toi-même ». Chacun sait qui il est et à quel niveau il se situe, avec une possibilité d’harmonie beaucoup plus offerte. Mais nous sommes dans un temps qu’on appelle Olam HaTohou. Un temps de pêle-mêle, un temps de chaos. On le remarque aussi dans les études de la Torah où tous les niveaux sont donnés à la fois. Comment entrer dans la connaissance que la Torah nous donne ? Alors que la Torah a une structure par niveaux et par problèmes, mais tout est donné en simultané, en état de chaos. N’importe quel étudiant de Torah, même dans les écoles organisées, se trouve confronté à cet univers qui met tous les niveaux sur le même plan. Il faut énormément de temps pour arriver à organiser une constellation cohérente des niveaux de connaissance. C’est Olam HaTohou. De même dans la génération et dans la société, des personnes de niveaux de mérite d’être très différents sont mis ensembles simultanément.

Un jour le monde sortira de cet état de chaos pour entrer dans un monde d’harmonie cohérent. D’après beaucoup des traditions anciennes ce qu’on appelle « le temps du verseau » où la connaissance sera cohérente. Mais pour le moment nous sommes toujours à la fin du temps des poissons.

 

Q :  inaudible

R : à l’échelle individuelle, il y avait une sorte de figure de prou, une réussite de l’identité d’Israël qui sert de modèle ou de « guide ». A l’échelle individuelle, il y avait un Israël réalisé en individu. C’était Moïse et sa famille. « Mosheh rabénou shakoul keneged kol Israël koulo ».

Je pense que cela peut s’expliquer par ce principe là de cette simultanéité de tous les niveaux, et il y a chaos.

A l’intérieur de cet ensemble en chaos, il y a quand même le milieu privilégié des talmidei ‘hakhamim où il y a un accord, un sous-entendu, où cette hiérarchie prend sa valeur. Mais c’est une sorte de connivence, c’est nistar. Mais dans le niglei c’est un monde chaotique, où tout est au même niveau de façon simultanée, alors que dans le monde de l’esprit la notion d’égalité n’a pas sa place. En hébreu le mot égal se dit shavé qui ressemble beaucoup au mot shave avec alef qui signifie vain. Le raisonnement est très simple : si deux choses sont égales absolument, il y en a une de trop. En réalité, rien n’est égal. Cela est d’autant plus vrai dans le monde du nefesh. Aucun nefesh n’est au même niveau. Cela nous renvoie donc à un monde caché où les choses sont en ordre, mais un ordre théorique, un ordre de principe. Dans la réalité extérieure, c’est la continuation d’un monde de chaos qu’on appelle Olam HaTohou.

En particulier, on voit, c’est un problème de notre temps, pourquoi la communication est difficile : parce qu’on n’a pas de langage commun étant donné que chaque parole est à un niveau différent. C’est l’obstacle auquel se heurte la communication à proprement parler. On est obligé d’employer des implications de sens conventionnels à un niveau de discours de dictionnaire, avec des implications de significations qui peuvent être communs à tous ces niveaux différents, et c’est très formel. Alors que la connaissance à proprement parler est renvoyée à ce monde du nistar où chaque chose est à sa place et où on comprend exactement de quoi on parle. (La même réalité qui se trouve au niveau du nefesh de ‘hayah ne peut pas avoir le même sens que si elle se trouve au niveau ‘hayah du nefesh.)

 

Q : inaudible

R : De façon immédiate, l’expression Bnei Israël désigne les tribus d’Israël descendants de la famille de Yaaqov. Ceux qui avaient l’identité hébraïque par identité. Et donc entre le temps d’Abraham qui commence la sélection d’identité Israël et le temps de Moïse se trouve 6 générations d’éducation d’identité propre aux tribus d’Israël qui s’appelle les Bnei Israël. Or, le peuple sortant d’Egypte n’est pas seulement le peuple descendant des tribus d’Israël, c’est tout un peuple qui s’est adjoint à ses descendants des tribus d’Israël. Le chapitre 32 au verset 7 dans le contexte de la faute du veau d’or parle de ce Erev Rav : un grand mélange de populations qui est sorti d’Egypte en même temps que les tribus d’Israël et sur initiative de Moïse. Le mot de Âm est péjoratif. Alors que le mot Bnei Israël est la définition positive d’identité. Am est ce qui est venu avec.  La faute du veau d’or provient non pas des Bnei Israël mais de ce Âm.

32.7

וַיְדַבֵּר יְהוָה, אֶל-מֹשֶׁה:  לֶךְ-רֵד--כִּי שִׁחֵת עַמְּךָ, אֲשֶׁר הֶעֱלֵיתָ מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Vayedaber Adonay el-Moshe lekh-red ki shi’het amekha…

Et Hashem dit à Moïse : va, descend, car ton peuple a fauté…

 

Le principe qui apparait c’est que l’option de Moïse était que les Bnei Israël ne peuvent pas sortir d’Egypte s’il ne sort pas avec eux tous ces individus de quelques origines que ce soit des autres peuples qui ont eu la même expérience, et qui vont venir s’adjoindre à l’identité d’Israël. 

Il s’agit de l’expérience de la dialectique galout et géoula.

aliénation dans l’exil,

délivrance.

Ce sont là les deux dimensions de définition de la foi d’Israël.

Pour le dire avec un verset éminent :

« Anokhi Hashem Eloheikha Asher Lotse Ti'kha Mérets Mitsraïm”

Quel est l’objet de la foi en Dieu dans l’identité hébraïque ? C’est que la géoula est possible, c’est que la délivrance des conditionnements est possible, c’est que la libération du déterminisme est possible. C’est une foi utopique pour la pensée naturelle. Cette utopie commence avec Abraham. Cela n’a rien à voir avec la définition théologique philosophique classique de la foi qui serait de croire que Dieu existe.

L’option de la émounah c’est le titre que la Torah se donne à elle-même : Qui te parle et te donne la loi ? Celui qui te fait sortir de l’esclavage !

 

Donc apparait ici une structure de l’histoire très schématique qui est premièrement l’aliénation aux conditionnements du monde et deuxièmement l’expérience de libération. Une dialectique en deux moments : galout et géoula.

Par conséquent, tous les hommes qui ont eu cette expérience là en Egypte, dans le principe, sont de l’identité d’Israël. Parce qu’ils sont eu cette expérience galout – géoula.

Ils ont demandé à Moïse de sortir avec Israël parce que dans le principe ils ont l’identité d’Israël. Par conséquent, Moïse régularise. En l’absence des six générations depuis Abraham jusqu’à Moïse, ils ont un handicap.

On ne pouvait pas les laisser en Egypte. Parce que si l’histoire d’Israël a un sens : vivre et témoigner de cette expérience  l’expérience galout-géoula, (Israël devait tout naturellement intégrer ce Erev Rav).

 

Dès que Moïse intègre ces hommes à l’intérieur de l’identité d’Israël ils deviennent Israël. Dans chaque Israël il y a ces niveaux-là de Âm et Bnei Israël… Il y a quand même une différence bien qu’il y ait une même destinée dans le principe et la finalité, parce que l’identité Israël a commencé ainsi avec Abraham, puisque les descendants des tribus avaient derrière eux six générations de tradition hébraïque. Et les autres sont donc handicapés. Mais la sortie d’Egypte ne pouvait pas se faire sans intégrer cet érev rav.

 

Tout se passe comme si Israël prend sur lui la destinée de l’universel humain à travers le érev rav, et c’est un pari, une option, un risque colossal, et commence son histoire avec cela.

C’est une sorte de résumé de toute l’identité humaine. Il me faudra expliquer qui se trouvait en Egypte et qui sort avec les tribus d’Israël pour former le peuple d’Israël : « Âm Bnei Israël », dans tous ces niveaux à la fois.

Et ce pari gigantesque a été pris par Moïse qui avait des raisons de savoir que si Israël n’emmenait pas avec lui le érev rav, il ne pouvait pas sortir d’Egypte. Parce que cela privait de sens la descente en exil et la géoula !

 

 

Dans cette situation égyptienne il n’y avait pas qu’Israël qui était en esclavage, tous les peuples de la civilisation de ce temps étaient des avadim, des asservis et aliénés de l’identité égyptienne. Il y aune espèce de convergence entre l’expérience individuelle de chaque individu de ce érev rav, et ceux qui étaient déjà au niveau de l’identité collective des Bnei Israël.

 

D’où vient la difficulté ?

 

Si l’intégration du érev rav s’était faite d’individu à individu, il n’y aurait pas eu le handicap, mais c’est une foule, assafsouf, un ensemble numériquement très grand à la fois qui entre dans l’identité collective d’Israël. C’est de là que vient le handicap.

 

D’ailleurs la halakha va retenir comme principe : quiconque a des raisons de dire, et donc de savoir, qu’il est en train d’expérimenter la vie d’Israël dans sa vie individuelle de goy et qui demande à s’adjoindre à l’identité d’Israël  est accepté. (Sous conditions précises d’authenticité). Mais si un groupe ou une entité collective demandait en bloc cette intégration c’est refusé. Parce cette intégration possible au niveau individuelle ne peut pas être faite au niveau collectif.

 

 

J’ai eu à m’occuper d’un cas de ce genre. Quatre tribus du Kenya et trois de Madagascar ont demandé la conversion collective et la aliah en Eretz Israël. La question a été étudiée pendant des années, et finalement il leur fut répondu qu’individuellement chacun pouvait s’intégrer à Israël, mais en tant qu’entité collective ce n’était pas possible. Cela dénaturerait l’identité d’Israël.

 

 

 

C’est là qu’est le handicap historique.

 

Nous voyons que Moïse a raison de les accueillir chacun pour lui-même, mais la catastrophe vient de ce qu’il fut obligé à cause du déroulement des événements de les accueillir en bloc.

 

 

 

On pourra étudier la question soujacente : pourquoi est-il absolument nécessaire pour que la fin de la galout de l’Egypte se réalise que le érev rav soit intégré.

 

 

En tout cas, et retenez bien le contexte du chapitre 32 au verset 7, cette expression « Am Qésheh Oref : peuple à la nuque raide » pour définir les Juifs en tant qu’ils sont du peuple d’Israël, c’est une calomnie ! Le texte emploie précisément cette expression pour définir le érev rav.

 

Mais à partir du moment où Israël a accepté le érev rav, alors il intègre en lui cette midah de rébellion, de nuque raide. Et il devient ce « Am Qésheh Oref ». 

 

Mais c’est parce qu’Israël a choisi de prendre sur soi la destinée universelle, avec tous les handicaps et les risques que cela représente. Israël se constitue comme identité et dès qu’il a constitué cette identité, il s’ouvre à un résumé de l’universel humain qui introduit en lui la mise à l’épreuve d’identité de tous les autres qui n’étaient pas de l’histoire d’Abraham. C’est cela le érev rav. Il en résulte qu’aujourd’hui, à part des exceptions que je ne précise pas pour éviter d’entrer dans les détails maintenant, aucun juif vivant ne peut savoir s’il est descendant d’hébreu ou du Érev rav.

 

Mais ce qui se décèle à l’échelle collective, et dans cette difficulté de cet état de chaos ou de pêle-mêle, où tout est au même niveau, c’est les tendances différentes dans la société d’Israël. Il y a des tendances érev rav, et des tendances Israël. Et toutes, ensembles, elles forment ce « Am Bnei Israël ». 

 

Il en résulte que dans chaque événement  crucial ces réactions se dévoilent.

 

Si Israël ne devait qu’atteindre son propre salut les six générations d’Abraham à Mosheh auraient suffit ! Mais au moment du salut d’Israël, Moïse prend une décision « messianique » si j’ose dire, il décide d’intégrer le érev rav. Alors tout est différé encore. Mais à une toute autre échelle de l’histoire qui a commencé au 1erhomme.

 

Parce que si vous comprenez bien, ce qui se passe au niveau du peuple d’Israël sortant d’Egypte est une sorte de faute originelle à l’échelle collective, en introduisant cette prise en charge de ce qui était advenue de l’humanité antérieure.

 

 

 

Maharal nous en donne un principe explicatif de manière très claire :

 

Moïse prend cette décision parce qu’il connaissait le sens de la destinée d’Israël au niveau historique, et parce que quiconque et quelque soit la manière dont cela est exprimé, dès qu’un homme fait cette expérience galout-géoula alors il est candidat aux dix commandements, à l’identité de la Torah.

 

Dans tous les cas c’est ainsi que ça a commencé avec Abraham.    

 

J’y reviendrais à partir de demain.

 

 

 

Q : inaudible

 

R : Dans l’entité collective de cette société d’Israël, il y a des fonctions différentes, et les trois niveaux-fonctions qui s’appellent âm viennent du érev rav. L’identité d’Israël n’apparait qu’à partir du 4èmeet du 5èmeniveau d’identité.

 

 

 

J’ajoute une explication :

 

Lorsque la faute du veau d’or a lieu, il y a deux catégories de responsabilité différentes : l’acte et l’initiative de la faute vient du érev rav, mais la culpabilité d’Israël réside dans son incapacité à l’empêcher. Il y a donc eu finalement une coresponsabilité. Ce qui est frappant, c’est que dans toutes notre histoire jusqu’aux temps messianiques, nous voyons que quelque soit le problème qui divise le peuple Israël c’est grosso-modo toujours divisé en deux. Cet équilibre des deux forces contraires 50-50 est toujours là quelque soit les problèmes d’identité auxquels Israël est confronté.

 

 

 

Nous étudierons ce verset où ceux qui ont fait le veau d’or disent à Israël :

 

« Eleh Eloheikha Israël Asher…

 

« Voici tes dieux Israël qui nous ont faits monter du pays d’Egypte »

 

Qui s’adresse à Israël pour lui dire « Voici tes dieux Israël », c’est bien évidemment le érev rav !

 

Mais il n’y a pas de doute qu’il y a une co-responsabilité.

 

Dans le résultat, fin de chapitre 32, c’est l’entité collective qui introduit en elle cette midah de « âm qésheh oref ».

 

 

 

Nous étudierons ce passage du veau d’or.

 

Et l’explication du Maharal sur les midrashim concernant le passage de la mer rouge.

 

Les quatre réactions et la cinquième à l’événement.    

 

…/…

 

 

 

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 15:54

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse)

1981

 

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_1

Durée : 43,3 minutes - Face B – 148-03

 

 

13.17

וַיְהִי, בְּשַׁלַּח פַּרְעֹה אֶת-הָעָם, וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא:  כִּי אָמַר אֱלֹהִים, פֶּן-יִנָּחֵם הָעָם בִּרְאֹתָם מִלְחָמָה--וְשָׁבוּ מִצְרָיְמָה

Et il arriva lorsque Pharaon renvoya HaAm le peuple, Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche, car avait dit Elohim : de peur que HaAm le peuple ne regrette en voyant (l’éventualité de) la guerre et ne retourne en direction de l’Egypte.

13.18

וַיַּסֵּב אֱלֹהִים אֶת-הָעָם דֶּרֶךְ הַמִּדְבָּר, יַם-סוּף; וַחֲמֻשִׁים עָלוּ בְנֵי-יִשְׂרָאֵל, מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et Dieu fit contourner HaAm le peuple par le chemin du désert de la mer rouge Yam Souf

Et c’est armés en guerre que Bnei Israël les enfants d’Israël sont montés d’Egypte.

 

On trouve 3 occurrences du terme HaAm, et une seule occurrence du terme Bnei Israël. Cela fait quatre et nous allons voir la correspondance de cette structure avec les quatre niveaux de l’identité d’Israël tels qu’ils sont indiqués dans le midrash. Trois sont appelés HaAm et la quatrième est appelée Bnei Israël. Ensuite le cinquième niveau est indiqué un peu plus loin dans le récit.

 

14.8

וַיְחַזֵּק יְהוָה, אֶת-לֵב פַּרְעֹה מֶלֶךְ מִצְרַיִם, וַיִּרְדֹּף, אַחֲרֵי בְּנֵי יִשְׂרָאֵל; וּבְנֵי יִשְׂרָאֵל, יֹצְאִים בְּיָד רָמָה

Et Hashem endurcit le cœur de Pharaon roi d’Egypte, Il alla après les enfants d’Israël (Bnei Israël) et les enfants d’Israël (Bnei Israël) sortaient avec une main élevée... 

 

C’est la cinquième mention Bnei Israël.

La structure révèle une structure en cinq niveaux :

HaAm – HaAm - HaAm - Bnei Israël - Bnei Israël.

D’un point de vue formel, il apparait que le peuple d’Israël à la sortie d’Egypte est bien évidemment une unité, seulement il y a différents niveaux d’identité.

 

Quelle est la différence lorsque le mot employé est le mot Am ou le mot Bnei Israël ?

Pour répondre il faut passer par un schéma de la kaballah expliquant les différents niveaux de la neshamah qui font apparaitre la même structure:

Nefesh – Roua’h – Neshamah – ‘Hayah – Ye’hidah.

Nous retrouvons-là dans cette structure au niveau de l’être collectif du peuple la même structure formelle de niveau d’identité à l’échelle individuelle.

 

Cet enseignement vient du Péri Tsadiq, le Rav Tsadoq HaKohen MiLoublin, qui a écrit un commentaire sur le ‘houmash inspiré de l’enseignement de la kaballah du Ari, et qui met en évidence la structure de ces cinq niveaux de l’âme humaine à l’échelle individuelle dans l’identité collective du peuple. Par conséquent, cela signifie que dans cet ensemble un du peuple Israël sortant d’Egypte apparaissent les différents niveaux d’identité correspondant aux différentes réactions décrites dans la Mekhilta.

 

L’étude d’aujourd’hui va s’attacher à lire ces versets pour comprendre la signification de ces différentes réactions.

 

13.17

וַיְהִי, בְּשַׁלַּח פַּרְעֹה אֶת-הָעָם, וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא:  כִּי אָמַר אֱלֹהִים, פֶּן-יִנָּחֵם הָעָם בִּרְאֹתָם מִלְחָמָה--וְשָׁבוּ מִצְרָיְמָה

Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche car Elohim s’était dit de peur que le peuple ne regrette en voyant (l’éventualité de) la guerre et ne retourne en direction de l’Egypte.

 

1er étonnement : dans tous les récits précédents la Torah veut nous faire comprendre que c’est Dieu Lui-même qui intervient pour sauver le peuple Israël de l’esclavage d’Egypte. En particulier avec le récit des dix plaies. L’étonnement est ici massif : comment s’exprime le texte de la Torah dans notre verset : Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple !

 

Tout se passe comme si ce n’est pas Dieu qui est intervenu pour délivrer Israël mais c’est le Pharaon qui va prendre l’initiative de renvoyer le peuple !?

Pourquoi la Torah a-t-elle préféré une formulation négative ?

 

J’ouvre une parenthèse pour éclairer cette manière de répondre en citant un midrash à propos de Pourim: Dans Méguilat Ester le nom de Dieu n’apparait pas. La réponse classique c’est qu’étant donné que la Méguila  était destinée à être traduite dans toutes les langues des provinces de l’empire d’Assuérus on voulait éviter la traduction du nom Havayeh en différentes notions idolâtres. Réponse véridique mais insuffisante car le même risque existe pour tous les livres de la Bible. Il y a d’autres raisons. En particulier, on peut relier cela à l’atmosphère de clandestinité dans laquelle l’identité juive de ce temps-là commence à rentrer. La Méguilat Ester montre cette stratégie de camouflage et de déguisement de l’identité juive par rapport à l’identité hébraïque. D’une certaine manière, un juif c’est un hébreu déguisé. C’est là que l’histoire de la grande diaspora commence avec le temps de Mardochée et Esther, des Juifs déguisés en perses. L’atmosphère est celle d’un empire extrêmement libéral. Les premiers versets montrent l’autonomie de chaque province où chaque peuple garde sa culture, sa langue et sa religion, et chacun des ministres d’Assuérus sont les différents princes qui gouvernent ces provinces… Avec le cas particulier des Juifs qui sont les seuls sans territoire correspondant dans l’empire. Cette situation décrit parfaitement l’identité juive de diaspora dès l’origine. On entre alors dans une atmosphère de clandestinité.  On n’ose pas exprimer son identité en tant qu’hébreu puisqu’on est entré dans une époque de l’histoire où il faut déguiser cette identité hébraïque dans l’identité juive qui, en ce temps-là, cherche à se justifier en temps que perse. Cela ne trompe pas Hamane et le parti au pouvoir des Amalécites qui dénoncent ce déguisement…

 

Un rite de la fête de Pourim dévoile cela : à Pourim on se déguise ! Et le déguisement traditionnel c’est de se déguiser en juif ! C’est pour dévoiler qu’en réalité cette identité juive n’est que l’identité hébraïque déguisée ! C’est une sorte de rite de purification de l’identité de l’origine par le déguisement. Dans les anciennes communautés traditionnelles se déguiser en juif c’était le déguisement classique de Pourim. Cette identité juive apparait dans les récits de la Bible dans le livre d’Esther, avec ce verset central :

3.5

Ish Yehoudi Hayah BeShoushane Habirah OuShmo Mordekhaï Ben Yaïr  Ben Shemini Ben Kish Ish Yemini : il y avait un homme juif dans la ville de Suse et son nom Mardochée fils de Yaïr…

Un homme judéen venant du royaume de Juda au temps de Yekhonia dernier roi de Juda au temps de la destruction du premier royaume de Juda, les Judéens sont déportés en exil dans la Mésopotamie, l’empire de Babel. A l’époque du récit de la Meguilat Ester cet empire de Babel a pour dynastie régnante une dynastie perse qui est celle d’Assuérus. Les derniers des Hébreux, les Judéens, se trouvent en situation d’exil dans l’empire perse. C’est là que le mot de « yéhoudi » qui étymologiquement signifie « judéen » va signifier « juif » dans le sens classique que nous connaissons depuis ce temps-là. C'est-à-dire depuis 2600 ans. C’est le commencement de l’identité d’une communauté de diaspora suite à la destruction de la métropole qui était le 1er royaume de Juda.

Après le temps du temple de Salomon, le bayit rishone, eut lieu un schisme. La nation d’Israël s’est divisée en deux. Le royaume du nord regroupait 9 tribus et demi autour de la tribu d’Ephraïm qui était la tribu dominante et le royaume su sud regroupait 2 tribus et demi : Juda, Benjamin et la moitié de la tribu de Ménaché. Yéhouda a désigné le royaume du sud parce que la tribu dominante était la tribu de Yéhouda.

 

On retrouve donc trois niveaux d’identité.

Judaïtes : les membres de la tribu de Juda.

Judéens : les membres du royaume de Juda dans l’exil dont l’appellation juif, juive est la corruption à travers le latin du mot de Judéen.

Yehoudi : Membre de la tribu de Juda.

Comme Juda a donné son identité dominante au royaume de Juda, tous les membres du royaume de Juda s’appellent Yéhoudi.

Et quand les Judéens ont été déportés l’histoire de la communauté commence. Et elle commence en Perse. Mais c’est peut-être de notre temps que cette histoire s’achève avec les événements de Perse, cette histoire commencée au temps de Mardochée et Esther s’arrête de notre temps…

 

Cette identité juive c’est l’identité hébraïque, mais déguisée dans l’identité de l’homme de diaspora en Perse. C'est-à-dire que c’est un hébreu déguisé en perse, mais sachant qu’il est déguisé, camouflé. D’où cette atmosphère de clandestinité qui apparait dans la lecture de la Méguila. On n’ose pas dire qui on est vraiment, on n’ose pas parler de son propre Dieu. On ne parle de Jérusalem que par allusion pour dire que c’est de là-bas que nous avons été exilés. Mais la capitale reste Suse…

 

C’est très exactement la situation sociopolitique du juif de diaspora contemporain. Une allusion à Jérusalem mais la capitale reste Londres, Paris, New-York… Cette attitude commence en Perse avec Mardochée et Esther. La tradition intervient alors en instituant le rite du déguisement à Pourim. Le juif déguisé en juif dévoile en réalité qu’il est un hébreu déguisé en juif… C’est de cela que Hamane va les accuser : « le déguisement ne sert à rien nous savons très bien qui vous êtes… »

 

Le verset dit :

3.5

Ish Yehoudi Hayah BeShoushane Habirah OuShmo Mordekhaï Ben Yaïr  Ben Shemini Ben Kish Ish Yemini

Un homme juif originaire du royaume de Juda se trouvait à Suse la capitale…

Ishsignifie une grande personnalité.

Ish Yémini : homme de la tribu de Benjamin.

Il est nommé Yéhoudi, non pas parce qu’il est membre de la tribu de Juda, mais parce qu’entretemps cela signifie juif, c'est-à-dire originaire du pays des Judéens, les derniers des Hébreux de l’histoire. Mais en quittant le pays d’Israël, la Judée de l’époque, ils ne sont plus hébreux mais juifs. Leur identité devient une identité mixte. Ils se présentent comme perses au même titre que les autres perses, avec le droit à la différence comme toutes les autres peuplades de cet empire libéral, mais le cas particulier des Juifs apparait.

 

L’exemple le plus frappant de notre temps est l’empire soviétique.

Avec au niveau théorique une constitution très libérale, mais qui rencontre le même problème de ce cas particulier d’Israël sans relation territoriale dans l’empire, et cela pose problème.

 

On peut même pousser la comparaison un peu plus loin. Dans l’empire perse, il y avait deux cas particuliers : le parti au pouvoir des Amalécites et la communauté juive. De la même manière en Russie on a la même structure aujourd’hui (1981), le parti au pouvoir des communistes et le peuple juif. Avec ce même conflit, quelque soit le caractère libéral indéniable théoriquement de la constitution officielle.

C’est exactement cette même histoire qui se produit depuis 2600 ans dans toutes les histoires des communautés de diaspora, quelque soit le style d’apparence extérieure. Et cette apparence extérieure c’est le déguisement de Pourim qui est dévoilé par un déguisement au second degré.

 

Le nom de Dieu n’apparait pas dans la Méguila, mais la tradition enseigne une allusion assez claire. Lorsque Mardochée explique la situation à Esther, de la catastrophe imminente, avec Hamane devenu premier ministre, ayant décidé de détruire la communauté juive, et Esther devenue reine, jusque là n’avait pas révélé son identité qui était restée dans la clandestinité absolue sur consigne de Mardochée. Survient la péripétie où on a besoin d’Esther qui devient le deus ex machina. Mordekhaï lui demande d’intercéder auprès du roi.  Et il ajoute que Dieu sait si ce n’est pas pour cela que tu es devenu la reine... Et Mordekhai ajoute : si ce n’est pas toi qui nous sauve le salut viendra « mimaqom a’her - d’un autre endroit » (Esther 4.14). Mais il ne faut pas oublier la fin du verset : « Et toi et la maison de ton père vous serez détruits ! »

Cela signifie que soit le salut vient par la reine Esther qui prend le courage de s’identifier comme telle pour sauver son peuple, soit le salut vient d’un autre endroit. Mais d’un endroit tel qu’Esther et sa maison seront détruites !

Or, nos savons que Mardochée et Esther faisaient partie d’une maison royale d’Israël. La royauté de Shaoul qui a précédé la royauté de David. Et l’héritage de la royauté de Shaoul c’est la famille de Mardochée. Esther était donc déjà reine d’Israël en tant que capacité de royauté.

 

Il y a un autre rite de Pourim, qui est l’épreuve du vin où l’on doit boire jusqu’au stade de confondre Mardochée et Hamane.

On se trompe souvent sur la Halakha croyant qu’il faut passer cette limite, mais c’est absolument interdit. L’épreuve du vin est jusqu’à la limite du risque du mélange entre le côté du bien Mardochée et le côté du mal Hamane, et non au-delà. L’épreuve est justement de s’arrêter à cette limite, c’est le plus difficile. Il ne s’agit pas de rouler sous la table. 

 

L’expression « maqom a’her - un autre endroit » pour désigner Dieu est difficile. Nous savons que le mot de maqom est employé pour désigner Dieu, mais le mot de a’her fait difficulté !
L’alternative est la suivante : soit le salut vient de la maison de Mardochée et d’Esther qui se mettent en danger (Mardochée lorsqu’il entend l’édit contre les Juifs prend le deuil dans la cour du roi, alors que c’était interdit par la loi royale pour les dignitaires du roi), soit le salut viendra de Hamane qui est ce « maqom a’her » ! Si c’est le cas, alors la maison d’Esther risque d’être détruite.

 

Soit le salut vient à l’initiative des Hébreux, et donc à visage découvert, soit le salut vient à l’initiative du Pharaon. Comme le dit notre texte :

 

13.17

וַיְהִי, בְּשַׁלַּח פַּרְעֹה אֶת-הָעָם

Vayhi… Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple !

 

Et cela arrive avec les catastrophes (Vayehi !)

On ne fait pas le lien avec la Shoah parce que cela nous prendrait trop de temps, mais voyez que c’est tout de même relié. Cela nous explique en tout cas la fin du verset de Meguilat Ester :

« Toi et la maison de ton père seront détruites ! »

 

Guémara Sanhédrine : à la fin des temps, Israël sera sauvé. Discussion entre R. Yehoshoua et R. Eliezer sur le retour avec ou sans repentir. « S’ils ne se repentent pas Je leur enverrai un roi plus méchant que Hamane, et ils se repentiront. »

On voit bien les deux stratégies.

Cela commence déjà lors de la sortie d’Egypte : soit ils répondent d’eux-mêmes à l’appel de Moïse, soit c’est avec la catastrophe lorsque le Pharaon doit renvoyer le peuple.

 

Je reviens à ma question d’exégèse précédente : il y avait le contraste entre les récits précédents où c’est Dieu qui intervenait et notre verset indiquant la sortie d’Egypte à l’initiative du Pharaon qui a renvoyé le peuple.

 

Cela répond à notre problème : il s’agit d’une partie du peuple, la plus inférieure au niveau du mérite de sa foi, qui n’est sorti que parce que Pharaon l’a renvoyé. Et c’est cette partie, le 1er HaAm,  que nous retrouvons dans la première catégorie citée par la Mékhilta : Tombons dans la mer !

 

Le peuple est ici désigné à différents exposants, à différents niveaux d’identité.

Ici le renvoi du peuple par Pharaon correspond à cette partie.

 

Deuxième partie :

13.17

וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא

Et Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche.

 

Avec la sortie d’Egypte, il y avait un chemin direct pour Eretz Israël par la côte avec 11 jours de marche d’après le récit biblique. Mais Dieu refuse ce chemin. La côte s’appelle Eretz Pelishtim, le pays des Philistins, une peuplade issue de Crête. Leur origine était d’ailleurs d’une région d’Asie mineure beaucoup plus haute et qui avait des comptoirs de colonie sur la côte méditerranéenne.  Aza, Ashkélone,… etc. Toute la bande côtière depuis l’Egypte jusqu’à Tel Aviv : Eretz Pelishtim.

Cela aurait été le chemin le plus proche.

 

13.17

וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא:  כִּי אָמַר אֱלֹהִים, פֶּן-יִנָּחֵם הָעָם בִּרְאֹתָם מִלְחָמָה--וְשָׁבוּ מִצְרָיְמָה

Et Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche car Dieu s’était dit de peur que le peuple ne regrette en voyant (l’éventualité de) la guerre et ne retourne en direction de l’Egypte.

 

C’est la deuxième catégorie.

La première est celle qui n’est sortie que parce que Pharaon les a renvoyés, expulsés et qui choisissent le suicide dans la mer.

La deuxième partie est celle qui est sortie d’elle-même, mais avec une faiblesse dans le courage et qui devant la difficulté préfère revenir en Egypte.

 

Cela pose un problème d’exégèse.

Aucune raison n’est donnée au passage au désert. Après la sortie d’Egypte, rien n’indique qu’il fallait passer au Sinaï pour recevoir la Torah ! 

Pourquoi ce passage au Sinaï ?

Parce que le peuple n’était pas suffisamment fort pour rentrer directement en Eretz Israël.

Cela correspond à la troisième partie :

 

13.18

וַיַּסֵּב אֱלֹהִים אֶת-הָעָם דֶּרֶךְ הַמִּדְבָּר, יַם-סוּף; וַחֲמֻשִׁים עָלוּ בְנֵי-יִשְׂרָאֵל, מֵאֶרֶץ מִצְרָיִם

Et Dieu fit contourner le peuple par le chemin du désert Yam Souf  et c’est armés en guerre que les enfants d’Israël sont montés d’Egypte

 

On s’attendrait avec le verset 11 à une toute autre motivation : finalement le peuple sorti d’Egypte n’est pas entré directement en Eretz Israël parce qu’il devait passer par le Sinaï pour recevoir la Torah, mais il n’y a aucune allusion à cela.

 

Il faut donc prendre le récit d’une autre manière : ce n’est qu’a postériori, avec les raisons que nous apprendrons, que le peuple devait passer par le Sinaï. Mais la raison essentielle était sa faiblesse dans la foi. Et la stratégie de la Providence se servira de cet événement pour donner la Torah au Sinaï. Mais à priori il fallait dès la sortie d’Egypte rentrer en Eretz Israël.

A cause de l’empêchement, il faut passer par le désert et donner rendez-vous au Sinaï pour la Torah.

C’est indiqué par l’expression « derekh hamidbar ».

 

Va’hamoushim : armés, prêts à faire la guerre

‘hamoush : décidé à.

La deuxième traduction du midrash : en rang par cinq. En formation de guerre.

Alors que les équipages des chars étaient « shalishim - par trois ».

Le midrash intervient en disant que ‘hamoushim signifie : un sur cinq.

Nous donnant le fameux problème de la proportion des 1/5ème et 4/5ème.

 

Q: Dieu avait dit à Moïse qu’il reviendrait le servir ici… ?

R: Oui, lors de la vision du buisson ardent lorsque Moïse demande un signe pour habiliter sa mission et qu’il redoute que les Hébreux ne le croient pas lorsqu’il annoncera le temps de la sortie d’Egypte. « Et Dieu lui dit : et voici le signe que c’est bien moi qui t’ai envoyé : lorsque tu feras sortir le peuple (haAm et non pas Bnei Israël) vous viendrez rendre un culte à Dieu sur cette montagne. »

Cela veut dire : « Si effectivement, tu te heurtes à un refus de la part du peuple HaAm, amène-les ici et J’habiliterais ta mission… » Mais c’est à postériori ! Il fallait d’abord que Moïse se débrouille à les faire sortir. Le signe dont Moïse avait besoin était d’abord en Egypte ! Tout se passe comme si Dieu avait dit à Moïse : « Si le peuple te suit, vous entrerez directement à Jérusalem ! S’il ne te suit pas amène-les ici sur la montagne ! » Et cela veut dire qu’ils ne sont pas encore capables d’arriver directement. Il leur faut un séminaire préparatoire avec Moïse au Sinaï. C’est la difficulté pour Moïse. Cela veut dire que la Torah n’est révélée au Sinaï qu’a postériori, de façon négative.  Parce que le peuple n’a pas mérité plus. Le verset de la révélation de la Torah est très clair : « KiMiTsion Tetsé Torah OuDvar Hashem MiYiroushalayim ». Et non pas au Sinaï !

Cela nous permet d’identifier des situations historiques permanentes, même contemporaines. 

On trouve les Juifs du Sinaï partout sauf en Eretz Israël, et les Juifs de Tsion en Eretz Israël !

C’est la différence d’identité qui apparait. C’est très important de voir cela.

Sur ce problème il y a deux attitudes :

L’attitude de ceux dont l’objectif de la sortie d’Egypte est d’aller au Sinaï recevoir la Torah et d’attendre le Messie qui les amènera à Jérusalem…

L’attitude de ceux dont l’objectif de la sortie d’Egypte est de monter en Eretz Israël. Devant l’impossibilité pour des raisons qui seront expliquées, il y a un détour par le stage au Sinaï pour y recevoir la Torah.

 

Q : Il semblerait que les archéologues aient découvert la présence de colonies égyptiennes en Eretz Israël et en Eretz Pelishtim ?

R : Il y a eu des guerres et contre-guerres, des occupations de territoires… etc.

 

Cette deuxième partie qui voit le risque de guerre et qui ne sont pas au niveau de la troisième catégorie qui est prêt à la guerre veut retourner en Egypte.

Dans le pays de Kénaan, il y avait des colonies égyptiennes. C’était des envahisseurs, mais les envahisseurs originaires c’était les Philistins. Le mot de Pelishtim vient de la racine Liflosh, occuper.

Madame Amado-Valensi a écrit que c’est significatif que les Palestiniens aient pris le même nom. Le mot de Palestine cela veut dire la Philistée. Voyez l’ironie du langage. L’identité palestinienne cela veut dire en hébreu l’identité des conquérants qui ne sont pas chez eux ! Ils sont tombés dans ce piège du langage.

 

D’une certaine manière, seules ces deux parties qui sont nommées Bnei-Israël pouvaient directement quitter l’Egypte et rentrer dans le pays. Il a fallu faire ce détour à cause des trois autres parties.

 

Nous étudierons par rapport à l’événement de la mer rouge la différence de réaction de ces différentes parties. Dieu refuse les stratégies des quatre premières parties, même celle de la quatrième partie qui est déjà nommée Bnei Israël avec la stratégie de la prière. C’est finalement la cinquième partie du verset 14.8.

 

14.8

וַיְחַזֵּק יְהוָה, אֶת-לֵב פַּרְעֹה מֶלֶךְ מִצְרַיִם, וַיִּרְדֹּף, אַחֲרֵי בְּנֵי יִשְׂרָאֵל; וּבְנֵי יִשְׂרָאֵל, יֹצְאִים בְּיָד רָמָה

 « Et Hashem endurcit le cœur de Pharaon roi d’Egypte, Il alla après les enfants d’Israël Bnei Israël et les enfants d’Israël Bnei Israël sortaient avec une main élevée... »

 

C’est de cette catégorie-là que fait partie Na’hshon Ben Aminadav qui comprend ce que Dieu dit à Moïse : « Parle aux Bnei Israël, et qu’ils avancent… ». Nous verrons ces midrashim qui indiquent qu’ils n’avaient rien d’autre à faire parce que toutes les autres stratégies sont impossibles. Une seule stratégie de survie possible : l’entrée dans la mer. Cet acte déclenche la fin de la civilisation égyptienne. Puisque toute la force de l’Egypte est engloutie dans la mer. Et le verset nous donne rendez-vous à la fin des temps.

 

C’est la grandeur du Maharal et de tout la lignée des commentateurs qui ont expliqué ces textes non seulement en éclairant ce qui est survenu dans le passé mais aussi en donnant la signification des thèmes d’identités pour nous prévenir de ce qu’est la structure de leurs histoires et des éventualités. C’est très frappant que nous retrouvions aujourd’hui, dans des styles différents, les mêmes attitudes, devant la difficulté de cette impasse, les quatre réactions. Et la cinquième qui récapitule les quatre autres.

 

Q :

R : Non, ce n’est pas une nécessité.

Si on abdique la liberté et on laisse les mécanismes jouer c’est comme cela que cela joue. C’est une sorte d’avertissement qui donne la structure des phénomènes lorsqu’ils fonctionnent impersonnellement. Lorsque la liberté individuelle abdique. Mais si la liberté individuelle joue cela fait reculer l’aspect de fatalité des événements.

Q : Mais maintenant il nous faudrait un Moïse !

R : C’est exactement ce que disait les Hébreux de la génération de la sortie d’Egypte parce qu’ils ne croyaient pas en Moïse ! Il a été contesté ! C’est nous qui savons qu’il était vrai.

S’il y a abdication de la volonté, alors on rentre dans un monde pessimiste où les mécanismes jouent et broient les personnes humaines. Mais la réponse en elle-même est optimiste. Il n’y a pas de fatalité. On  peut faire jouer la liberté. Mais le pessimisme revient dès qu’on ne s’en sert pas et qu’elle ne joue pas. Il semble bien alors qu’il y ait abdication de la liberté et que ces structures impersonnelles apparaissent inévitablement. 

On verra la réponse que donne Maïmonide, et pourquoi il faut d’une certaine manière y passer.

Mais pour l’instant nous restons au niveau de l’exégèse de l’histoire.  

 

La signification des différents niveaux de la neshamah, et la signification de HaAm le peuple, les trois niveaux d’identité inférieure à l’échelle de l’identité collective d’Israël déterminée par l’appellation Bnei Israël. .../...

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8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 15:45

Morale et Cataclysme Naturel

(Peri Tsadik Voyant de Lublin sur Genèse)

1981

 

COURS 1

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/morale_et_cataclysme_naturel/cours_1

Durée : 42,6 minutes Face A - 148-02

 

Le sujet central pour ce séminaire c’est les causes profondes du déluge, mais comme conséquence de ce qui s’installe dans l’histoire humaine à partir de Caïn et Abel.

Le thème de la vision catastrophique de l’histoire sera le sujet des autres conférences générales.

Le 3èmeséminaire en fin d’année sera consacré à un sujet plus optimiste, sous l’aspect des constructeurs et non pas des destructeurs, c’est ce qui apparait dans l’histoire humaine avec la figure d’Abraham. Ce sera un séminaire beaucoup plus large consacré à Abraham et je pense qu’on fera appel à des enseignants des autres traditions et pas seulement du judaïsme.

 

Pour les cours du matin, j’avais primitivement pensé faire des midrashim sur le déluge et finalement j’ai changé un peu de perspective, et j’ai choisi une série de midrashim et l’enseignement du Maharal sur le passage de la mer rouge. C’est-à-dire que c’est un exemple de situation catastrophique beaucoup plus restreinte apparemment mais qui est un peu du même ordre d’idée. On commencera à partir d’aujourd’hui par étudier le texte de la Bible sur le passage de la mer rouge, les midrashim de la Mekhilta מכילתא   avec le commentaire du Maharal, et en fin de séminaire on reviendra si nécessaire sur le problème du déluge à proprement parler.

 

Le sujet central en sera la relation entre le sens moral de l’histoire humaine et les cataclysmes naturels. On va avoir besoin d’un certain nombre de versets dans le chapitre 14 de l’Exode.

Lisez attentivement jusqu’au verset 8. Les Midrashim seront sur le verset 15.

Ceux qui ont ces livres chez eux, dans le commentaire du Malbim vous avez la Mekhilta ces textes du midrash que nous aurons à étudier. Vous les avez dans les textes du Maharal que l’on étudiera, mais ils ne sont pas cités exactement par le Maharal comme ils sont dans la source de la Mekhilta, et cela vaut la peine de les lire dans leur exacte formulation.

 

La Mékhilta est un recueil de midrashim sur l’Exode, dont le Maharal s’est servi comme base pour son commentaire sur ce problème du passage de la mer rouge.

Comme ce séminaire se situe finalement entre Pourim et Pessa’h j’ai jugé qu’il valait mieux parler de ce sujet que du déluge.

 

En guise d’introduction je vais commencer par vous expliquer le premier thème que nous allons étudier.

 

Nous avons un Midrash de la Mekhilta qui dit qu’au moment où le peuple Israël se trouvait confronté à cette situation de pessimisme absolu, la sortie d’Egypte a eu lieu. Mais le Pharaon s’est ravisé et envoya l’armée égyptienne. On se demande comme elle avait été rescapée des catastrophes des dix plaies d’Egypte, mais enfin, le Pharaon se ravise et envoie l’armée égyptienne à la poursuite du peuple qui venait à peine de sortir d’Egypte. Et nous verrons comment le texte de la Bible en Exode 13 présente le récit lui-même.

 

Le peuple d’Israël vient à peine d’être rescapé de toute cette longue histoire de l’exil d’Egypte, et après toutes les péripéties de la sortie d’Egypte à proprement parler, le peuple n’est plus sous la domination et l’esclavage et l’asservissement de la civilisation égyptienne de ce temps. Cet événement de la sortie d’Egypte est commémoré le 1er jour de Pessa’h. Ensuite, il se passe 7 jours, et le 7ème jour c’est l’événement du passage de la mer rouge.

 

Nous aurons à revenir sur ces définitions chaque fois que cela sera nécessaire, mais il y a là deux commémorations différentes de deux péripéties du même événement global, mais qui n’est pas à proprement parler le même événement : Yetsiat Mitsraïm la sortie d’Egypte et Qriat Yam Souf littéralement la déchirure de la mer rouge : le passage de la mer rouge.

 

C’est groupé dans la même fête de Pessa’h mais ce sont deux yamim tovim différents. Le premier jour c’est Pessa’h à proprement parler, le 7ème jour c’est une autre fête qui achève Pessa’h, deux niveaux différents du même phénomène de la délivrance au moment de la fin de cette grande civilisation qu’a été l’Egypte des Pharaons dans laquelle le peuple Israël était en dispersion et en fin de compte y fut asservi.

 

Après la sortie d’Egypte à proprement parler, la Torah nous raconte un revirement du Pharaon qui avait été impressionné et affolé en particulier par la dernière des dix plaies, la mort des premiers-nés. Il laisse ainsi partir le peuple Israël mais finalement il se ravise et il envoie l’armée égyptienne à la poursuite du peuple. Et le peuple d’Israël va donc se retrouver coincé entre un phénomène naturel qui fait obstacle, la mer, et un phénomène humain qui fait danger, l’armée égyptienne lancée à leur poursuite. Dans cette situation, nous dit le midrash cité par le Maharal, il y a eu quatre types de réactions différentes parmi le peuple.

 

Cette division de l’identité d’Israël en quatre niveaux, en quatre manières d’être, c’est un des thèmes centraux de tout le récit de la sortie d’Egypte, la Hagada de Pessa’h. En particulier, les quatre enfants, et les quatre manières d’interroger les événements. Retenez que ce sont quatre qui sont cinq, toujours. Nous verrons le problème des quatre verres de vin qui sont en réalité cinq en fin de séminaire.

 

Le midrash que je vais vous lire porte sur les versets de Beshala’h 14.13-14 :

Le peuple est pris d’inquiétude, inquiétude qui est formulée de quatre manières différentes :

 

14.13

יג וַיֹּאמֶר מֹשֶׁה אֶל-הָעָם, אַל-תִּירָאוּ--הִתְיַצְּבוּ וּרְאוּ אֶת-יְשׁוּעַת יְהוָה, אֲשֶׁר-יַעֲשֶׂה לָכֶם הַיּוֹם: כִּי, אֲשֶׁר רְאִיתֶם אֶת-מִצְרַיִם הַיּוֹם--לֹא תֹסִפוּ לִרְאֹתָם עוֹד, עַד-עוֹלָם.

Vayomer Mosheh El HaAm…

 13 Moïse dit au peuple: "Ne craignez pas, rassemblez-vous et voyez le salut de Hashem qu’il fera pour vous ce jour ! La manière dont vous avez vu l’Égypte aujourd'hui, vous ne continuerez plus de les voir encore ad olam jusqu’à la fin des temps.

14.14

  יד יְהוָה, יִלָּחֵם לָכֶם; וְאַתֶּם, תַּחֲרִשׁוּן.

Hashem guerroiera pour vous, et vous restez silencieux.

 

Ad Olam : Ad veut dire littéralement jusqu’à et Olam signifie le monde dans le sens temporel. Le monde dans le sens spatial n’existe pas dans l’hébreu biblique. Il aura ce sens beaucoup plus tardivement. La différence de sens c’est que le mot Olam, le monde, dans l’hébreu biblique, cela signifie le temps que dure un monde. Dans le vocabulaire de la théologie c’est un éon. La manière de distinguer ces deux mots Olam dans le sens temporel et Olam dans le sens spatial c’est d’observer le pluriel : le pluriel masculin Olamim est le pluriel de l’hébreu biblique Olam qui signifie le temps d’un monde. Le pluriel féminin Olamot se réfère au terme Olam de l’hébreu rabbinique, qui vient du grec, et qui signifie un monde dans le sens spatial.

 

Ad Olam : jusqu’à la fin du temps que durera ce monde. Olam Hazeh le monde présent, Olam Haba le monde qui vient. Nous avons donc une définition très précise du point de vue de la Halakha : le temps que dure un Olam c’est d’abord un jubilé. Chaque fois que nous avons un verset que la Halakha utilise pour un thème donné en disant « Ad Olam : jusqu’à la fin de ce monde », c’est jusqu’à la fin des 49 années, la 50ème étant pour le jubilé.  

 

C’est là le sens de base. Cela a été élargi à la notion de Olam Hazeh ce monde-ci, jusqu’aux temps messianiques. Le monde qui commence au premier homme jusqu’au fils de l’homme aux temps messianiques s’appelle ce monde-ci, Olam Hazeh. Et ensuite, le Olam Haba. Ce monde-ci cela veut dire le temps que dure le monde depuis le commencement de l’histoire humaine avec le premier homme jusqu’aux temps messianiques, c’est le Olam Hazeh. Olam Haba c’est le monde qui suivra. Cela a toujours été pensé en hébreu biblique dans la perspective temporelle : le temps que dure un monde. Cela n’a jamais eu un sens spatial.

 

Si nous reportons ce sens temporel à notre verset cela veut dire que les Hébreux lors de la sortie d’Egypte ont assisté à une scène où leur existence est en danger en raison de l’Egypte, et le texte dit : regardez bien cette situation, vous ne la reverrez plus Ad Olam, jusqu’à la fin de ce temps du monde. Comme s’il y avait là un rendez-vous pour un certain temps du monde où de nouveau cette situation apparaitrait. Tout se passe comme si ce rendez-vous était pour notre temps. Depuis la sortie d’Egypte jusqu’à notre temps, on ne s’était jamais retrouvé dans une telle situation où il y avait menace de destruction d’Israël par l’armée égyptienne. Tout se passe comme si nous sommes arrivés à ce temps de Ad Olam, à la fin du temps d’un monde.

 

Il faut bien comprendre ce problème d’exégèse du midrash : pourquoi la Torah a-t-elle jugé nécessaire de nous transmettre comme préface à la loi à proprement parler ce récit de l’histoire de la constitution de l’identité d’Israël à qui cette loi a été donnée ? Ce n’est pas seulement pour nous faire connaitre quelle a été la préface du passé, mais pour nous faire comprendre quelle est la structure de notre identité historique. Par conséquent, bien entendu, pendant des siècles il était important de savoir le sens de ce qui s’était passé parce que cela dévoile dans une certaine occurrence la structure d’identité propre à Israël. Nous allons en voir un exemple ici. Ces événements ne se retrouvent pas du tout dans les mêmes termes mais dans la même identité. Il y a là une indication extrêmement importante.

 

Cette expérience de la fin d’un temps d’exil et de la menace d’une catastrophe à ce moment-là, le texte nous prévient que cela se reproduira Ad Olam.

 

Et effectivement, nous les avons revus.

 

Il faut bien comprendre le sens de l’événement.

Je reviendrais d’ailleurs sur les implications théologiques de cette remarque. La base de la foi, la émounah, dans la tradition juive, c’est l’événement historique. Il faut donc être surtout sensible au caractère massif de l’événement. Pendant 3600 ans ce verset reste en l’air, et subitement il se concrétise de notre temps. On le voit ou on ne le voit pas, mais si on a des yeux on le voit !

 

Q : inaudible

R : cela veut dire d’après le sens du pshat que le temps commence à la sortie d’Egypte, et il y a une sorte de rendez-vous qui surviendra lorsque la même péripétie recommencera. Cela a recommencé durant la guerre du Sinaï et peut-être durant la guerre des six jours. On a de nouveau revu l’armée égyptienne comme menace de destruction pour Israël à la fin des temps d’exils.

Cela veut dire que ce temps du monde qu’exprime le terme Olam depuis la sortie d’Egypte jusqu’à la fin du temps d’exil s’achève de notre temps. Puisque le verset indique le signe dans l’événement : revoir l’armée égyptienne dans la même condition de menace contre Israël.

 

Le terme Olam en hébreu biblique n’a jamais signifié le monde dans le sens de cosmos, que recouvre l’expression biblique shamayim vaaretz les cieux et la terre. C’est un sens intégré tardivement dans l’hébreu rabbinique. Avec le pluriel Olamot. Par exemple, Olam HaBriah, Olam HaYetsirah… Mais les termes Olam, Olamim se rapportent toujours au temps que dure un monde, une époque, une ère.

Les traducteurs à travers les siècles ont choisi chacun des nuances de l’expression qui se révèlent finalement fausses : Ad Olam est souvent traduit à jamais. Cela veut dire sans fin, toujours… C’est donc un contresens dans notre verset.

 

Q : Olam Vaed ?

R : Cela veut dire tant que dure ce monde Olam, et Vaed encore après…

 

Dans toutes traductions on est passé inconsciemment et inévitablement du registre hébraïque qui est temporel au registre grec qui est spatial. On a traduit ainsi le mot Olam dans le sens spatial de monde. 

 

Q : Lorsqu’on parle d’univers c’est à la fois spatial et temporel ?

R : L’univers est une expression grecque très proche de l’expression hébraïque « shamayim vaaretz - les cieux et la terre ». L’étymologie du mot univers est très proche de l’hébreu : uni-vers, l’unité du divers. L’ensemble universel. Mais cela a d’abord évidemment un sens spatial. 

 

Le thème général en filigrane de toutes ces études c’est l’intuition fondamentale de la tradition biblique qu’il y a une raison d’ordre morale lorsqu’il y a une menace de cataclysme.

 

C’est un univers mental spirituel très différent de la mentalité de la culture contemporaine, et l’intérêt de ces études à suivre sera de confronter ces deux attitudes mentales.

 

Le midrash de la Mekhilta :

Devant cette terreur du peuple, on est dans une impasse. Tous les éléments précédents ayant permis la sortie d’Egypte risque d’être annulés. L’armée égyptienne est derrière le peuple, et devant se trouve la mer, et tout le peuple se trouve démuni.

Une des questions qui se pose de suite à la lecture de ce récit : apparemment cette panique, cette inquiétude est injustifiée ! Le peuple a l’expérience que Dieu intervient en sa faveur, et qu’il y a une providence particulière qui a permis les événements de la sortie d’Egypte !

Pourquoi malgré les dix plaies et les miracles de ce peuple tellement asservi à la société égyptienne qui parvient à sortir vers sa liberté n’attend-on pas ici une intervention supplémentaire de la providence divine ?  

Que se passe-t-il dans le cœur et la pensée des Hébreux à ce moment précis qui provoque une telle inquiétude et qui ne laisse pas espérer à un miracle de plus ?

 

14.13

יג וַיֹּאמֶר מֹשֶׁה אֶל-הָעָם, אַל-תִּירָאוּ--הִתְיַצְּבוּ וּרְאוּ אֶת-יְשׁוּעַת יְהוָה, אֲשֶׁר-יַעֲשֶׂה לָכֶם הַיּוֹם: כִּי, אֲשֶׁר רְאִיתֶם אֶת-מִצְרַיִם הַיּוֹם--לֹא תֹסִפוּ לִרְאֹתָם עוֹד, עַד-עוֹלָם.

Vayomer Mosheh El HaAm…

 13 Moïse dit au peuple: "Ne craignez pas, rassemblez-vous et voyez le salut de Hashem qu’il fera pour vous ce jour ! La manière dont vous avez vu l’Égypte aujourd'hui, vous ne continuerez plus de les voir encore ad olam jusqu’à la fin des temps de ce monde.

 

Au niveau du déterminisme naturel, il y a une catastrophe éventuelle, mais la Yeshouat Hashem permet d’être sauvé au-delà de cette menace impersonnelle du fonctionnement des lois du déterminisme naturel. La Yeshoua est au-delà, c’est une rupture des lois de la nature. C’est littéralement l’idée de « salut » telle qu’elle est exprimée en français à partir du latin.

 

La Mékhilta dit ceci :

Nos maitres ont enseigné : Israël s’est divisé en quatre groupes, quatre types de réaction.  

La première disait : Nipol el hayam - Tombons dans la mer !

 

Parvenu à l’extrême pointe de l’espoir d’être sauvé et devant l’impasse de cette catastrophe éventuelle c’est un effondrement de la foi avec la conséquence de ce choix du suicide arrêtant l’histoire.

 

Une autre partie du peuple disait : Retournons en Egypte ! 

La troisième partie disait : Faisons-leur la guerre !

La quatrième partie disait : Nous allons crier en priant !

De telle sorte de les affoler par la prière.

 

Quatre stratégies sont proposées :

-Le suicide dans le renoncement.

-Le retour en Egypte.

-La guerre.

-La prière.

 

Et la Mekhilta continue :

A la partie disant « Tombons dans la mer ! » Il leur a dit :

14.13

הִתְיַצְּבוּ וּרְאוּ אֶת-יְשׁוּעַת יְהוָה, אֲשֶׁר-יַעֲשֶׂה לָכֶם הַיּוֹם

Tenez-vous là rassemblez-vous et regardez le salut que Hashem fera pour vous ce jour.

A la partie disant « Retournons en Egypte ! » Il leur a dit :

 14.13

כִּי, אֲשֶׁר רְאִיתֶם אֶת-מִצְרַיִם הַיּוֹם--לֹא תֹסִפוּ לִרְאֹתָם עוֹד, עַד-עוֹלָם.

Car comme vous avez vu l’Egypte aujourd’hui vous n’ajouterez pas de les voir jusqu’à la fin du temps.

A la troisième partie disant : « Faisons la guerre ! » Il leur a dit :

14.14

  יד יְהוָה, יִלָּחֵם לָכֶם.

Hashem guerroiera pour vous…

Et ceux qui ont dit : « Prions contre eux ! » Il leur a dit :

14.14

וְאַתֶּם, תַּחֲרִשׁוּן

Et vous restez silencieux !

 

Cela veut dire que clairement selon ce midrash les quatre stratégies sont refusées. Elles ne sont pas au même niveau de mérite selon la capacité de foi mais, malgré tout, ces quatre stratégies sont refusées. C’est donc qu’il y en a une cinquième qui peut être authentique. Et cette cinquième attitude, nous l’aurons dans l’étude plus en détail avec les textes du Maharal portant sur le verset suivant 14.15.

 

Beshala’h 14.15

וַיֹּאמֶר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה, מַה-תִּצְעַק אֵלָי; דַּבֵּר אֶל-בְּנֵי-יִשְׂרָאֵל, וְיִסָּעוּ

Et Dieu dit à Moïse : Pourquoi cries-tu vers Moi ? Parle aux enfants d’Israël et qu’ils avancent…

 

Nous étudierons Rashi qui met en évidence une implication : cela implique que Moïse se préparait à prier. Tsaaqah c’est la prière que l’on clame.

 

On a donc les cinq niveaux. Ce qui est frappant c’est que nous vivons de nouveau la même problématique : dès que l’occurrence de la catastrophe arrive ces quatre réactions apparaissent.

Le suicide dans le renoncement.

Le retour en Egypte.

La guerre.

La prière.

Le midrash nous enseigne que Hashem refuse ces quatre attitudes. Elles ne sont pas toutes entièrement négatives dans leur niveau d’acquisition de capacité de foi croissante. Mais, finalement, c’est la cinquième stratégie qui est indiquée : Dieu veut l’entrée dans la mer.

 

Cela fait apparaitre la structure de la division du peuple en quatre parties ou niveaux qui mènent à un cinquième niveau, et qui nous est annoncée par le récit biblique dès le commencement du récit.

 

Nous allons reprendre ici le début de la Parashah de Beshala’h avec l’aide de la Mekhilta, et nous verrons ensuite comment le Maharal explique ce midrash de la Mekhilta, pourquoi Hashem refuse ces quatre premières stratégies et ordonne la cinquième.

Nous apprenons que le peuple est divisé en quatre niveaux qui mènent à un cinquième. On voit dans le début du récit de cet événement que c’est effectivement cette structure-là qu’annonce le texte.

 

Nous avons à comprendre en quoi ces quatre réactions à la menace de la catastrophe qui se dénoue par le passage de la mer rouge impliquent dans le contexte du récit un manque de foi ? Même celle de la guerre ? Et même celle de la prière ?

 

Nous allons lire ensemble les huit premiers versets de Beshala’h :

 

13.17

וַיְהִי, בְּשַׁלַּח פַּרְעֹה אֶת-הָעָם, וְלֹא-נָחָם אֱלֹהִים דֶּרֶךְ אֶרֶץ פְּלִשְׁתִּים, כִּי קָרוֹב הוּא:  כִּי אָמַר אֱלֹהִים, פֶּן-יִנָּחֵם הָעָם בִּרְאֹתָם מִלְחָמָה--וְשָׁבוּ מִצְרָיְמָה

Et il arriva lorsque Pharaon renvoya le peuple Elohim ne les a pas conduit par le chemin de la terre des Philistins car il était proche car Dieu s’était dit de peur que le peuple ne regrette en voyant (l’éventualité de) la guerre et ne retourne en direction de l’Egypte.  .../...  

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29 août 2010 7 29 /08 /août /2010 19:08

Galout Geoula - Shaarei Ora, Maharal (1989) – 9ème partie

 

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/le_drame_de_l_exil_shaarei_ora/cours_5

Durée : 19,1 minutes - Face A

 

.../...

… Vous n’avez aucune idée de la terreur qu’ont les Arabes chrétiens d’Israël à l’idée d’un état palestinien. Et ceci dit - toutes les exceptions sont possibles – il y a un anti-israélisme qui est antisémitisme pur et simple qui est là ce qu’il est. Et plus ils sont à gauche, et plus ils sont anti-juifs.

 

Q: Comment s’inscrivent les bénédictions d’Abraham à Ishmaël et d’Isaac à Jacob et Essav dans ce problème ?

R: Très bien ! On va faire 5 minutes de pause et on revint sur votre question…

.../...

 

Au sujet de la question d’hier quand même parce que c’est important: quel est le raisonnement qui fait conclure à la Guémara que finalement malgré ces deux éventualités qui chacune d’entre elles se basent sur des versets – donc c’étaient deux possibilités historiques – que à la fin des temps première hypothèse c’est la Perse qui va vaincre Edom, 2ème hypothèse c’est Edom qui va vaincre la Perse ?

 

Finalement la Guémara en Yoma 10a nous indique que finalement ce sera Edom qui vaincra la Perse. Je ne fait pas du tout de prospective de politique fiction je vous cite la Guémara.

Le raisonnement est le suivant :

Le premier temple qui a été construit par Israël a été détruit par les Babyloniens.

Or, les Perses ont détruit Babylonne et ont donné le feu vert pour la construction du 2ème temple, par Cyrus. Or, les Romains ont détruits le 2ème temple instauré par les Perses. Donc les Romains sont plus fort que les Perses. Voilà le raisonnement.

 

Nous arrivons maintenant à la dernière question : cela peut être étudié de différentes manières, c’est un problème très vaste avec références à citer. Vous connaissez le contexte où la Torah nous dit avec un peu d’humour qu’Abraham a transmis tout à Isaac et le reste à Ishmaël, et d’autre part je prendrais un peu plus de temps pour parler de la transmission de la bénédiction d’Isaac à Esaü et Jacob et ce qui se passe là. Je serais succint à cause du temps.

 

Il faut savoir que l’identité Ishmaël est une identité d’Abraham alors qu’il était Abram et n’était pas encore devenu Abraham. Par conséquent, c’est une identité hébraïque « brouillée » :  En hébreu les deux termes « hébreux » et « arabe » ont les mêmes lettres mais pas dans le même ordre :

Ârav = Ayin-Resh-Beit.

                      Ivri = Ayin-Beit-Reish.

 

Q : C’est comme Israël et Ishmaël ?   

R : Israël et Ishmaël ne se ressemblent que par la fin du mot « El ».

 

Et alors il y a un grand principe que surtout la Qabalah étudie : lorsque Dieu a donné permission à un existant d’exister alors il a une place légitime dans la création.

Ce n’est pas Israël, mais pour les péripéties que la Torah nous raconte étant donné les relations entre Sarah et Abraham au moment où Sarah ne pouvait pas  enfanter : d’Abraham est née l’identité d’Ishmaël, elle a sa destinée propre. Nous avons vu hier qu’il y a suffisamment d’indications dans le texte biblique qu’une rédemption d’Ishmaël est pensable.

 

Je vais essayer de formuler ce paradoxe : Au fond le frère au niveau de l’existence ce n’est pas tellement Esaü c’est Ishmaël, au niveau de l’essence c’est Esaü. 

Mais nous sommes en guerre. Et tant que nous sommes en guerre le dialogue est un dialogue de guerre. Dès qu’il y aura la paix, on s’embrasse et le monde entier sera étonné de savoir à quel point nous sommes proches, en Abraham.

 

Ceci dit, puisque vous avez évoqué la proximité Israël-Ishmaël, il y a un Midrash éclairant sur cette question dans Parashat Beshala’h. Midrash Raba nous dit qu’il y a beaucoup de catégories d’hommes par rapport à leurs noms et à leurs vertus, je vous énumérerais ces différentes catégories et je ne parlerais que de Edom et Ishmaël.   

Il y a des hommes qui ont des noms beaux et des vertus bonnes.

Il y a des hommes qui ont des noms pas beaux et des vertus pas bonnes.

Ce sont les deux catégories extrêmes.

Il y a des hommes qui ont beau nom et mauvaise vertu.

Il y a des hommes qui mauvais nom et bonne vertu.

 

Dans la catégories des  hommes qui ont bon nom et mauvaise vertu, le Midrash classe Essav et Ishmaël. Il dit ainsi : Ishmaël Shoméâ El « Ishmaël écoute Dieu ».

Ici c’est une lecture du Midrash parce que dans le Pshat c’est Dieu qui écoute Ishmaël : « Ishma El » « Que Dieu écoute ! »

Et effectivement, il y a une relation d’écoute de Dieu chez Ishmaël qui est indéniable. Les Séfardim ont été privilégiés lorsqu’ils ont entendu chez eux la prière d’Ishmaël, un juif est à l’aise dans la prière d’Ishmaël. Alors qu’il ne peut pas l’être dans la prière de l’église. C’est un tout autre problème. Ishmaël Shoméâ El : Il y a dimension très importante que vous allez retenir.

 

Essav : Ossé Retson Ossav : Il accomplit la volonté de son Créateur. Le Pshat c’est qu’il est Assouï : déjà accompli, achevé. C’est pourquoi l’angoisse existentielle est chez Essav : si on est déjà achevé et que le temps continue on est dans l’angoisse ! Il n’y a que la civilisation de Essav qui a mis l’angoisse dans la culture humaine. Le fondateur de l’existentialisme c’est Essav et en cela il hérite de Qayin de manière énorme – c’est encore un autre sujet. 

 

Il y a deux dimensions de l’accomplissement de la volonté du Créateur.

Or, ce qui définit Israël c’est les deux dimensions à la fois. Naassé véNishma. Ishmaël a surtout le Nishmâ tandis que Essav a surtout le Naassé. Israël c’est Naassé véNishmâ.

 

D’une certaine manière Ishmaël et Essav sont, à des exposants très différents, les limites extérieures de l’identité Israël.

 

Alors j’ajouterais que il est frappant de voir que les Juifs de l’exil d’Ishmaël ont une sorte de polarité Ishmaël. Un Juif Séfardi, et c’est en cela qu’il l’est, est plus sollicité par le Nishmâ que par le Naassé. Alors qu’un Juif Ashkénazi est plus sollicité par le Naassé que par le Nishmâ. C’est schématique et toutes les nuances sont nécessaires.

 

Transmission des bénédictions par Isaac:

 

Isaac avait deux bénédictions différentes à transmettre : Cf. Parashat Toldot.

Premièrement la bénédiction des biens matériels, et il la transmet à Esaü puisqu’il a opté pour la vocation matérielle. Et d’autre part, la bénédiction que le texte nomme la bénédiction d’Abraham qui est la bénédiction des biens spirituels et qu’il ne peut transmettre qu’à celui de ses fils qui a pris femme dans la famille d’Abraham. Esaü prenant femme chez les Cananéennes se disqualifie pour la bénédiction d’Abraham. Il y a d’ailleurs un épisode de la fin de Parashat Toldot où Esaü se pressentant disqualifié, amorce un commencement de repentir en prenant femme chez Ishmaël… Mais il ne répudie pas les femmes païennes. Vous me permettrez cette analogie : finalement le chrétien est monothéiste mais n’a pas renié la trinité païenne…

 

Q : Comme pour Laban ?

R : Non c’est la famille d’Abraham ! Reprenez ce principe que toute cette histoire universelle commence dans une petite famille. Tera’h, Na’hor donne la lignée de Béthouel – Laban où il y a Rivqah, Ra’hel et Léah. Et puis Abraham et Sarah donne la lignée Israël par Isaac. A l’origine ce sont des Hébreux dans l’exil d’Our-Kasdim. Nous vivons quelque chose d’analogue aujourd’hui. Les Hébreux dans l’exil de Rome cela s’appelle des Juifs. Ils ne sont pas païens !

L’hébreu à Our-Kadim s’appelle araméen, l’hébreu à Rome s’appelle juif. Et le retour d’Abraham au pays de Canaan correspond aujourd’hui au sionisme et cela véhicule les mêmes problèmes que nous raconte la Bible du retour d’Abraham au pays de Canaan. Il faut à partir de l’origine juive redevenir hébreu, c’est cela le problème de la société israélienne.

 

Q: Dans la bénédiction d’Isaac lorsqu’Esaü vient pleurer il lui dit...

R:  [27:40] וְהָיָה כַּאֲשֶׁר תָּרִיד, וּפָרַקְתָּ עֻלּוֹ מֵעַל צַוָּארֶךָ

vehayah ka'asher tarid ufarakta oulo me'al tsavarekha

tu seras tributaire (de ton frère)mais quand ta plainte monteras tu jeteras son joug de ton cou

Je commence par un verset précédent (27:36) quand Esaü dit à Isaac :

וַיֹּאמַר, הֲלֹא-אָצַלְתָּ לִּי בְּרָכָה

Halo Atsalta li brakha?

"N'as tu pas réservé une bénédiction pour moi?"

Il aurait dire dire: ne lui as-tu pas réservé une Brakha à lui ?

Donc personne n’est dupe dans ce récit !

Si tu l’a pris pour moi, ne lui as tu pas réservé à lui ?

Jacob, il y a des raisons pour cela, doit assumer le rôle d’Esaü parce qu’Esäu est disqualifé : les tâches matérielles tout en étant dans la vérité. Il devient Rashâ. Il peut être Tsadik tout en ayant assumé les tâches de civilisation matérielle. Joseph fera la preuve que c’est possible. Par conséquent, il lui dit : « ta bénédiction est à Jacob aussi, et je t’explique pourquoi : maintenant s’il démérite alors tu reprendras... ».

Parce qu’Isaac avait un plan clair : chacun des deux enfants ayant opté pour une vocation humaine : la matière Esaü, Jacob l’esprit. Il faut bénir Esaü pour la matière et il partage avec Jacob, Il faut bénir Jacob pour l’esprit et il partage avec Esaü. Mais Rivqah a compris que cela ne peut pas marcher parce qu’elle sait que les frères ne s’aiment pas. Alors ils ne partageront pas. C’est pourquoi la stratégie de Rivqah c’est que Jacob reçoive aussi la bénédiction d’Esaü parce que sinon, elle le dit elle-même, elle les perd tous les deux le même jour. C’est-à-dire que Jacob n’ayant pas de place dans ce monde-ci n’arrivera pas au monde à venir. Et Esaü n’ayant que ce Monde-ci n’aura pas de Monde-à-venir.

 

Q: C’est comme si Jacob était Abel complété par les mains d’Esaü ?

R : C’est-à-dire Shet c’est-à-dire un Abel inassassinable. Tout se passe comme si lorsque Rivqah envoie Jacob chez Laban dans sa famille. C’est, je midrachise,  ‘Havah qui revient et qui exorte Abel à ne pas faire comme la dernière fois et à ne pas rester auprès de Qayin…

C’est ce que j’ai tendance à dire aux Juifs : à partir du moment où les Juifs sont dans la situation d’Abel chez Caïn ils sont en danger. De deux choses l’une, soit on parvient à tranfigurer Caïn – mais on a échoué, la preuve avec la Shoah – et c’est le temps messianique, ou bien Caïn va les massacrer s’ils ne se sauvent pas. Or ,la famille d’Abraham c’est en Israël !  

 

Q: Par rapport au texte de Gikatilla l’exil d’Israël en Edom, cela me fait penser à l’exil de l’âme dans le corps  c’est pareil ?

R : Il faudrait plus de temps pour votre question. Absolument. Cela ressemble. Il faudrait éviter le suicide soit par le corps soit par l’âme.

Q: Il y a quand même cette bénédiction de Rivqah sur les deux qui leur permettra d’aller jusqu’au bout ?

R: Non, il faudrait reprendre votre question dans la cohérence de votre question, parce que il y a un coprs qui se laisse assumer par l’âme – c’est du côté de Jacob – mais il y a un corps qui veut  assumer l’âme – c’est du côté d’Esaü. Par exemple, une indication entre autres : dans la religion de Jacob on adore le Dieu vivant. Tandis que dans la religion d’Esaü on adore un Dieu mort en disant qu’il est ressucité...

A bientôt à Jérusalem…

< fin >

 

*****

  

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29 août 2010 7 29 /08 /août /2010 19:06

Galout et Geoula - Shaarei Ora, Maharal (1989) – 8ème partie

 

http://www.toumanitou.org/toumanitou/la_sonotheque/pensee/le_drame_de_l_exil_shaarei_ora/cours_4

Face B - Durée : 47,3 minutes

 

…/…

Je vais terminer le chapitre 21 du Nets’ah Israël et revenir sur la question posée sur un petit paragraphe non traduit hier.

 

Nous étions arrivés à la citation du Maharal d’une controverse des ‘Hakhamim sur la question de comment situer Ishmaël ; et maintenant il est évident que Ishmaël représente quelque chose qui ressemble beaucoup à ce que les sources appellaient les Arbâ Malkhouyot – les 4 empires. Il y a sans vouloir trop schématiser dans la perspective de l’universalisme de l’islam une impérialisme conquérant qui est en tout cas formellement extrêmement analogue à ce qu’a pu être les empires  politiques.

 

Bien entendu, dans l’islam il y a identification non entre les pouvoirs politiques et religieux mais en tout cas entre le projet politique et religieux. J’ai souvent l’occasion de le dire, je ne pense pas être le seul,  que ce sera décidément assez difficile et il faudra beaucoup de temps pour une mentalité de type occidentale de percevoir la cohérence et le profil des données de la conscience musulmane qui est en particulier sur ce point extrêmement différent de ce que peuvent penser les occidentaux sur ces mêmes problèmes.

 

Je vous rappelle brièvement une des positions de base dans l’islam : dès que l’islam est apparu il est apparu comme une sorte de restauration de la religion originelle qui était celle du premier homme, ou celle d’Abraham ou celle de tous les fondateurs de religions par la suite jusqu’à Mahomet, Mahomet étant considéré comme le dernier fondateur de religion. Et avec une mission, une vocation d’universalisme que je voudrais définir, celle de la conquête du monde à travers l’islam, à la reconnaissance de la souveraineté de Dieu.

Et par conséquent, l’islam ne supporte pas qu’il y ait une organisation politique concurrente de la sienne qui est d’emblée à la fois politique et religieuse. De nos temps il y a des bouleversements considérables dans les sociétés islamiques comme vous le savez, et qui résultent de la décolonisation. Mais malgré tout, et pas seulement ce qu’on appelerait le khoménisme ou le kadafisme, il semble bien que la dominante reste cet islam traditionnel.

 

Je n’emploierais pas les notions de fanatisme ou d’intégrisme qui à mon sens, par rapport à notre sujet, sont des problèmes extrêmement ponctuels. C’est de la psychologie humaine en général appliquée aussi à l’islam. On trouve des fanatismes et des intégrismes dans toutes les sociétés religieuses, ce n’est pas proprement islamiste. Ce qui l’est en revanche c’est un universalisme de conquête en vue de mener le monde entier à devenir la maison de l’islam. Le terme « islam » signifie la soumission à Dieu.

 

Il y a dans l’histoire jusqu’à l’aboutissement de la réussite de cette universalisme islamique des péripéties et il y a des péripéties d’aménagement de coexistence avec les autres sociétés. Mais le grand problème c’est que le monde se divise en deux catégories : « Dar el salam » -  « la maison de la paix », qui est dans la maison de l’islam et « Dar el harb » - « la maison de la guerre », qui est en dehors de la maison de l’islam.

 

Je ne crois pas du tout que l’islam ait changé de nature depuis l’origine et jusqu’à la fin. Les péripéties par lesquelles cette universalisme islamique se propage montre que rien n’a changé à ce sujet.

 

Donc il y a quelque chose dans cet universalisme de l’islam qui ressemble aux empires qu’étaient la grande civilisation de Babel et ensuite celle de Perse, la civilisation grecque et la civilisation romaine, qui devient la civilisation occidentale à travers 2000 ans de développement jusqu’à nous.

 

On se pose alors la question : où est Ishmaël dans cette perspective déjà annoncée par la révélation à Abraham au chapitre 16 de la Genèse, mise en forme par toutes les sources du Midrash que l’histoire d’Israël aura à traverser ces 4 empires, mais voilà que dans le monde il y a Ishmaël !?

Où donc situer Ishmaël ?

 

Et nous étions arrivés à cette citation du Maharal qui dit qu’on trouve une opinion selon laquelle Ishmaël serait le 4ème empire, alors que du point de vue des sources que nous avons, je ne connais pas la source du Maharal sur ce point, le 4ème empire c’est Edom et c’est indéniable et irréversible et je ne crois pas qu’il doit y avoir de discussion à ce sujet, mais le Maharal a tenu à citer cela. Il y a une opinion que Ishmaël serait le 4ème empire.

Il y a eu je pense pendant plusieurs siécles simultanément quand l’impérialisme de l’islam était turc ou arabe – parce qu’il y a deux branches de l’islam, l’empire turc et l’empire arabe pour ce qui concerne les relations avec Israël, puisque comme vous le savez « la Palestine » était une province sud de la Syrie dans l’empire arabe est pendant très longtemps une province turque, et c’est aux Turcs que les Anglais l’ont reprise et c’est de la main des Anglais que les Juifs l’ont reçu !

Donc il n’y a jamais eu depuis 400 ans une souverainenté arabe quelconque qui s’est interposée entre la terre d’Israël et le peupe d’Israël. Cela a été donc dans les derniers siècles, les Turcs et les Anglais. Je pense que c’est bien clair. C’est ensuite la politique anglaise qui a inventé l’état du problème. Et bien il est possible effectivement que cette opinion se rattache au fait que pendant quelques siècles on a pu penser que Ishmaël, soit dans sa modalité turque, soit dans sa modalité arabe, s’approprie l’Occident déjà. Cela s’est arrêté à Poitiers et à Constantinople, mais cela aurait pu être cela que la civilisation que nous appelons aujourd’hui « occidentale », au lieu d’être de dominante Edom aurait été de dominante Ishmaël constituée de ghettos de Edom comme il y a des ghettos d’Israël.

 

Cela c’est pour la première opinion, et finalement le Maharal cite - et je dois vous dire que pour ma part je n’ai pas encore trouvé de sources antérieures – cite sa certitude que Ishmaël c’est la Perse, en tant que cela devient un impérialisme. C’est là que nous étions arrivés. Simplement je vous rappelle que ce texte est du 16ème siècle, et que ce n’est que très récemment que se dévoile qu’Ishmaël en tant qu’impérialisme, en tant qu’empire c’est la Perse, l’Iran aujourd’hui. Nous avons toute une explication du Maharal qui nous montre ce problème.

 

Je vous propose de reprendre le texte p.108 en bas de page.

 

Au sujet du thème des 4 empires, il y a perplexité concernant ce que serait l’empire Ishmaël. Certains disent que c’est le 4ème empire qui serait l’empire d’Ishmaël.

 

Car la difficulté à résoudre c’est que dans la vision de Daniel ces empires sont représentés par des animaux qui sortent de l’eau,

 

et que cette 4ème ‘Hayah, bête sauvage, est très grande et que par consèquent (lorsque dans l’histoire ceci se réalise en empire) il est normal que cet empire ait la force de cet animal sauvage très fort et très grand (de la vision de Daniel qui préfigure ce qui se passera).

Et sinon quel serait cet empire ? Mais de ce que nous savons des paroles des sages, qui connaissent eux les choses cachées de la Torah et le secret – la signification - de tous les empires qui se sont développés dans l’histoire, eux ont expliqué que Ishmaël n’est pas ce 4ème empire, et cette chose là il le savait de façon très claire de part un certain nombres de principes de la sagesse.

 

Il veut dire que ceux qui comprennent les mécanismes de l’histoire du monde créé savent qu’il y a incompatibilité entre ce stade du 4ème empire dans le développement des civilisations et ce que représente Ishmaël en tant que branche dérivée d’Abraham alors qu’il était encore Abram. C’est-à-dire: Ishmaël s’enracine en Abraham alors que les empires ce sont des rivalités des nations extérieures contre la famille d’Abraham. Se référer à l’autre source du Maharal dans le Ner Mitsvah p.18 où il explique que Ishmaël a ses propres bénédictions qui ne sont pas les bénédictions d’Israël que disputent les empires. Les empires disputent la royauté d’Israël, mais Ishmaël a ses propres bénédictions. Donc c’est un cas particulier.

 

Ce qu’ils ont dit là que l’empire d’Ishmaël est un grand empire, ce n’est pas une difficulté, car ce qu’a dit le verset (dans le texte de Daniel) c’est qu’il n’y a que 4 empires qui reçoivent délégations de souveraineté des forces supérieures qui sont déléguées dans l’histoire à travers ces empires. Comme il est écrit : il se passera tout un temps plus un demi-temps et un temps dans l’histoire du monde (je ne rentre pas dans ces chiffres-là, en tout cas pas maintenant) et il y aura 4 royaumes qui auront reçu la délégation de la souveraineté de la providence. Voici donc que le texte lui-même témoigne que ces 4 empires reçoivent leur souveraineté par délégation des forces d’En-haut. L’explication de cela : quand ces forces supérieures avait la souveraineté, cette souveraineté elle-même a été transmise par Dieu à ces 4 empires.

 

C’est-à-dire que lorsque dans le monde d’en-haut c’est le tour de souveraineté de tel ou tel de ces forces supérieures alors c’est délégué dans le monde d’en-bas dans l’empire qui le représente.

 

Car c’est de par la force de ces souverainetés d’en-haut que les empires d’en-bas avaient la souveraineté.

 

Il faut relier cela très simplement au fait qu’on voit que pendant un temps la royauté de l’empire et de la civilisation terrestre c’est Babylone, et puis subitement c’est fini ! C’est remplacé par une autre manière d’être homme : la Perse, et après c’est remplacé par une autre manière d’être homme... etc.

C’est donc que – on revient un peu à ce qu’il disait à propos des sages – ceux qui connaissent les mécanismes du projet du monde créé comprennent aussi comment cela se réalise dans la réalité du monde historique.

 

Car Dieu a pris la souveraineté de ces forces de sainteté supérieure et l’a délégué aux 4 empires car ces 4 empires subsistaient de par la force de ces forces supérieures. Puisque par exemple l’empire de Babel s’est évidemment maintenu et a subsisté de par la force de forces supérieures, or Malkhout Babel a pris la royauté d’Israël.

 

Cela c’est le conflit Nimrod-les Hébreux du temps de la famille d’Abraham.

                     

Et ensuite c’est l’empire de Perse qui apris la souveraineté de l’empire babylonien.

 

Cela c’est historiquement très clair : les Perses et les Mèdes, empire un peu bicéphale comme l’autriche-hongrie, bien que la Perse et la Médie d’après certaines sources ne sont pas de la même éthnie. Quoiqu’il en soit il s’agit d’une descendance de Japhet, et alors on voit bien qu’à un certain stade c’est la Perse qui remplace la Babylonie. Et finalement, lorsqu’on y est assez habitué – seuls les archéologues, les historiens y voient clair - ce sont deux profils de civilisations radicalement différents.

 

Et ensuite c’est la Grèce qui a pris la souveraineté de l’empire Perse, et l’empire romain a pris a souveraineté de l’empire grec comme cela est connu. Mais l’empire d’Ishmaël bien qu’Ishmaël peut être dit animal agressif - takif, cet empire ne vient pas d’une délégation de la souveraineté d’en-haut. C’est seulement ces 4 empires qui avaient leur souveraineté par délégation de forces transcendantes. Et c’est pourquoi ce sont ces 4 empires qui empêchent la Guéoula - la délivrance (c’est-à-dire la fin de l’exil). Et il leur a été donné un sursis de temps. Et tout le temps qu’ils règnent, Israël ne peut pas revenir, et c’est la qu’on s’est situé au temps où la royauté a quitté Israël pour entrer chez les nations. Cette royauté a été donné à ces 4 empires. Ils ne peuvent pas encore revenir au niveau de leur élévation, de leur grandeur de leur stature et de leur souveraineté.

Et bien que l’empire d’Ishmaël est un empire fort, de toute façon il ne fait pas partie de ces 4 empires qui avaient reçu leurs forces des saintetés d’en-haut. Et on ne peut pas tirer de preuve du pouvoir politique et de la domination.

 

Cela veut dire le fait que la descendance d’Ishmaël a des rois, des princes et des chefs politiques qui  possèdent le pouvoir politique et la domination n’est pas une preuve qui en ferait l’un de ces 4 empires. Si le Maharal insiste vraiement sur ce problème c’est que vraiment cela a préoccupé          la tradition de savoir où classer Ishmaël. Vous voyez que pour notre sujet, Edom et Ishmaël bien qu’apparemment en conflit analogue, ce sont deux relations radicalement différentes.

 

Mais l’essentiel de l’explication de notre sujet c’est que l’empire d’Ishmaël et l’empire de Perse c’est la même chose.

 

Voilà donc cette surprise que nous avons avec le Maharal !

 

Car ces 4 empires sont différents et se distinguent dans leurs conduites (et leurs manières d’être conduites d’ailleurs) et l’une n’est pas comme l’autre. Comme c’est dit dans la Guemara Avodah Zara 2 :

 

au moment du jugement dernier on a demandé aux nations du monde de se justifier pour savoir quels seront leur mérite pour pouvoir mériter d’avoir été créés, alors le Maharal va s’appuyer sur la forme de ce texte qui dit :

    

le 4ème empire entre et on leur demande : de quoi vous êtes-vous occupés dans le monde ? Ils répondent : nous avons fait beaucoup de marchés (les multinationales), nous avons fait des bains (les thermes romains), nous avons faits amasser énormément d’or et d’argent. Vient l’empire de Perse on leur demande : de quoi vous êtes-vous occupés ? Ils répondent : on a fait beaucoup de ponts, beaucoup des villes nous avons conquis, nous avons fait beaucoup de guerres. De là tu vois cette différence de plaidoyer, tu vois que ces 4 empires sont différents dans leurs actes, l’une n’est pas la même que l’autre. Et ces choses sont connues. Pourquoi tel empire a sa spécificité dans telle dominante et tel autre dans telle autre. Comme les 4 directions de l’espace sont différentes, ainsi sont aussi différents ces 4 empires. Car ils sont par rapport à ces 4 dimensions de l’espace. Et ils sont différents. Alors la Perse c’est Ishmaël, c’est le même empire.

 

Alors donc lorsque l’islam dit « nous voulons reconquérir Jérusalem », il y a deux voix qui s’entendent à la fois : il y a la prétention de l’islam en tant que Ishmaël et Jérusalem est l’une de leurs villes saintes, et il y a la prétention de la Perse en tant que Perse. Et c’est pourquoi beaucoup d’épisodes de cette invraisemblable bric-à-brac politique s’expliquent par là : lorsqu’il y a eu la guerre entre l’Iran et l’Irak, les armées iraniennes étaient dirigées sur le front irakien pour arriver à Jérusalem. Chose invraisemblable !

Dans Maariv cette caricature au moment de la guerre Iran-Irak, Dosh avait dessiné un soldat irakien et un soldat iranien se visant mutuellement et un petit israélien en bas qui disait : « Mon Dieu fasse qu’ils visent juste tous les deux ! »

A la Knesset, le Rav Mena’hem HaKohen avait cité le Yalkout Shimoni - 1er verset du chapitre 60 d’Isaïe – qui dit qu’à la fin des temps, il y a aura la guerre entre la Perse et un roi arabe et que le monde entier tremblera. Quand la guerre Iran-Irak s’est déclenchée alors la Knesset s’est vidée : tout le monde au buffet autour du rav  Mena’hem HaKohen en train de lire le Yalkout Shimoni. Il n’y a qu’en Israël que peut se passer des choses pareils.

 

Et de mêmes que les 4 dimensions de l’espace sont distinctes, ainsi sont distincts aussi ces 4 empires. La Perse et l’empire d’Ishmaël c’est le même empire parce que leur conduite, leur manière d’être, sont égales.

 

On ne peut pas ne pas percevoir ce qui se passe dans le temps contemporain que finalement on s’impose une sorte d’égalité et d’équation : Ishmaël = l’Iran, la Perse – l’islam c’est-à-dire le khoménisme. Il n’y a qu’à lire tout ce qui s’est passé depuis l’affaire des versets sataniques en passant par toutes les autres.

 

Et c’est une chose connue que le royaume de Perse et le royaume d’Ishmaël se ressemblent et sont égaux dans leur propos et conduite, et là il n’y a aucune difficulté.

 

Comment le Maharal savait-il cela ???

   

Je vous propose de terminer et après nous verrons la deuxième question. Ceci dit, puisqu’il en est ainsi, qu’a dit la tradition entre ce conflit entre Edom et Ishmaël ? Nous verrons cela dans le paragraphe précédent. Or, là aussi il est indéniable que se met en place un conflit entre la civilisation occidentale et l’islam à travers l’Iran. Et quelque soit les péripéties, c’est tellement massif comme schéma préfiguratif ou historiosophique, et c’est pour cela que je l’ai choisi en étude.

Je suis persuadé que vous avez énormément de questions de fond, qui n’ont rien à voir avec le sujet mais qui portent sur la nature de cette tradition qui a transmis à travers les siécles une connaissance de l’histoire aussi totale, et qui cependant est la tradition d’un peuple qui s’est laissé prendre au piège de tout ce qu’il devait être averti, y compris ce qui se passe aujourd’hui. Je crois qu’il y a là un mystère : comment se fait-il que cela fonctionne comme ça, depuis le début ?

 

Q: Il me semble que les exils se déplace de droite à gauche dans l’espace ?

R: Effectivement !

Q: Alors quel pourrait être...

R : Le dernier ?

Q : En la façon de revenir plus ou moins...

R:  de faire sa Aliah à partir de l’Amérique !

C’est un problème qui se relie au sens de rotation de la terre.

J’avais étudié cela lorsque j’avais étudié en éthnologie le problème de ce sens des invasions. Les invasions sont toujours de gauche à droite. Lorsque les invasions vont de droite à gauche elle ne réussissent jamais. Par exemple la campagne de Russie. On a étudié que les Alliés ont utilisé ce principe et ils ont attaqués l’Europe allemande par le sud et par le nord et pas d’ouest en est. Et d’ailleurs je me souviens pour y avoir participer - la bataille des Ardennes où effectivement le mouvement était d’ouest en est - on a failli se faire enfoncer jusqu’à Marseille ! Il y a donc un problème de cet ordre.

 

Q: Ishmaël ne reçoit pas puissance par délégation d’en-haut et je vous demande si on peut le rapprocher de la tradition discrète qui veut que l’islam ait été fondé en réalité par un rabbin hérétique et Mahomet n’aurait joué que le rôle de pourfendeur de sable là-dedans, et je me demande si cet espèce de retour à « une prétention universaliste » par la souveraineté et la conquête ne viendrait pas justement de cette fondation par un rabbin juif hérétique qui aurait surtout fait attention que l’islam ne soit pas tourné vers les Chrétiens, il est beaucoup plus indulgent à l’égard des Juifs, mais est-ce que cette non-délégation ne tiendrait pas sa légitimité par cette origine tellement difficile à affirmer dans la mesure où les Chrétiens relativisent les procédures historiques de leur fondation et de leur fondateur... ?

R : il y a une différence dès l’origine : le christianisme a été fondé par des Juifs et c’est devenu la chrétienté quand c’est devenu romain. C’est le fameux conflit entre l’église de Pierre et l’église de Paul, et finalement l’église de Paul a réussi à faire basculer le christianisme originel après l’époque de Constantin à Rome, il en a fait Edom. Tandis que l’islam c’est tout à fait autre chose. Les fondateurs de l’islam sont des Arabes. Mahomet est un arabe. Il a reçu l’enseignement des rabbins et des prêtres chrétiens mais son propos était de lutter contre le paganisme et le polythéisme qui avait envahi les descendants d’Ishmaël et de retrouver la religion d’Abraham, en arabe pour les Arabes. Lorsqu’il a été le dsiciple des rabbins, il a espéré être reconnu par les rabbins comme le messie. Et comme les rabbins ont refusé, alors il a entamé une persécution des Juifs qui a été terrible. Vous savez tous cela : Médine... etc. 

Cela ressemble beaucoup dans un temps plus postérieur à ce qui s’est passé avec Luther. Luther aussi espérait que les Juifs le reconnaissent comme étant le véritable saint, et les Juifs lui ont tourné le dos en rigolant. Alors il a déclenché un antisémitisme luthérien qui en fin de compte aboutira au nazisme, derrière lequel il y a beaucoup plus les prostestants que les catholiques. En France, on ne perçoit pas toujours cela parce qu’on connait surtout le prostestantisme calvisniste qui a une tout autre profil que le protestantisme luthérien qui, lui, est farouchement antisémite.

C’est différent parce que l’islam aurait pu être la régénération de la descendance d’Ishmaël la Téshouvah d’Ishmaël à la religion d’Abraham à la manière d’Ishmaël. Et cela n’a rien à voir avec le problème que nous avons avec la chrétienté qui, elle, est devenue Rome se prétendant être Israël.

Nous, en tant qu’israéliens, avons un conflit avec l’islam à deux niveaux : d’une par le refus de l’islam en tant qu’islam qu’il y ait une enclave juive – horreur des horreurs - à Jérusalem. Ils n’admettent pas du tout l’enclave chrétienne au Liban. Et d’autre part, chose qui a éclatée avec le khoménisme, cette espèce de déferlement de la prétention de la Perse devenue islamique de remplacer Israël. Vous voyez le double niveau.     

Je crois que nous aurons tout un ensemble de compte à régler quand les choses se décanteront et en ce qui concerne la complaisance et les alliances des pays chrétiens vis-à-vis de ces problèmes. En particulier la participation de la France pour doter l’Irak d’armes atomiques.

Qu’il y ait une alliance entre Edom et Ishmaël c’est évident. Mais l’obbjet de l’étude était de montrer que leur profil d’identité sont radicalement différents. Il y avait cette espèce d’ambiguité paradoxale que d’un côté formellement il semble qu’un juif – je parle d’une juif pieux et d’un musulman pieux – sont beaucoup plus proches l’une de l’autre qu’un juif et un chrétien. Je suis privilégié parce que né en pays islamique ; et par conséquent, je peux vous témoigné qu’on est à l’aise dans la piété muslmane, alors qu’entre Juifs et Chrétiens, alors que la matrice est la même non pas Sarah et Hagar mais Rivqah, il y a un abîme du point de vue de l’expérience religieuse alors qu’il y a convergence du point de vue de la conscience morale. C’est un autre problème. Là je crois que les Chrétiens sont en plein drame d’identité parce qu’ils sont à la fois chrétiens et romains.

 

J’ai l’impression que nous n’auront pas le temps et donc pas la nécessité de faire toutes ces élucidations. Les événements sont tellement accélérés que tout va se remettre en place sans nous donner le loisir d’ouvrir ces dossiers de mises au point. Au fond cela s’est déclenché en 1917, et les responsables du peuple juif ont été aveuglés, paresseux à réagir, et alors se sont passées les catastrophes qui se sont passées, Dieu veuille que ce soit fini, et on retrouve de façon assez caricaturale l’état de la société judéenne au temps du 2ème temple dans la société juive contemporaine, Israël y compris d’ailleurs. Alors deux choses sont vraies à la fois d’une part nous disposons d’une tradition qui nous permet de voir et comprendre et de nous siter, et donc d’être à l’aise dans ce méli-mélo historique épouvantable, et d’autre part j’ai l’impression que c’est la Providence qui peut dénouer cela. Les hommes, juifs y compris, sont d’une irresponsabilité colossale.

 

Il m’arrive de discuter avec des rabbins qui peuvent m’émerveiller de leur présence féconde sur certains problèmes particuliers et m’épouvanter de leur aveuglement total sur le problème d’à côté.

 

Anecdocte entendue hier d’un rabbin de Paris : un Rosh Yéshivah d’Israël est allé dans sa synagogue un Shabat récemment pour parler pour sa Yéshivah en Israël, le rabbin en question, juif sioniste, lui a dit : tu peux parler avec plaisir mais nous avons l’habitude ici que les rabbins d’Israël fasse la prière pour Israël. Il a refusé : on s’occupe de Torah et pas d’Israël. L’autre lui a dit ici tu es à Paris, tu n’es pas à Bnei Brak, pas de prière pour Médinat Israël, pas de discours ! Il s’est fâché et il est parti. Le public a été étonné par ce manque de politesse...etc. Alors le rabbin de la synagogue a expliqué à son Qahal l’attitude de ce rabbin d’Israël qui aurait été découpé en morceau s’il était présent...

 

Q: Si on avait des Juifs responsables…

R: Le Messie serait déjà là ? Oui, je le pense ! Je crois que ce qui travaille c’est l’orgueil. Dès que le rabbinat est devenu une fonction alors cela devient de type saduccéen, et tous ces conflits que le Talmud nous raconte entre les prêtres du Temple qui étaient saduccéens et les maîtres du peuple qui étaient pharisiens. Ce que je dis est dangereux car vous allez en tirer des implications que je n’émets pas du tout. Mais il est bien évident qu’en Israël on est épouvanté de cet aveuglement des rabbins de disapora et d’Israël en grande majorité. Et on est très rassurés de ce que j’ai dit tout à l’heure : la réaction du peuple est très saine, peuple qui pressent l’importance de cette unité qui a été la base de l’enseignement du rav Kook : l’unité entre la Torah, le peuple et la terre, alors que certains rabbins sont dans la perpléxité. Je crois que la meilleure des choses c’est de faire confiance à la Torah lorsque les rabbins la contredisent si j’ose dire...

 

Q: Votre histoire est paradoxale : les Juifs de Bnei Braq refusent de prendre partie pour Israël et ce sont les Juifs de Paris qui...

R: le terme de rabbin doit être réaménagé : lorsque nous parlons des maitres de la tradition :  Raboténou zikhronav lebrakah on les appelle des rabbins ces maitres-là, des ‘Hakhamim. Alors vous voyez qu’il ne faut pas faire l’amalgame. Dans les asiles, des gens se prennent pour des prophètes.

 

Q: Où situer les Arabes chrétiens ?

R: Ils sont très insituables. D’un point de vue national sont comme les autres arabes d’un anti-israélisme pur et simple, impur et pas simple. En tant que chrétiens, ils sont coincés et ne participent pas du tout à cet impérialisme de type perse. En tant que chrétiens, ils ne sont pas musulmans et ont une sainte terreur des musulmans .../...

.../…

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