Vayetse (mars 1996 )
La rencontre entre Jacob et Rachel
Léon Askenazi (Manitou), Rabbin
Collège des Etudes Juives - AIU - Paris, mars 1996
http://www.akadem.org/sommaire/themes/philosophie/1/6/module_2980.php
…/…
(07’43)
Le sujet est une lecture biblique à la manière de la méthode que mon maitre Jacob Gordin nous a transmis et à la manière de cette méthode qui a été employée il y a à peu près 50 ans par les maitres de l’école de Paris et spécialement les anciens d’Orsay. Je mettrais précisèment l’accent sur les problèmes de la méthode. C’est évidemment le contenu qui est important, vous allez découvrir vous-mêmes pendant la lecture pourquoi j’ai choisi ce texte, c’est en hommage à Jacob Gordin qui était un très grand maitre et à sa femme Rachel Gordin très grande éducatrice, et il s’agit d’un récit de la Bible entre Jacob et Rachel. Il ne faut pas s’en exalter, je ne dirais pas que c’est préfiguratif mais c’est très émouvant pour nous qui avons connu ce couple exceptionnel de relire ce texte de la rencontre entre Jacob et Rachel.
En introduction très brève je voudrais élucider 2 notions de l’exégèse biblique selon le Midrash en prennant deux exemples dans le Pentateuque.
La première notion est celle de « Drash ».
Le Midrash est l’application d’une méthode qui s’appelle le Drash. C’est-à-dire la recherche de ce que le texte veut nous communiquer pour nous, indépendamment de ce qu’il disait pour la génération pour laquelle il a été révélé. Alors le Drash c’est le fait qu’à chaque époque, à chaque temps, nous sommes les contemporains de la révélation, et nous devons être disponibles pour l’écouter. Il y a d’autres niveaux de lectures, on les a signalé : c’est le Pshat le Rémez et le Sod, ce Pardés auquel vous êtes familier. Et c’est au niveau du Drash que je me réfère à une indication qui a été presque un leimotiv de l’exposé de Armand Abécassis : c’est que tout ce travail de reformulation de la lecture de nos sources, bien au-delà de 50 ans, c’est un travail énorme qui est en train de se faire en France, je me demande quand même si le judaïsme français pour la France n’est pas en train de préparer un relai avec le christianisme en lui formulant la disponibilité des sources. Des sources qui étaient absolument inatteignables pour les chrétiens. On reprendra un jour cette discussion, parce que ces livres qui sont en train d’être formulés à partir de cette méthode sont beaucoup plus utilisables par les chrétiens qui christianisent que par les Juifs.
La première notion est la notion du Drash. Voilà un Drash de la Guémara à propos d’un verset de la Méguilah de Esther. Et comme nous sortons de Pourim c’est un peu contemporain. Voilà ce que dit le Midrash du Talmud – ‘Houlin 139b - sur une expression du Deutéronome 31:18 dans la Parshah de Vayelekh lorsque à la fin du dernier discours de Moïse avant qu’il ne quitte l’histoire d’Israël il prévient qu’il y aura un temps où la révélation cessera.
Et alors là petite parenthèse - qui va dans le sens de la méthode du Midrash – le Midrash nous restitue les dimensions d’insertion dans l’existence et dans notre histoire de ce que la Bible dit. La Bible a son message qui est le Pshat. Pour bien comprendre le Pshat il faut aussi connaitre les autres niveaux de lecture, c’est un autre problème, mais pour nous lecteurs-auditeurs de la Bible - à chaque Shabat on doit réciter le Pentateuque – qui sommes à travers le temps, qu’est-ce que cela signifie pour nous ?
Il y a différents type de Midrashim. Celui que je vais vous citer historicise l’enseignement de Moïse dans son discours que Moïse est chargé de dire à Israël : lorsque vous arriverez à un stade d’inauthenticité critique :
Dt. 31:18:
וְאָנֹכִי, הַסְתֵּר אַסְתִּיר פָּנַי בַּיּוֹם הַהוּא, עַל כָּל-הָרָעָה, אֲשֶׁר עָשָׂה: כִּי פָנָה, אֶל-אֱלֹהִים אֲחֵרִים
Et Moi cacher je cacherais ma face, en ce jour-là…
Talmud de Babylone traité Houlin page 139 b
Où est mentionné le nom d’Esther dans la Torah ? Du verset (Deutéronome 31) : "Et je
voilerai (Ma face)."
Note :
Bien que le nom d’Esther soit d’origine perse (Astar ou Astarée), les rabbins voient dans son nom une allusion au verbe astor qui veut dire « voiler », « occulter » (qui donne « mystère »), c’est-à-dire le temps où la prophétie s’arrête, et la parole de Dieu n’est plus audible.
Rachi :
L’histoire d’Esther : le verset «"Je voilerai (Ma face)" se réalisera au temps d’Esther, et du
fait de ce voilement de la face, il y aura de nombreux malheurs
Retenez-le en hébreu Haster, Astir : Haster commence par un Hé et Astir commence par un Alef.
Et alors la Guémarah pose une question apparemment baroque - c’est toujours ainsi que commence un Midrash – voilà la question que ‘Houlin dans la Guémara va nous poser : Ester Min Hatorah Min Ayin ? Ester de la Torah d’où ? Où y a-t-il dans la Torah une allusion à la reine Esther ?
De quoi s’agit-il ? Je vais essayer très rapidement de restituer le sérieux de la question et de la réponse de ce Midrash qui va nous historiciser le contenu du verset.
Il faut savoir que la révélation biblique a cessé au moment de ces événements de Ester, Assuérus, Mardochée, Haman. Jusque-là il y avait le temps des prophètes d’Israël et nous, nos ancêtres les Hébreux, étions dans un monde où la révélation était une expérience immédiate. Aucun des personnage biblique ne discute la parole du prophète et ne discute qu’il s’agit bien d’une révélation prophètique. On est pour ou contre mais jamais dans la Bible, il n’y a de théologie qui aurait pour objet de démontrer l’existence de Dieu. Ce ne sont pas des problèmes pour le judaïsme en tant qu’héritier de l’hébraïsme. Cela a cessé ! Et pourquoi les modernes ont-ils oublié qu’il y a de la révélation ? Parce qu’ils ont oublié que cela a cessé !
La grande importance de Pourim c’est la fin de l’hébraïsme et le commencement du judaïsme. Le judaïsme étant l’histoire d’Israël dans un monde où il n’y a avait plus révélation. Et c’est pourquoi c’est à cette époque - il y a 2600 ans environ, le commencement du 2ème temple - que vont se séparer deux lignées : la lignée des Kabalistes qui lisent encore l’hébreu dans le sens de l’hébreu des prophètes, et la lignée des croyants de la Bible qui s’y attache à une adhésion de foi et qui au fond, vos excuserez d’aller très vite - ne comprennent pas ce qu’ils lisent.
Simplement, il y a - je le dirais dans le vocabulaire des Pythagoriciens - une répétition acousmatique – on répète ce qu’on a entendu – on ne comprend pas, on y croit. Parce qu’on sait qu’il y a des raisons historiques qui en fondent la vérité. Tandis que dans la lignée des kabalistes on comprend de quoi on parle. Et cela s’appelle la lignée des mathématiciens ches les pythagoricien, si je me souviens bien. Et nous vivons encore sur ce schisme. Ce n’était pas un schisme, mais cette différence d’option mène à des schismes perpétuels. Et d’ailleurs nous sommes en un temps de crise et le judaïsme risque d’éclater en deux morceaux : ceux qui continue de répèter sans comprendre et ceux qui comprennent. Et on ne sait pas de quel côté se trouvent les Juifs.
Pour revenir au sujet, c’est donc le temps de de la fin de la révélation. La question des rabbins n’est pas du tout une blague de Pourim : où y a-t’il allusion à ce temps de la reine Esther dans la Torah déjá ? D’autant plus qu’ils savent que Ester est un mot persan alors que Hastar Astir c’est de l’hébreu ! Comme les rabbins qui nous enseignent que c’est le 1er de Tishri que le monde a été créé parce qu’ils lisent le mot de Bereshit en changeant un peu l’ordre des lettres en Alef Bé-Tishri. Mais ils savent très bien que Tishri est un mot araméen, chaldaïque, phénicien, et que Béréshit est un mot hébreu !
Depuis le temps de la création d’après le récit biblique, le Shabat, Dieu se cache pour que l’histoire de l’homme commence. C’est un premier Ester Panim. Le fait que la face de Dieu est cachée. Mais il y a des moments où il y a Astara Betokh Astara le fait que ce soit caché et ce fait même est caché. Et cela c’est les moments de fin de révélation. Parce que depuis le 1er homme jusqu’à la reine Esther, Dieu caché se révélait. Et les initiés de ce temps-là étaient prophètes mais c’était une capacité hébraïque de tout le peuple. Et puis il y a différents niveaux de perception du dévoilement de ce qui est caché, : qu’il y a quelque chose et nos méres et nos grands-mères nous parlaient de ces hommes ces grands justes qu’elles connaissaient nous disant : « ils ont la Shékhinah sur la figure ».
Il y a des hommes au côté de qui on sait que ce qui est caché se révèle. Et le fait que ce fait là s’arrête c’est la fin de la prophétie hébraïque. C’est-à-dire par seulement Astir mais Haster Astir : chacer je cacherais. Et c’est là que commence le temps du judaïsme avec le temps de la reine Esther qui clot le canon biblique. C’est pourquoi le nom de Dieu n’apparait pas en clair dans le livre d’Esther, comme si le livre d’Esther avait été écrit par Ha-Shomer Hatsaïr comme nous disait Jacob Gordin.
Voilà un exemple du Drash : comment appuyer sur l’enseignement du verset, la Astarah betokh Astarah, un problème d’histoire fantastique : la mutation entre le temps hébreu et le temps juif.
Puisque le judaïsme commence à partir de la reine Esther surtout de Mardochée (celui qui ne se prosternait pas devant Haman parce qu’il en avait marre d’hocher la tête). C’est la première fois que le mot de « juif » et non pas seulement de « judéen » apparait dans le livre d’Esther.
Il y a un enseignement du Rav Na’hman de Breslav extraordinairement profond à ce sujet : il y a deux formes d’athéisme :
- Ester panim : l’athéisme qui perçoit le Ester Panim, le fait que Dieu est caché. Et c’est un athéisme rageur. C’est un athéisme qui perçoit le manque. C’est les Juifs militants de l’athéisme. Vous connaissez la boutade que les Juifs ont l’habitude de dire : il y a une grande différence entre l’athéisme juif et l’athéisme goï. Un goï athée c’est quelqu’un qui ne croit pas que Dieu existe. Une juif athée c’est quelqu’un qui croit que Dieu n’existe pas. Cela n’a rien à voir. Ils sont obsédé de Dieu parce qu’ils perçoivent le Ester Panim.
- Astara Betokh Astara : le fait que Dieu se cache est caché et ne se perçoit même plus. Mais si même ce fait que Dieu est caché est un fait qui leur est caché alors il n’y a plus d’espoir. C’est ce que les psychiatres nous apprennent : on peut soigner un malade que s’il sait qu’il est malade.
Les ‘Hassidim vivent cela qu’ils savent tellement que Dieu est caché que pour eux Il est dévoilé. C’est quand on ne sait plus qu’Il est caché qu’il n’y a plus d’espoir et que rien ne soit dévoilé.
Sur le même sujet, je vous donne un exemple du ‘Hidoush. Un ‘hidoush c’est un renouvellement de sens. Ce renouvellement de sens n’est authentique que s’il vient être compatible avec tous les enseignements de la tradition. Si il y a un seul enseignement de la tradition avec lequel cela ne colle pas, alors le ‘Hidoush est approximatif, donc faux. Ce qui est approximatif a une dimension positive d’être proche mais une dimension négative de n’être que proche. L’approximatif a la valeur de la proximité mais la contre valeur de l’approximation qui est la pire des catastrophe : lorsque cela ressemble et se borne à ressembler c’est pire que si c’était autre.
La Guémara de Kerouvot 110b dit: « Cela ne ressemble pas quelqu’un qui étudie tout seul de quelqu’un qui append de son maitre ». la question que l’on se pose à la Yéshivah est : Cela veut-il dire que cela ressemble seulement alors pourquoi dit-il que cela ne ressemble pas ? Parce que cela veut dire : même ressembler cela ne ressemble pas. C’est cela le danger de la proximité.
Voilà le problème :
Lorsqu’il y a eu la faute du veau d’or, Dieu a décidé de ne plus se dévoiler publiquement à Israël mais de réserver la révélation de Sa parole à Moïse dans la tente d’assignation, Ohel Moéd, le tabernacle. Voici ce que dit le verset.
Exode chapitre 33 verset 11 :
וְדִבֶּר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה פָּנִים אֶל-פָּנִים, כַּאֲשֶׁר יְדַבֵּר אִישׁ אֶל-רֵעֵהוּ
A partir du moment où la révélation est singularisée à Moïse :
VéDiber Hashem El-Mosheh Panim El-Panim
Et parlait Hashem (Celui dont on dit qu’Il est Dieu) à Moïse face-à-face
Kaasher Yidaber Ish el-rééhou
Comme parle un homme à son ami.
Ménahem Récanati (cabaliste italien 1250-1310)
Et comprends qu’il n’est pas dit « face dans face » (panim bépanim), car cette formule a été
dite pour tout Israël (Deutéronome V, 4) « face dans face l’Eternel vous a parlé. » [Dans le
sens d’une imposition, et le peuple en a eu peur ; mais pour Moïse il est dit « face vers face], « comme un homme parle à son ami », car il recevait la prophétie et ne tremblait pas.
Et nous avons énormément de ‘Hidoushim sur ce verset.
Je vous donne un exemple : dans la révélation du Dieu des Hébreux à Son peuple il n’y a rien qui ressemble à l’oracle. Au contraire, chez les prophètes païens pus on est en transe, en exaltation, plus on est inspirés et par terre. Cela me rappelle Lévinas sur la différence entre Bilaam et Moïse : il y a un verset concernant Bilaam : nofel ou il tombait à terre et ouvrait les yeux et voyait. Rashi explique qu’il tombait à terre à plat ventre pour cacher le fait qu’il n’était pas circoncis. Cela veut dire qu’il peut voir mais ne peut pas être vu. J’ai suivi les cours en Sorbone d’un très grand philosophe des valeurs Lessène qui disait : ne me demandez pas de vivre d’après ce que je vous dis. Moi, je suis le poteau indicateur, et le poteau indicateur ne va pas où cela indique. Il disait cela avec une grande noblesse. C’est cela Bilaam. C’est-à-dire qu’il peut voir mais ne peut pas pas ëtre vu, ne peut pas être jugé. Et Lévinas a raison. Il a une très profonde analyse là-dessus, il n’osait pas dire peut-être que c’est la différence entre le prophète et le philosophe.
Ja vais vous formuler un de ces ‘Hidoushim : dans la halakhah mishloah manot le fait que l’on se donne des cadeaux à Pourim pour reconstruire l’amitié dans la communauté. Il y a deux Mitsvoth : mishloah manot et matanot laévionim. Le judaïsme commence par préserver l’essentiel des grands mouvements fondateurs de l’histoire des Hébreux : Dieu ne se révéle que si le peuple auquel Il se révèle est uni. Il y a donc ce commandement de s’envoyer d’ami á ami des repas complets. Il ne s’agit pas de gâteaux mais des vrais repas complets, et puis la charité, la Tsédaqah aux pauvres. La Halakhah dit que l’on peut considérer un ‘Hidoush comme mishloah manot. Je dis cela pour les Talmidei ‘hakhamim, si vous n’avez pas le temps d’acheter la bouteille de vin et la cuisse de poulet vous faites un ‘Hidoush et vus l’envoyer à votre ami.
Vous allez voir pourquoi : quand on lit le verset :
Exode chapitre 33 verset 11 :
וְדִבֶּר יְהוָה אֶל-מֹשֶׁה פָּנִים אֶל-פָּנִים, כַּאֲשֶׁר יְדַבֵּר אִישׁ אֶל-רֵעֵהוּ
Kaasher cela veut dire comme. Mais on va le lire en hébreu dans le sens de « quand » : Quand est-ce que Dieu parle à Moïse ? Quand un homme parle à son ami !
Et là tout de suite, il y a une profondeur du verset pour le temps des Juifs et que la révélation dépend de l’éthique, comme dirait Lévinas, et on n’a rien changé au verset. Cela s’appelle un ‘Hidoush.
VéDiber Hashem El-Mosheh Panim El-Panim
Et parlait Hashem à Moïse face-à-face
Kaasher Yidaber Ish el-rééhou
Comme parle un homme à son ami : les amis se disent la vérité.
Et alors quand est-ce que Dieu parle à Moïse bien que la révélation ait cessé ?
Quand un homme parle a son ami !
S’il arrive ce miracle qu’un homme parle à son mari, Dieu parle à Moïse, et il y a là un ‘Hidoush.
***
Nous avons dans ce texte la rencontre entre Jacob et les bergers de ‘Haran qui vont être précisément définis par ce texte comme étant les bergers de l’universel. Et voilà le berger hébreu qui va rencontrer les bergers de l’universel. Je vous indique un des thèmes dont je voudrais vous parler.
A la lecture du texte on s’aperçoit du monde de problèmes et toute traduction ne nous laisse même pas sur la surface, parce que l’hébreu est beaucoup plus précis que cela et la lecture de la bible d’après le Midrash exige l’hébreu. Et d’ailleurs cela demande aussi l’araméen, surtout l’hébreu.
Dans la bible du rabbinat il arrive qu’en bas de page on trouve la note indiquant : « verset obscur ». Ce qui nous console parce qu’on ne la trouve jamais dans les bibles chrétiennes. C’est inquiétant parce que si pour un rabbin un verset est obscur, il vaut mieux changer de métier et aller vendre des cacahuettes, cachères autant que possible. C’est parce qu’en général dans ces versets-lá on n’a pas pris la précaution d’aller voir dans le Talmud ce que le verset veut dire. Comme ce n’est pas sérieux d’aller voir dans le Talmud ce qu’un verset de la bible veut dire alors on met « verset obscur » !
Gn. 29:1:
וַיִּשָּׂא יַעֲקֹב, רַגְלָיו; וַיֵּלֶךְ, אַרְצָה בְנֵי-קֶדֶם
Et Jacob leva ses pieds et alla en direction du pays des Benei Qedem les enfants de l’orient/antérieur. Ce qu’il y avait avant.
Il va s’y diriger en quittant le pays de Canaan à cause de la colère-frustration d’Esaü son frère, je ne reviens pas sur l’histoire, il va s’enfuir chez laban pour se mettre à l’abri dans la famille de sa mère suivant la consigne de sa mère. Et voilà commence le récit. Jacob est parti léger comme l’air il a lever les pieds comme si c’était des ailes dira un commentateur parce qu’il a la promesse de la protection de la Providence dans l’exil. Edmond Fleg a fait un poème sur le Midrash que je vais vous citer. Isaac s’adresse à Dieu et lui demande : « fais-moi voir l’avenir de ma descendance ». Pourquoi Isaac ? Parce qu’il est le patriarche du « sacrifice » qui n’a pas eu lieu. Alors Dieu lui montre jusqu’à la Shoah y compris mais pas après. Isaac est épouvanté à la vision de cette avenir de sa descendance. Dieu lui demande : Tu veux que je changes de peuple ? Isaac répond : « non, non ne change pas de peuple ». Et Isaac est monté sur l’autel...
Cela veut dire que l’exil est tellement périlleux qu’il faut une promesse particulière de proteciton qui parfois ne joue pas. Tout cela s’étudie, mais relisez les textes précédents.
Il y a un Midrash qui explique que Dieu a demandé à Isaac : « Choisis, soit l’exil ! soit l’enfer ! »
Isaac a réfléchi comme s’il y avait une différence, et il a dit : « l’exil ! ».
Que signifie l’enfer ?
Si on ne s’occupe pas des païens on devra aller en enfer pour s’occuper d’eux. Alors il vvaut mieux l’exil ! Mais à part cela il n’y a pas de différence…
Je reviens au sujet :
29:2:
וַיַּרְא וְהִנֵּה בְאֵר בַּשָּׂדֶה, וְהִנֵּה-שָׁם שְׁלֹשָׁה עֶדְרֵי-צֹאן רֹבְצִים עָלֶיהָ--כִּי מִן-הַבְּאֵר הַהִוא, יַשְׁקוּ הָעֲדָרִים; וְהָאֶבֶן גְּדֹלָה, עַל-פִּי הַבְּאֵר
וַיַּרְא וְהִנֵּה בְאֵר בַּשָּׂדֶה
Vayar véhineh Beer Basadeh
Et il vit voici un puit dans le champ.
Tout de suite on va voir une scène pastorale d’une profondeur poétique extraordinaire en tout cas en hébreu.
וְהִנֵּה-שָׁם שְׁלֹשָׁה עֶדְרֵי-צֹאן רֹבְצִים עָלֶיהָ--כִּי מִן-הַבְּאֵר הַהִוא, יַשְׁקוּ הָעֲדָרִים; וְהָאֶבֶן גְּדֹלָה, עַל-פִּי הַבְּאֵר
Et voici que là-bas il y avait trois troupeaux accroupis sur le puit
car ce puits servait à abreuver les troupeaux
et la pierre était grande sur la bouche du puit.
Tout de suite on pense – c’est un premier niveau de lecture le Pshat – à une explicaiton de sens, il va s’agir du puit de la vérité. Et voilà que le puit de la vérité est bouché, il y a une pierre sur la margelle du puit et les troupeaux ne peuvent pas s’abreuver. A quelle condition vont-ils pouvoir s’abreuver ? On va l’apprendre :
וְנֶאֶסְפוּ-שָׁמָּה כָל-הָעֲדָרִים, וְגָלְלוּ אֶת-הָאֶבֶן מֵעַל פִּי הַבְּאֵר, וְהִשְׁקוּ, אֶת-הַצֹּאן; וְהֵשִׁיבוּ אֶת-הָאֶבֶן עַל-פִּי הַבְּאֵר, לִמְקֹמָהּ
Il y a un changement :
Et se rassemblait là-bas tous les troupeaux
Ils feront glisser la pierre de dessus la margelle du puits et ils abreuveront le bétail, puis ils raméneront la pierre sur la margelle du puits
Les trois préfigurent l’universel. C’est un thème pour lui-même dans le Midrash : il faut qu’il y ait trois rythme pour que la mélodie commence. C’est un enseignement très riche. Il faut frapper trois coup pour que la porte s’ouvre. Il y a un rythme naturel – un, deux, trois - c’est là que cela commence. Cela se rattache au fait de la question très mystérieuse :pourquoi avons-nous trois patriarches ? L’histoire d’Israël commecne au 4ème top si j’ose dire. Abraham Isaac Jacob cela va très vite, et puis le 4ème qui doit être le messie…
Voyez tout ce qui se passe dans ces trois qui représentent l’universel.
Il faut que tous les troupeaux – on devine déjà tous les bergers derrière les troupeaux – soient là pour qu’on ait a force d’enlever la pierre du puit. C’est l’utopie de l’universel : la vérité ne se dévoilera que s’il y a l’universel ! Retenons déjà cette première indication.
Cela commence à être très beau cette scène pastorale, Jacob berger qui rencontre de sbergers e tleur dit : « mes frères »…
וַיֹּאמֶר לָהֶם יַעֲקֹב, אַחַי מֵאַיִן אַתֶּם; וַיֹּאמְרוּ, מֵחָרָן אֲנָחְנוּ
Vayomer lahem Yaaqov : A’hav meïn Atem ? Vayomrou Mé’haran Ana’hnou
Et Jacob leur dit : mes frères d’où êtes-vous ?
Ils dirent nous sommes de ‘Haran
Ils ne disent pas de l’orient ou de l’antérieur, et dans la tradition humaine universelle les bergers originels et puis toujours de l’antérieur et de l’orient. Mais ils répondent de ‘haran, la ville où la famille d’Abraham s’est arrêtée dans une étape entre our-Qasdim et le pays de Canaan. Abraham avait achevé la sortie d’exil mais eux était resté dans le « désert» de ‘Haran. Il y a à chaque sortie d’exil une partie du peuple qui reste dans une étape du voyage. Et seul Abraham achéve cette sortie d’exil. Ils disent : Nous sommes de ‘Haran. Et ‘haran c’est l’endroit où habite le reste de la famille d’Abraham. Là où Jacob pourra prendre femme, parce qu’il ne fallait avant que Jacob ne s’appelle Israël, épouser des filles de Canaan qui aurait occasioné un mélange des lignées.
Tant qu’Israël n’est pas là il y a interdiction pour le fils du patriarche d’épouser une fille étrangère. Dès qu’Israël est là c’est possible. Par exemple Moïse. Moïse ne pouvait se marrier dit Avrabanel qu’avec une Tsiporah qui n’était pas d’Israël parce que Moïse équivaut à tout Israël ! il ne peut donc pas toruver dans Israël une femme pour lui, il faut qu’il trouve la fille du prophète des nations de ce temps-là qui était Jéthro. Mais c’est après qu’Israël est Israël. Tant qu’il n’y a pas l’adresse où s’adresser, il ne faut pas faire de mélange. Dès qu’il y a l’adresse, alors il y a une seule adresse.
La suite est très belle :
וַיֹּאמֶר לָהֶם, הַיְדַעְתֶּם אֶת-לָבָן בֶּן-נָחוֹר; וַיֹּאמְרוּ, יָדָעְנוּ
Il leur dit : connaissez-vous Laban fils de Na’hor ? Ils dirent : nous connaissons.
Il demande : est-ce que cela existe encore cela l’homme proche ?
Si j’ose dire c’est Jacob qui est exilé de son pays qui arrive à ‘Haran et demande : y a-t-il encore des Juifs de diaspora ? Connaissez vous Laban fils de Na’hor, ceux qui étaient restés, présidents de la fédération sioniste de Marseille….
וַיֹּאמֶר לָהֶם, הֲשָׁלוֹם לוֹ; וַיֹּאמְרוּ שָׁלוֹם--וְהִנֵּה רָחֵל בִּתּוֹ, בָּאָה עִם-הַצֹּאן
Vayomer lahem : Hashalom lo ? Vayomrou: shalom ! Véhineh Ra’hel Bato, Baah Im HaTson
Il leur dit : A-t’il la paix chez lui ? Ils dirent Shalom la paix ! Et voici Rachel sa fille qui vient avec le troupeau.
Je me rappelle un enseignement du Rav Kook : la manière de se saluer dans la famille d’Abraham c’est de dire Shalom. Et s’il y a la paix de dire Salam. S’il n y a pas la paix on dit « Shalom ».
Cela devient important : on ne peut pas oublier que Jacob est le résultat d’une histoire où l’on cherche la paix, et il ne l’a pas trouvé. Caïn et Abel sont deux frères et l’un tue l’autre, et le mot de frère disparait du récit jusqu’à Abraham. C’est un thème de réflexion du Midrash : l’être-frère, l’être de fraternité a disparu quand Caïn a tué Abel. Et le mot « frère » ne revient que lorsqu’Abraham rentre dans l’histoire. Pas seulement le mot « frère », mais également le mot « sœur ». Cela commence avec les récits de l’histoire d’Abraham entrant dans le monde, alors il y a des frères et des sœurs et il faut réussir cela. A la première génération Isaac et Ishmaël, cela ne marche pas ils se séparent. A la 2éme génération, Jacob et Esaü, c’est l’échec, ils se séparent. Jacob est le résultat d’une expérience d’échec et il commence par dire « mes frères… la paix ». C’est l’utopie hébraïque. Il vient d’être meurti par l’échec absolu et il dit : « mes frères », « la paix »! C’est étrange, d’une grandeur extraordinaire que l’on verra tout à l’heure.
29:7:
וַיֹּאמֶר, הֵן עוֹד הַיּוֹם גָּדוֹל--לֹא-עֵת, הֵאָסֵף הַמִּקְנֶה; הַשְׁקוּ הַצֹּאן, וּלְכוּ רְעוּ
Il dit : "le jour est encore long, il n'est pas l'heure de faire rentrer le bétail: abreuvez les brebis et les menez paître."
29:8:
וַיֹּאמְרוּ, לֹא נוּכַל, עַד אֲשֶׁר יֵאָסְפוּ כָּל-הָעֲדָרִים
Ils dirent: "Nous ne saurions, jusqu'à ce que tous les troupeaux soient rassemblés…
on déplacera alors la pierre qui couvre l'orifice du puits et nous ferons boire les brebis."
Il y a là deux types de bergers. Des bergers qui ne peuvent jouer leur rôle de berger que s’il y a l’universel et que tout le monde est là. Et Jacob leur explique : nous les Hébreux chacun est berger…
29:9:
עוֹדֶנּוּ, מְדַבֵּר עִמָּם; וְרָחֵל בָּאָה, עִם-הַצֹּאן אֲשֶׁר לְאָבִיהָ--כִּי רֹעָה, הִוא
Comme il s’entretenait avec eux, Rachel vint avec le troupeau de son père car elle était bergère.
Ils étaient encore en train de parler de l’universel et rachel vint avec le troupeau.
C’est extraordinaire cette note du verset : quand la bergère vient à la recontre du berger hébreu alors il va se passe quelque chose.
וַיְהִי כַּאֲשֶׁר רָאָה יַעֲקֹב אֶת-רָחֵל, בַּת-לָבָן אֲחִי אִמּוֹ, וְאֶת-צֹאן לָבָן, אֲחִי אִמּוֹ; וַיִּגַּשׁ יַעֲקֹב, וַיָּגֶל אֶת-הָאֶבֶן מֵעַל פִּי הַבְּאֵר, וַיַּשְׁקְ, אֶת-צֹאן לָבָן אֲחִי אִמּוֹ
Lorsque Jacob vit Rachel fille de laban frère de sa mère, et le torupeau de Laban frèere de sa mère, Jacob s’approcha, découvrit la pierre de desssus du puit et il abreuva le troupeau de laban frère de sa mère.
Cela veut dire : quand Jacob a vu rachel il a tout seul la force de lever la pierre contrairement aux autres bergers qui ont besoin de l’utopie de l’universel qui ne se réalisera jamais, on est averti par le contexte : depuis le temps de l’orient antérieur pour espérer lever la pierre…
Voilà le mystère de la rencontre entre Jacob et Rachel. Sans l’amour entre Jacob et Rachel, la pierre reste sur le puit. C’est quand il a vu Rachel qu’il a eu la force d’équivaloir à tous les bergers à la fois.
Le Midrash intervient pour nous dire une chose apparemment baroque. On est déjà préparé à entendre ce Midrash par la première lecture. Il va interroger ce nom de ‘Haran ville-étape des frères de la famille d’Abraham qui ne sont pas revenus vers le pays des Hébreux.
« ‘Haran c’est ‘Harona poh shel Olam c’est la colère du monde ».
Qu’est-ce que cela signifie ?
Les noms dans la bible ont toujours un sens.
Reprenons le verset 4 :
וַיֹּאמֶר לָהֶם יַעֲקֹב, אַחַי מֵאַיִן אַתֶּם; וַיֹּאמְרוּ, מֵחָרָן אֲנָחְנוּ.
Jacob leur dit: "Mes frères, d'où êtes vous?" Ils répondirent: "Nous sommes de Haran."
En hébreu Ayin cela veut dire d’où et cela veut dire le néant.
Ce n’est donc pas une question mais une proclamation et c’est toute la théologie des Hébreux:
Mes frères vous venez du néant.
Le problème à résoudre c’est le problème de la fraternité. Pourquoi ? Parce qu’il y a un créateur qui nous a acréé du néant et nous a donné à chacun tout pour être mais il y a une chose que nous devons reconstruire c’est la fraternité des créatures. Au cours du séminaires Armand Abécassis a parlé du triangle à propos du verset « Véahavtah reakha kamokha » tu aimeras ton prochain comme toi-mëme parce qu’il a le même Créateur. En bas du triangle la multiplicité des créatures. Le Créateur unique donne tout à chacun, mais il les créé rivaux. Par définition, les créatures sont rivales parce qu’elles ont un Créateur. Elles reçoivent tout l’être mais la seule chose que le Créateur leur réclame c’est l’amour du prochain.
Les créatures sont pas définition rivales - je pensais que c’était déjà une évidence de la culture moderne qui a découvert la polémologie : la science de l’agressivité, de la rivalité. Et d’ailleurs plus on est proche plus on est rival. C’est pourquoi le verset parle du prochain et pas du lointain. Le lointain n’engage à rien. Le Midrash dit à propos de Jacob et Esaü : ceux qui s’allaitent au même sein maternel ne sont jamais loin l’un de l’autre, parce qu’ils ont le même abreuvoir si j’ose dire.
Par le fait que nous ayions été créés, cela veut dire que nous recevons l’être d’un Être qui nous donnel’être et par ce fait là même nous sommes rivaux, parce que le Créateur donne tout à chacun sauf une seule chose qu’il réclame de la créature : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».
Alors dans un condensé de trois mots le Midrash nous fait lire ceci :
אַחַי מֵאַיִן אַתֶּם
A’haï nous sommes frères. Et c’est notre problème.
C’est pourquoi nous avons à résoudre ce problème de la fraternité parce que nous venons du néant, parce que nous sommes créés.
Je reprends le même étonnement : Jacob qui vient d’une expérience d’échec de la fraternité et est obsédé par le problème de la révélation biblique pour arriver à restaurer la relation de fraternité. Le berger d’israël rencontre les bergers de l’universel. Quel est son message ? le problème de la fraternité. Ils répondent négativement : Nous sommes de ’Haran, la colère du monde.
Quel es tle problème du monde : à l’origine il y a une grande colère et il faut amadouer la colère. Il faut apprivoiser celui qui s’est mis en colère, c’est-à-dire le Dieu du péché originel.
Et vous voyez la cristallisation de deux fonctions des bergers : les bergers de l’universel ont fini par rencontrer la théologie chrétienne : à l’origine il y a une grande colère. Il faut amadouer la colére. C’est cela le problème de la chrétienté avec le problème du péché originel qui fait que nous sommes incapables de résoudre le probléme de la fraternité qui est le problème de la loi.
Voilà cette rencontre :
Jacob : mes frères vous venez du néant !
Ils répondent : non ! nous venons du pays de la colére…
Le Midrash vient nous transfigurer le récit. Ce récit qui s’est passé comme il s’est passé dans son historicité propre que signifie-t’il pour nous ? Et il est formulé de tous les aspects de l’éternité, au niveau du problème éternel de l’humanité.
En fin de compte ne se cristalisent que deux positions : soit résoudre le problème moral de la fraternité, soit la magie impliquée par le mythe du péché originel.
[ Tous les malheurs du monde viendrait de ce que leur ancêtre qui le premier être vivant ayant le courage d’être homme aurait mangé une pomme. C’est d’une ingratitude monumentale ! Et ce serait un Dieu démoniaque qui aurait inventé un monde pareil… L’humour juif : tous les jours de Rosh hashana à la date anniversaire de cet événement-là, les Juifs trempent une pomme dans le miel et la mangent… ]
Ce mythe du péché originel est en contradiction absolue avec tous les enseignements des prophètes bibliques. Il faut comprendre ce que cela veut dire dans le texte hébreu, mais c’est un autre problème d’exégèse. Adam harishon aurait mangé une pomme et le monde serait ce qu’il est…
Et des générations de lecteurs de la bible qui ne se rendent pas compte de ce qu’ils disent.
C’est là la théologie, la mythologie, la philosophie des bergers de l’universel : à l’origine il y a une grande colère – la pomme – alors il faut pour résoudre cette grande colère amadouer le Dieu de la colère et réaliser l’universel des bergers avant d’enlever la pierre de la bouche du puit. Jacob intervient : ne connaissez vous pas la famille d’Abraham ? N’avez-vous jamais entendu parler de paix ? Oui cela existe. Et Rachel vient. Et parce qu’il y a amour entre Jacob et Rachel on enlève la pierre du puit.
On s’est trompé d’objectif. Voyez l’amalgame: les chrétiens ont projeté sur le récit de la Torah sur le problème de la fraternité un récit magique qui explique l’état des choses. Or, il suffit de réfléchir de maniére élémentaire : pourquoi l’humanité est telle dans l’état où elle est depuis que Caïn a tué Abel ? Parce que tout simplement perpétuellement, Caïn a tué Abel. Non pas parce que Dieu s’est mis en colère à cause d’une pomme !
Voyez la différence : on est de Canaan ou de ‘Haran, on est Jacob le berger hébreu ou bien les bergers de l’universel. Entre les deux un mot du Midrash « ’Haran comme l’endroit de la colère du monde ».
Q: est-ce que Melkitsedek est de ‘Haran ?
R : non, c’est à Salem il était le grand-prêtre de Salem où par la suite les Hébreux ont construit Jérusalem. Sa rencontre avec Abraham a eu lieu à Jérusalem. Malkitsedek Melekh Shalem.
Q : en tout cas la mère du roi de Babylone Navanid était grande-prêtesse de ‘Haran.
R : et bien voilà ! Sans aucun jugement de valeur, je comprends l’angoisse des croyants du mythe du péché originel. Pour expliquer l’état du monde sans devenir complétement fou : Dieu qui créé le monde et comment se fait-il que le monde soit dans l’état dans lequel il est ? Alors il faut une explication. A l’origine une grande colère. A cause d’une pomme !
A propos du verset obscur : en fait dans la maison d’étude on se rend compte que depuis le début on ne comprend rien à la Bible. Il faut savoir que c’est un livre étrange. Seulement, je suis fasciné par la ferveur de l’humanité entière vis-à-vis d’un livre qui est incompréhensible. Je vous donne une exemple avec les premiers versets:
Au commencement Dieu créa les cieux et la terre. Mais cela ne peut être ni avant le commencement ni après ! Alors ce mot de commencement est de trop ! Donc on lit un verset faux, ce n’est pas ce que le verset a voulu dire ! Puisqu’il ne va as dire une lapalissade. Par cnséquent cela veut dire autre chose. Et Rashi intervient avec le Midrash pour nous expliquer. Il y a un objectif, une finalité, un but à atteindre, il y a un commencement et donc un jugement dernier. Mais comme on a peur de lire ce qu’il ya d’écrit alors on le lit en grec. Et 2ème verset. Et la terre était chaos ! On ne se rend pas compte de ce qu’on lit : Dieu a créé le monde et la terre était en état de chaos ! Quel est ce récit étrange ? Et l’épisode de la côte. Tout est créé c’est magnifique et on arrive à l’ëtr ele plus important au monde, la matrice des engendrements, la première femme, la première mère c’est l’histoire de fous : une salle d’opération, une anesthésie et on prend une côte et on en fait une femme… Le Talmud intervient pour remettre les choses au point. C’est une histoire de fous que l’on lit avec une piété et une ferveur extraordinaire tel quel. Vous voyez pourquoi le Midrash est important pour dire de quoi il s’agit.
A propos d’Abraham et Nimrod : les deux sont révoltés. Nimrod est révolté de l’état du monde et en veut au Créateur. Il se révolte contre le Créateur. Abraham est révolté de l’état du monde et se met au service du projet du Créateru pour arranger le monde. Ce sont deux voies et il n’y en pas trois !
Abraham va rencontrer le berger de l’universel qui était Melkitsedek. Lequel va passer le relai. C’est le probléme de l’utopie chrétienne : amadouer le Dieu de la colère du péché originel par le rassemblement de l’église œcuménique et romaine universelle. Et cela devient l’impérialisme chrétien. C’est l’échec permanent, cette utopie n’a pas de prise sur la réalité. Vient un berger hébreu qui parle de l’amour du prochain réllement et non pneumatiquement dans l’esprit mais dans la réalité, et la pierre se lève du puit… Et d’ailleurs l’universel s’abreuve à cette eau biblique que personne ne comprend.
C’est un mystère pour moi.
J’ai eu le privilège de naître dans une famille de rabbins où l’on parlait hébreu. Je n’ai jamais pu comprendre cette ferveur des lecteurs de la bible dans une autre langue que l’hébreu. Et cette ferveur est indéniable. Cela ne justifie pas les Chrétiens. C’est une lecture dans une traduction fausse. Même expérience chez les mouvements de jeunesse quand certains chantaient les chants Hébreux avec ferveur sans les comprendre.
Q : En quoi cette méthode que vous appliquez est-elle caractéristique de Gordin ?
R : La connaissance de la sagesse universelle de Jacob Gordin était tellement grande qu’il savait nous dire à quoi correspondait ce que les rabbins du Midrash disaient. C’est de Gordin cela que la colère du monde c’est le péché originel. Cette traduction-là on la doit à Gordin. Il ne faut pas inventer dans le langage des sermons piétistes des allégories pieuses. Il faut savoir ce qui se passe dans le onde et c’est dans la sagesse des nations qu’on le lit.
Q : Est-ce alors un ‘hidoush de Gordin ou y a t’il d’autres maîtres qui adoptent cette approche ?
R : Pas du tout : les maitres qui savaient lire le Midrash en hébreu d’abord et qui avaient la culture générale telle pour comprendre ce que les rabbins du Midrash voulaient désigner en parlant du péché originel dans la forme dans laquelle ils parlaient qui étaient la culture de leur temps. Mais il faut avoir une empathie et pas simplement une sympathie avec l’angoisse des sages des nations pour comprendre leurs problèmes. Et savoir quel es tle dialogue de la rencontre. Or ce dialogue est bien celui-là. La Torah c’est la morale à pratiquer. Cf. Rabbi Akiva : Véahavta réakha kamokha zeh klal gadol batorah. Il nous dit que toute la Torah est dans un verset : tu aimeras ton prochain copmme toi-même. Il faut donc relire l’histoire des Hébreux :la recherche de la fraternité c’est toute l’histoire du premier homme jusqu’à Abraham. Et elle échoue. Et le berger hébreu est obsédé par cela, il commence par dire : « mes frères connaissez-vous la famille d’Abraham y a-t-il la paix ? »
Un ensiegnement du rav Kook : dans la famille d’Abraham pour se saluer on dit « Paix ! ». La première heure de cours chez le rav Kook était pour epxique ce que signifie le mot Shalom. Entre autre il nous disait ceci : dans toutes les cultures on se salue. Chacune à sa manière. Et il y en a une seul où l’on se dit paix c’est dans la famille d’Abraham. En français, on se dit bonjour et bonne nuit. C’est important d’avoir un bon jour mais ce n’est pas cela le problème du monde. Le problème du monde c’est la paix ou la guerre. C’est la fraternité.
Tout le récit de la bible c’est celui-là : comment faire pour que des frères soient des frères. Et le problème est entre les frères et non pas entre les cousins et entre les lointains mais entre les frères.
Et il y a deux commandements dans le même chapitre 19 du Lévitique : « tu aimeras l’étranger comme toi-même ». Ce sont deux commandements différents qui n’ont rien à voir.
Le postulat talmudique est le suivant : la bible ne révèle jamais des évidences plates. Exemple du commandement apparemment logique et rationnel de le respect des parents. Mais c’est tout le contraire : c’est parce que la Torah sait que d’après la nature parent et enfant sont en conflit qu’elle impose le respect des parents. Cela ne va pas de soi, ce n’est pas rationnel. C’est la même chose : c’est entre les plus proches que les conflits sont les plus graves.
Q : pourquoi est-ce avec l’arrivée de Rachel ?
R : c’est une bonne question. Parce que ce n’est que le commencement et que ce n’est pas fini, cela va être repris entre Judah et Joseph et ce n’est qu’à la fin quand Joseph aime ses frères que la Genèse s’arrête et que l’histoire peut commencer. Tout ce récit est un récit d’échec qui n’arrive à se résoudre qu’entre Jospeh et ses frères. Ici ce n’est que le commencement : les enfants de Rachel et les enfants de Léah sont en rivalité absolue. C’est le conflit Judah-Joseph. Ce n’est que lorsque Judah et Joseph se réconcilient que s’achève le problème commencer avec Caïn et Abel et c’est pourquoi on attend le messie fils de Joseph pour la rédemption de la faute de Caïn. Cela commence avec Caïn et cela s’achève avec Joseph.
Nous avons là un grand débat avec le christianisme qui enseigne qu’il faut réussir l’amour du prochain tout en étant obsédé par le péché originel. Cela veut dire qu’il y a la faute du premeir homme et la faute du deuxième homme. La faute du premeir homme c’est la révolte contre Dieu le péché originel des Chrétiens. La faute du deuxiéme homme c’est Adam lé’havéro la faute de l’homme vis-àvis de l’autre homme. C’est pourquoi nous attendons le « fils de David » parce que David a assuré la rédemption de la première faute. David est le premier roi qui fait rêgné Dieu sur terre. Donc la faute d Adam harishone est rédimé. Et on attend le fils de David pour la deuxième faute. Le fils de David s’appelle Shlomoh l’homme de la paix. Ce n’est pas par hasard. Il vient faire la rédemption de la faute de Caïn et non plus de la faute de Adam. La faute de Adam à l’échelle collective c’est David qui en a asurré la rédemption.
Et cela les Chrétiens n’arrivent pas à se rendre compte de cela qu’ils sont dans la préhistoire du judaïsme. Ils en sont encore au stade de l’obsession de la faute du premier homme. Alors que c’est la faute du deuxième homme dont il faut s’occuper. Les historiens contemporains sont inteloqués de mettre en évidence que les nations les plus guerrières ont été les nations de la chrétienté avec le slogan du « tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Or,. Les chrétiens entre eux ont découvert un art de la guerre épouvantable.
Q: j’ai cru entendre que la traduction exacte était : « tu aimeras pour ton prochain comme toi-même » ce qui est différent. Bernheim en a parlé
R: non c’est un autre problème je voulais désigner le solgan, pour l’exégèse c’est un autre problème. Cela vient d’Orsay aussi parce qu’il faudrait que ce soit écrit : Véahavtah léréakha kélekha, mais il y a écrit Véahavtah léréakha kamokha.
Q: j’ai beaucoup de doute sur le Midrash, par exemple le Midrash sur le dialogue d’Abraham avec le Satan lors du sacrifice… si c’était dans le texte la Torah l’aurait inclus ?
R: rien dans le Midrash n’est compréhensible sinon c’est le signe qu’on n’a rien compris. C’est la définition mëme de la révélation : ne se révèle que ce qui est caché ! la Torah ne nous est pas donnée pour dire de splatitudes, des évidences des lapalissades. Un de mes maîtres me disait : quand on ne comprend pas un verset il faut pleurer pour obtenir de comprendre. On ne dit pas je vais aller étudier mais je vais pleurer, parce qu’il faut arracher le sens au verset. Rien dans le Midrash n’est clair à première lecture. Il faut étudier.
En une ou deux phrases pur indiquer qu’il y a une réponse à la question qui a été posée : le verset commence par dire « Vayhi A’har Hadevarim HaEleh ». Et il arriva après ces événements… »
Comment lit le Midrash : « Et il arriva après ces paroles… » Et il se demande les paroles de qui ? Et dans la logique et la cohérence de la mise à l’épreuve d’Abraham c’est entre autres les paroles du Satan qui s’adresse à Abraham pour argumenter et le dissuader…
Il y a plusieurs réponses du Midrash, en particulier les paroles d’Ishmaël : il diasit à Isaac c’est moi le fils d’Abraham circoncis à 13 ans lucide et majeur. J’ai accepté d’être fils d’Avraham toi tu es né comme cela, alors fais ta preuve ! Isaac lui répondit : toi il t’a été demandé de te circoncir sur un membre et tu l’as fait, moi s’Il me demande tout mon être je suis prêt ! Et le peuple juif est obligé de faire cette preuve devant Ishmaël puisqu’il lui réclame l’héritage d’Abraham. Ne croyez pas que ces Midrashim sont anodins. C’est notre histoire qui est en jeu.
En ce qui concerne le Satan il a raison dansle Midrash : comment ? le message de toute la Torah c’est l’arrêt des sacrifices humains et Dieu va éprouver Abraham pour voir s’il est croyant en lui demandant de sacrifier son fils ? C’est une histoire de fou ! Alors le Satan a raison ! Tu n’a pas citer la fin du Midrash qui fait dire au Satan : Abraham tu crois que c’est Dieu qui t’a parlé mais c’est moi le Satan qui t’a parlé. Et il faut comprendre tout cela.
Et à ce moment-là apparait un terme du drame de l’identité juive en Abraham. C’est le fait que Abraham doit faire sa preuve. Un Midrash dit corollairement à ce texte que Dieu a dit au Satan : j’ai vu dans mon monde un juste, c’est Abraham. Alors le Satan lui demande : où est sa vertu ? Il était vieux sans enfant, Tu lui as donné un enfant et tu ne veux pas qu’il t’aime ? Réclame lui cet enfant et tu verras s’il t’aime encore ! Cela nous le vivons existentiellement. Je vais m’arrêter là. Il faut savoir d’abord lire ce que les maitres du Midrash ont dit, savoir que c’était des maitres et que ce qu’ils ont en tête c’est la sagesse du monde et ce n’est pas pour rien qu’ils ont formulés ces midrashim de telle sorte que seulement ceux qui sont capables de comprendre comprennent, les autres ce n’est pas pour eux…